6 janvier – Nous sommes partis à neuf de Paris : militants de Paris, de Suresnes, de Savigny et Femmes en Noir. Deux Salvadoriens nous ont rejoint : ils ont apporte le soutien de communautés chrétiennes au maire de Bethléem (qui est salvadorien !).
L’objectif premier de cette mission était de rencontrer responsables et enfants du camp d’Aida en compagnie des pélerins amenés par l’hebdomadaire catholique La Vie. Outre Jean-Claude PETIT, directeur de La Vie, président de Malesherbes Publications, participaient au pelerinage en Terre Sainte :
– Mgr Jean-Luc BRUNIN, évêque auxiliaire de Lille
– Pere MARTIN, responsable de Pax Christi
– Pere Noel CHOUX, prêtre de la Mission de France.
La première rencontre s’est deroulée le 23 decembre, avec visite des camps de Deheisheh et d’Aida puis representation de la piece de theâtre « Nous sommes les enfants du camp » dans la nouvelle salle de theatre de Bethleem.
Le detachement de l’armee israelienne base dans le tombeau de Rachel avait tenu a accueillir la delegation francaise en lancant, une heure avant la visite, des gaz lacrymogenes dans les rues du camp. Aucun autre incident n’a marque cette visite.
Les pélerins ont ete tres émus par le jeu des enfants. M. Jean-Claude Petit, directeur de La Vie, a remis à AbdelFattah Abou Srour, pour le centre Al-Rowwad, un cheque important. Les pelerins ont ensuite achete, pour 800 euros d’artisanat d’Aida et de cartes de voeux que nous avions éditées en France.
Cette premiere prise de contact aura des suites et permettra sans aucun doute de reveiller les chretiens de France, et de leur faire prendre conscience de la situation intolerable faite aux Palestiniens.
Decrire ici les details de notre sejour serait fastidieux. Je soulignerai donc les points importants :
– les murs sont aujourd’hui des lieux que doit imperativement visiter le touriste en Palestine. Il faut les voir avant qu’on ne les demolissent : ils tomberont en effet un jour car ils sont l’expression incroyable d’une incroyable oppression.
Trois types de mur : celui du nord, constitue de blocs impressionnants de beton arme, dont plus de 150 kms a deja ete construit. Nous l’avons vu a Tulkarem. Celui du sud, de Bethléem, Beit Sahour, fait d’une route protegee par deux rangs de barbeles avec lames de rasoir et deux barrieres electrifiees, qui encercle le « grand Jerusalem », passe au pied d’Aida et s’etend vers Abou Dis. Enfin les innombrables murs provisoires, qui barrent les routes, constitues de blocs plus petits, que nous avoins franchis, en les escaladant, a Abou Dis, ou ils divisent la ville, l’Universite, la mosquee.
– les manifestations contre la construction des murs se multiplient. Nous avons assiste a celles de Bethleem et de Beit Sahour, qui se sont deroulees dans le calme. Mais d’autres ont ete attaquees par l’armee d’occupation, a Naplouse, a Jenine, a Mas’ha. Partout des morts et des blesses, l’armee n’hesitant meme pas a tirer contre des citoyens israeliens pacifistes.
– la resistance culturelle a l’occupation s’organise cependant. Des dizaines de conferences ont lieu, dans les territoires occupes mais aussi en Israel (notre amie Anne Brunswic, qui reste a Ramallah jusqu’a fin janvier, est un excellent guide). Des associations comme Al-Rowwad existent un peu partout et nous avons pu en rencontrer a Hebron (association d’echanges culturels Hebron-Palestine), dans le camp de refugies Nur al Shams (Lumiere du Soleil) de Tulkarem, a Bethleem et a Beit Sahour. Les universites de Palestine (nous avons rencontré eleves et professeurs de Bir Zeit) tiennet bon malgre les tracasseries (c’est un euphemisme) de l’armee d’occupation. Des universitaires francais sont partenaires des universites palestiniennes : nous devons nous engager plus encore dans cette voie.
Partout fonctionnent hopitaux et dispensaires médicaux, malgré les risques. Nous n’avons pas pu nous rendre a Gaza ou une equipe medicale de l’A.M.I. operait, car il faut maintenant informer a l’avance les autorites militaires israeliennes, par l’intermediaire du Consulat (fermé pendant notre visite). L’A.M.I. organisera d’autres interventions d’équipes médicales francaises, a Gaza et a Jenine : je vous propose de soutenir cette association francaise qui, comme Medecins Sans Frontieres, ne cede pas a la pression sionniste.
Le dernier attentat suicide vient de faire quatre morts en Israel, tous des militaires au demeurant. Il a ete precede de 81 jours « calmes », calmes en Israel seulement, comme dit Gideon Levy, dans un article d’Ha’aretz du 28 decembre, car en Palestine ils ont ete ponctues d’assassinats de Palestiniens, y compris d’enfants.
Les attentats soudent les Israeliens derriere Sharon, alors que la societe israelienne commence a se fracturer. La crise sociale s’aggrave. Le directeur du Conseil National pour l’Enfance vient de declarer que 40% des enfants israeliens vivent dans la pauvrete, la misere ou la delinquance. 30% sont au bord du gouffre. Seuls 30% ont une enfance « heureuse ». Les intellectuels resistants et les refuzniks ne cedent pas. Apres les pilotes, treize membres d’une unite d’elite de l’armee viennent de refuser de participer a l’occupation. Le gouvernement reprime de plus en plus durement l’opposition interne en Israel tout en continuant son oeuvre de destruction de la societe palestinienne.
L’effondrement du militarisme israelien n’est evidemment pas pour demain mais il se produira. Il faut donc aider nos amis de Palestine a resister et a tenir bon. Notre solidarite est fondamentale.
Je crois que l’annee 2004 sera pire que 2003. Ce pessimisme ne doit pas nous demoraliser mais au contraire renforcer notre volonte de changement.
Je vous souhaite donc une bonne annee 2004.
Jean Claude Ponsin
