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C’EST L’OCCUPATION, ET PAS AZMI BISHARA, QUI MENACE LA DEMOCRATIE

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25 décembre – Répondant aux menaces qui pèsent sur le député palestinien israélien Azmi Bishara, le juriste israélien Yael Gross estime que c’est l’occupation de la Palestine, et pas le parlementaire arabe, qui détruit la démocratie dans son pays (traduction Carole Sandrel)


Où est la démocratie, ici ?
Par Aeyal Gross

C’est l’occupation et non Azmi Bashara, la vraie menace pour la démocratie.
Le conseiller juridique du gouvernement a demandé au Comité Central des Elections d’interdire la liste Balad et le ministre Azmi Bashara de se présenter aux prochaines élections, au motif que ce parti dénie à Israël le droit d’exister en tant qu’état démocratique juif. L’éditorial du Ha’aretz (Limites au droit d’être élu, du 22/12/02) soutient qu’il peut être nécessaire en effet d’interdire à Bashara le droit d’être élu à la Knesset, parce que la démocratie israélienne doit pouvoir se défendre. En lisant ces lignes, on peut se tromper et penser qu’Israël est une démocratie éclatante pour laquelle seul Bashara et son parti représentent une sérieuse menace.
Je me demande, pourtant, quelle est la plus importante menace pour la démocratie Israélienne ? Est-ce le parti Balad – qu’on soit ou non d’accord avec leur programme électoral, – qui menace la démocratie israélienne et doit être interdit ? Est-ce que ce ne sont pas les partis qui soutiennent une politique de destruction des habitations de gens innocents – dont le seul crime et que quelqu’un de leur famille a été impliqué dans des activités terroristes – qui menacent la démocratie israélienne ? Est-ce que ce ne sont pas les partis dont la politique, depuis des années, est la discrimination systématique contre la population arabe israélienne qui menacent la démocratie ?
Est-ce que ce ne sont pas les partis dont la politique de barrages routiers a fait que des femmes enceintes, empêchées d’atteindre l’hôpital, ont fait des fausses-couches et perdu leurs enfants, qui sont la vraie menace pour la démocratie ? Est-ce que les partis ayant dirigé les gouvernements dont la politique a instauré un régime d’apartheid dans les territoires occupés ne sont pas anti démocratiques ? En bref, est-ce que les partis qui veulent continuer à régner sur des millions de palestiniens privés de droit électoral ne sont pas en train de détruire la démocratie en Israël ?
Le débat autour de la défense de la démocratie d’Israël est biaisé parce qu’il se présente de telle façon que nous avons une démocratie normale qui peut, en toute légalité, déclarer illégaux des partis comme celui de Bashara qui sont perçus comme la menaçant.
Cette présentation fait table rase du fait que la situation normale n’est pas celle d’un gouvernement démocratique fondé sur l’égalité civile, mais sur une discrimination continuelle à l’encontre des Arabes d’Israël et une occupation qui s’est depuis longtemps transformée en apartheid dans les Territoires.
Les Territoires ne sont plus du tout territoire occupé par temps de guerre et provisoirement tenus. Les colonies et l’occupation continuelle ont rendu illégitime le contrôle par Israël des territoires, et détruit toute revendication d’Israël à défendre sa démocratie.
Israël ne défend pas sa démocratie mais le régime de suprématie ethnique qu’il a établi. Dans ces circonstances, est-ce que la menace contre la démocratie vient de ceux qui veulent continuer ce régime ou de ceux qui veulent le changer, et garantir un Etat qui traite tous ses citoyens à égalité ?
Est-ce que la politique à l’égard des palestiniens – en Israël et dans les Territoires – telle que la pratiquent les partis au pouvoir depuis tant d’années, a fait avancer la démocratie israélienne ? On dirait que nous avons oublié qu’Israël maintient sous domination des millions de gens dans les conditions épouvantables de tant et tant de barrages et de couvre-feu. Cette politique est de la responsabilité directe des leaders politiques tels que Sharon, Ben-Elieze, Eitam, Liberman et autres qui ont conduit ces actions anti démocratiques.
Le conseiller Juridique, cependant ne cherche pas à les interdire, au motif qu’ils menacent la démocratie israélienne. A ses yeux, eux et leur politique font normalement partie d’un Etat normal disposant d’un manuel de démocratie. Seulement, Balad et le ministre Bashara avec lesquels nous pouvons être en partie en désaccord, mais qui réclament d’Israël qu’il soit un état démocratique « pour tous ses citoyens » sont présentés comme la vraie menace contre la démocratie israélienne.
Mais comme c’est merveilleux de vivre dans « la seule démocratie du Moyen Orient ». Surtout si on est Juif.

Le Dr. Gross est chargé de cour en Droit Constitutionnel et International à l’Université de Tel Aviv

CS

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