23 avril – Le groupe pacifiste israélien Gush Shalom demande vendredi à l’opinion publique internationale de protester auprès de la direction du quotidien Maariv, qui propose aux lecteurs de son édition online un questionnaire suggérant l’assassinat du militant pacifiste Mordechai Vanunu.
Vanunu a été libéré mercredi, après avoir purgé une peine de 18 années de prison dans l’isolement le plus total, pour avoir dénoncé le développement de bombes nucléaires par Israël. Soumis à une assignation à résidence, avec interdiction de s’exprimer, Vanunu a quand même trouvé le moyen de dire quelques mots à la presse internationale à sa sortie du pénitencier : en substance, qu’il n’avait pas changé d’idées, et qu’il continuait de penser que la réglementation internationale, notamment le contrôle de la production d’armes de destruction massive, devait aussi s’appliquer à son pays.
Or, toutes les institutions israéliennes, gouvernementales mais aussi médiatiques, appliquent depuis des décennies le principe d’hypocrisie dans ce domaine : ne pas démentir le fait, patent, qu’Israël est doté de l’arme nucléaire, mais ne pas le reconnaître non plus.
C’est pourquoi un Vanunu vivant et aujourd’hui en régime de semi-liberté (le tribunal qui l’a jugé en 1986 l’ayant condamné à 18 ans de prison « seulement », et pas à la réclusion perpétuelle, au grand dam des réalistes, tels Shimon Peres, qui l’auraient bien vu pourrir dans un cachot jusqu’à ce que mort s’ensuive) pose donc quand même problème, selon Maariv.
D’où la lumineuse idée d’un rédacteur en chef d’organiser un sondage, sur le thème : « Que faire de Vanunu ? ». Et parmi les options proposées à l’internaute, figure l’item « Le tuer ? ». Vendredi à la mi-journée, un tiers des 4.500 internautes ayant participé à ce macabre scrutin avaient d’ailleurs voté la mort pour Vanunu, a-t-on appris à la consultation du site.
On doit protester en appelant le site http://www.maarivenglish.com
Pour autant, si l’initiative de Maariv fait un tout petit peu de bruit, c’est sans doute parce que cet appel au meurtre d’un Israélien d’origine juive émane d’un quotidien à grand tirage.
Mais c’est bien tout : car l’appel au meurtre d’autres Juifs, proféré par des partis ou des bandes d’extrême-droite, parfois avec la bénédiction de rabbins de même obédience, est un phénomène ordinaire en Israël. Il arrive aussi que ces appels, impunis, soient suivis d’un passage à l’acte, comme ce fut le cas pour Itzakh Rabin en 1995, ou au début des années 1980 pour un militant pacifiste.
Quant aux appels au meurtre des Palestiniens, il est inutile d’en parler. Sauf pour les personnalités (Cheikh Yassine, Abel Aziz Al-Rantissi, Khaled Maachal ou Yasser Arafat), les appels au meurtre sont en effet le plus souvent remplacés par des meurtres sans appel, et sans publicité : ni la mort d’une dizaine d’adolescents de 14 à 17 ans au cours des trois derniers jours dans la bande de Gaza, ni l’assassinat de 2 petites filles de 4 et 7 ans jeudi soir, ne risquent de faire la une des journaux israéliens.