23 novembre – Le gouvernement israélien et son armée n’aiment pas les témoins.
Hier, le 22 Novembre 2002, une autre étape a été franchie. Alors que la
population palestinienne pleure chaque jour la mort de nouvelles personnes :
des enfants, des femmes, des personnes agées ou des résistants (près de 2.000 morts à ce jour),
hier, l’armée israélienne a frappé deux internationaux.
L’ARMEE ISRAELIENNE RECONNAIT L’ASSASSINAT D’UN BRITANNIQUE DE L’ONU A JENINE
Iain Cook, 53 ans, un cadre britannique de l’UNRWA (Agence des Nations
Unies pour l’aide aux réfugiés Palestiniens) a été tué par l’armée
israélienne lors d’une nouvelle incursion.
L’employé de l’ONU était sorti précipitamment d’une caravane un
téléphone cellulaire à la main, un militaire a cru qu’il s’agissait d’une
tentative d’attaque », a commenté la radio militaire israélienne.
L’armée israélienne a refusé à une ambulance, appelée par l’Unwra, l’accès
immédiat à M. Cook qui est décédé par la suite avant d’avoir pu être
transporté dans un hôpital.
Bavure ? Pas vraiment.
Car si l’armée israélienne n’avait pas envahi Jénine une nouvelle fois, Ian Cook (et bien d’autres Palestiniens avec lui) serait encore en vie.
Si elle n’avait pas sauvagement rasé des quartiers entiers du camp de réfugiés une première fois, Ian Cook n’aurait d’ailleurs peut-être même pas été présent à Jénine, puisque son travail consistait à superviser un projet de reconstruction du camp , après la dévastation d’avril.
LE TEMOIGNAGE DE CAOIMHE BUTTERLY, BLESSEE PAR UN TIR ISRAELIEN A JENINE
(retransmis par la liste assawra)
Caoimhe Butterly, 24 ans, militante du Mouvement International de Solidarité,
y a en outre été blessée par des tirs israéliens. Caoimhe Butterly, qui
résidait depuis plusieurs mois à Jénine, a voulu s’interposer entre des
blindés israéliens et de jeunes Palestiniens qui leur jetaient des pierres.
Elle a été blessée par un tir provenant de l’intérieur d’un blindé. Tôt
vendredi matin, elle avait été interpellée par des soldats israéliens et
retenue pendant plusieurs heures avant d’être remise en liberté. Elle avait
été déjà blessée en août.
Cette nouvelle intervention militaire israélienne à Jénine a également coûté
la vie à un enfant d’une douzaine d’années, tué par des tirs de mitrailleuse
alors qu’il lançait des pierres.
Annie Higgins a recueilli le témoignage de Caoimhe Butterly sur les faits de
la journée dans le camp de réfugiés de Jénine :
22 Novembre 2002
» Pour leur nouvelle reinvasion du Camp de Réfugiés de Jénine, les Forces
d’Occupation Israélienne ont déclaré, ce matin, zone militaire fermée la
partie basse du camp. Ils étaient équipés de 12 tanks, 10 jeeps et 2
hélicoptères Apache. J’ai essayé de m’interposer entre les enfants non-armés
et les tanks lorsque j’ai reçu l’appel d’un ami qui me demandait d’évacuer sa
sœur malade puisque l’armée israélienne ne permettait pas l’accès aux
ambulances. Je suis partie avec un ami, un journaliste palestinien, et un
autre bénévole international. Nous avons été arrêtés immédiatement et emmenés
dans un endroit où 20 Palestiniens étaient détenus. Ils avaient les yeux
bandés et les mains menottées. Certains n’avaient plus de pantalon, les
autres étaient complètement dévêtus et ils avaient été sérieusement battus.
Les soldats israéliens m’ont gardé pendant 2 heures durant lesquelles j’ai
été interrogée brièvement, puis ils m’ont dit que j’étais libre de partir.
J’ai demandé la permission de rester avec les hommes, dans l’espoir de
minimiser la violence mais les soldats ont refusé en me disant que cela
n’était pas autorisé. Alors que je refusais de partir, je fus expulsée
manu-militari et ils me dirent que si je retournais dans le secteur, je
pourrais être blessée par balle.
Alors que je rentrais, je suis passée devant le batiment des Nations Unies.
Je m’arrêtai pour parler brièvement avec Iain Hook, le responsable de projet
de l’UNRWA (Agence des Nations Unies pour l’aide aux réfugiés Palestiniens) à
Jenine, qui m’a dit qu’il essayait de négocier avec les soldats pour que des
femmes et des enfants puissent rentrer dans leurs maisons. Il sortit du
batiment des Nations Unies armé du drapeau bleu des Nations-Unies. Les
soldats lui répondirent en anglais par haut-parleur : » Nous n’en avons rien
à faire que vous soyez des Nations-Unies ou qui vous êtes. Allez vous faire
foutre et rentrez chez vous « .
Ces femmes et ces enfants essayent seulement de rentrer chez eux. Iain a dit
que les choses tournaient mal. Il a insisté sur le fait qu’il voulait fournir
un passage de sécurité pour ses 40 travailleurs Palestiniens et pour lui-même
en se référrant aux Lois internationales.
Certains parents inquiets avaient commencé à faire un trou dans le mur à
l’arrière du batiment pour évacuer les enfants qui étaient là pour un
programme de vaccination. Nous avons accompagné certains enfants à rentrer
chez eux.
Ensuite, je me suis dirigée une nouvelle fois vers la maison de la jeunne
fille malade. Sur le chemin, j’ai rencontré un groupe d’enfants qui m’ont dit
que l’un de mes petits amis agé de 10 ans, Muhammad Bilalo, avait été tué et
que 3 autres avaient été blesses par le tir d’un tank. L’un d’entre eux a été
frappé à la tête. Aussi, je suis allé à l’endroit où les enfants étaient
rassemblés et où les tanks leur tiraient dessus. J’ai descendu la rue entre
les enfants et les tanks pour me positionner à environ 50 mètres du tank où
j’ai essayé de dialoguer avec les soldats. Je les ai imploré de ne pas tirer
à balles réelles sur des enfants désarmés. Ils cessèrent leurs tir. Quelques
instants plus tard, un APC s’approcha du tank (un véhicule de transports de
troupes de l’armée, semblable à un tank avec le même armement sauf le canon).
Je pouvais voir leurs visages et j’imagine qu’ils pouvaient voir le mien. Je
les avaient déjà vu en début de journée. Un soldat sortit le haut de son
corps et son fusil du deuxième véhicule et commença à tirer. Au début, il a
tiré en l’air et la plupart des enfants se sont dispersés en courant dans une
ruelle du côté gauche de la rue. Trois petits enfants restèrent et j’ai
essayé de les emmener dans l’allée en les trainant et en les poussant. Je me
suis retournée et j’ai regardé par dessus mon épaule et j’ai pu voir que le
soldat dans l’APC pointait son fusil sur moi à environ 100 mètres. Près de
l’entrée de la ruelle, j’ai reçu une balle dans la cuisse. Alors que je suis
tombée, ils ont continué à tirer dans ma direction. J’ai rampé pour accèder à
la ruelle et là des adolescents m’ont trainé le reste du chemin. Aucune
ambulance n’était autorisé à accèder au camp, aussi j’ai été emmenée sur un
brancard de fortune vers l’entrée du camp où une ambulance du Croissant Rouge
pouvait accéder. Alors que j’étais dans la salle des Urgences de l’hopital de
Jénine, Iain Hook de l’UNRWA était ammené. Il est mort quelques minutes plus
tard.
On nous a dit que lorsqu’il a été abattu, l’armée Israélienne a interdit à
une ambulance clairement marquee UN de l’évacuer et de le transporter pendant
près d’une heure, durant laquelle il a perdu énormément de sang. Finalement ,
les ambulanciers l’ont évacué en le sortant par le mur arrière que les
employés avaient cassé un peut plus tôt.
Ayant été présente dans le camp toute la matinee, je peux certifier qu’aucun
combattant Palestinien n’a tiré pendant les deux heures avant que nous soyons
blessés. Quand je suis passée le matin devant le batiment des Nations Unies,
il était cerné par des snipers et des soldats israéliens qui tiraient de
façon désordonnée dans le camp. Deux personnes ont été tuées et six blessées.
Tous sauf un ont été frappé par les tirs de tanks à l’extérieur de la zone
militaire déclarée par l’armée Israélienne. Je n’ai pas été touchée lors de
feux croisés comme les Forces d’Occupation israélienne l’ont faussement
annoncé, et je ne crois pas que ce fut le cas pour Iain.
Le massacre ne s’est pas arrêté. Les violations aux Drois de l’Homme et les
crimes de guerre vus par le Monde entier en Avril dernier continuent chaque
jour à Jénine. Hier, les cas d’assassinats que vous avez remarqué, sont des
jours habituels à Jénine. Il est devenu suicidaire de s’engager dans des
actes basiques de survie. Les Forces d’Occupation Israélienne s’engagent
encore et encore dans une politique de » tir pour tuer » sans tenir compte du
fait que ses cibles soient des civils ou des combattants armés. Les
Israéliens ont montré en Avril dernier qu’ils peuvent perpetrer un massacre
et que la condamnation internationale ne peut obtenir une ambulance pour
évacuer une personne blessée.
Ainsi le manque de responsabilité vis à vis d’Israel devient provocant alors
que des évènements tels que ceux dont nous avons été témoins hier deviennent
presque habituels. Ce ne sont pas des opérations militaires. Ce sont des
actes de terreur destinés à humilier, brutaliser et mener les Palestiniens
vers la soumission. Il leur est refusé non seulement le droit de résister,
mais celui d’exister. »
Annie Higgins à Jenine
tel: + 972-67-540-298