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« FEUILLE DE ROUTE », GOUVERNEMENT PALESTINIEN : UNE SINISTRE COMEDIE

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23 avril – Grandes puissances et médias font mine, depuis maintenant des semaines, et sous l’œil goguenard d’Ariel Sharon, de considérer que l’avenir de la Palestine est entre les mains de Yasser Arafat, ou plus exactement que « l’intransigeance » du raïs est désormais le seul obstacle à la création d’un Etat palestinien.


La comédie a pris un tour accéléré, depuis le début de la semaine, à propos des négociations entre le Président de l’Autorité Palestinienne et son Premier ministre-désigné, Abou Mazen, pour la formation d’un gouvernement.

De le formation de ce gouvernement, répètent à l’unisson George Bush, son caniche Tony Blair et quelques autres représentants des « Grands » (Union européenne, Russie, gouvernements arabes comme l’Egypte et autres pseudo-amis de la Palestine, …) dépend la publication de cette fameuse « Feuille de route » américaine, qui ouvrirait la voie à la création d’un Etat Palestinien.

De quoi s’agit-il ?

Avant même d’examiner le contenu de ce document, le pacifiste israélien Uri Avnery met en garde contre la tromperie que représente d’emblée ce bout de papier, produit par les Etats-Unis l’an dernier, et le rôle qu’on veut lui faire jouer.

Théoriquement, cette feuille de route « pourrait être un document important », écrit Avnery, mais SI et seulement SI :

– SI toutes les parties concernées souhaitaient vraiment aboutir à un compromis honorable ;
– SI Sharon et consorts étaient effectivement prêts à rendre les territoires, et à démanteler les colonies
– SI les Américains étaient prêts à exercer des pressions sérieuses sur Israël
– SI on avait à Washington un Président comme feu Eisenhower, lequel n’était sensible ni aux votes juifs, ni aux dons de ces derniers
– SI George Bush était lui-même convaincu que la feuille route servait ses propres intérêts, et qu’il ne s’agissait pas seulement d’un os donné à ronger à son caniche britannique
– SI Tony Blair lui-même pensait qu’elle servait ses propres intérêts, et non une petite miette à donner à ses propres concurrents en politique intérieure
– SI les Nations-Unies avaient un peu de pouvoir
– SI l’Europe avait un peu de pouvoir
– SI la Russie avait un peu de pouvoir
– Bref, SI ma tante en avait !

Maintenant, donnons-nous quand même la peine d’examiner le document, poursuit Avnery.

Certes, par rapport à la « Déclaration de Principes » d’Oslo, ils présentent à première vue une avancée initiale : on y parle d’Etat Palestinien, là où le document de 1993 ne prévoyait qu’un « processus », sans dire clairement à quoi il devait aboutir. C’est bien pourquoi le « processus d’Oslo » est mort avec son promoteur israélien Itzakh Rabin.

Mais l’avantage n’est que de façade.

Car la feuille de route contient une béance aussi grande qu’Oslo : elle ne définit pas ce que pourrait être, géographiquement, l’Etat palestinien en question.

Ariel Sharon, dans ses bons jours, évoque la création d’un Etat palestinien confiné aux ex-zones A et B de la Cisjordanie, et à la bande de Gaza, soit 9% en tout et pour tout de la Palestine mandataire (au lieu de 22% si la totalité de la Cisjordanie et Jérusalem-Est sont rendus au peuple palestinien). « Y-a-t-il quelqu’un pour croire sérieusement à une paix dans de telles conditions », s’interroge Uri Avnery.

Et, puis, la « feuille de route » se présente elle aussi comme un processus par étapes, les Etats-Unis (et par voie de conséquence Sharon) ayant un droit de veto à chacune d’entre elles.

Mais ces étapes ne sont elles-mêmes assorties d’aucune date-butoir (à commencer par la mise en œuvre, qui a déjà près d’un an de retard par rapport aux premières déclarations de Bush).

Enfin et surtout, si la feuille de route exige une foule de mesures de la partie palestinienne, aucune contrepartie n’est demandée aux Israéliens.

Comiquement, les Etats-Unis, régis par un système présidentiel, exigent que la réalité du pouvoir appartienne en Palestine à un Premier ministre ; le Royaume-Uni insiste pour sa part pour que la Palestine se dote d’une constitution, alors qu’il n’en a pas lui-même ; tandis que l’homme de Sabra et Chatila, qui trempe par ailleurs dans diverses affaires de corruption et fraude électorale, demande « l’élimination des terroristes, et un gouvernement propre ».

Alors, et alors seulement, on pourrait demander à Israël de se retirer …. Sur les positions occupées avant septembre 2000, c’est-à-dire de mettre fin à l’occupation de la seule « zone A », qui représente moins de 10% de la Cisjordanie (et moins de 2% de la Palestine mandataire), toujours sans la moindre mesure relative aux colonies.

« La vérité oblige à dire qu’il n’y a pas dans ce document un mot pour déplaire à Sharon. Ne serait-ce que parce qu’avec l’aide de Bush, il en torpiller chaque phase, à n’importe quel moment », conclut Avnery.

On voit mal, dans ces conditions, ce qui pourrait pousser Yasser Arafat à faire de nouvelles concessions (comme l’engagement de chercher à désarmer les groupes armés palestiniens, ou la nomination d’hommes réputés prêts à le faire, comme Mohamed Dahlan), si ce n’est un rapport de forces qui ne lui laisse virtuellement pas de marge de manœuvre.

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