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COMMENT ISRAEL ETRANGLE HEBRON (AL KHALIL)

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Le quotidien Le Monde a publié un reportage très éclairant de son envoyée spéciale Stéphanie Le Bars sur la situation à Hébron, où, protégés par l’armée israélienne, les colons imposent un enfer à la population de la ville.


Hébron (cisjordanie) de notre envoyée spéciale

Après avoir tenté d’en interdire l’entrée, le soldat israélien a précisé que l’on pénétrait dans la zone « à -ses- risques et périls » . Habituellement, en Cisjordanie, ce genre d’avertissement met en garde contre « les terroristes palestiniens » . Mais à l’entrée de Tel Roumeida, une colonie d’une dizaine de familles israéliennes fichée en plein coeur d’un quartier arabe qui surplombe Hébron, le militaire en faction faisait allusion aux possibles attaques de ses compatriotes. A juste titre.

A peine franchie l’invisible frontière qui sépare les mobil homes des colons des maisons de leurs voisins palestiniens, les insultes, les cailloux et les oeufs pleuvent sur les visiteurs. Sans broncher, les soldats regardent les enfants en habits du dimanche jeter les pierres. Face à la violence des colons, il est impossible d’accéder à la demeure de la famille Abou Eishé, enclavée dans la colonie, claquemurée depuis plusieurs années derrière des grillages rouillés.

A quelques dizaines de mètres de là, en dehors des « limites » de la colonie, d’autres membres de cette famille vivent dans deux pièces sommaires. Zouhour, mère de neuf enfants, ne se plaint pas. « C’est beaucoup plus calme maintenant ; il n’y a plus ces longues périodes de couvre-feux comme pendant l’Intifada. » Ses relations avec ses voisins israéliens, parmi les plus extrémistes de Cisjordanie, restent pourtant exécrables. Les jets de pierres sur la tôle ondulée de l’auvent qui abrite l’entrée ? Les grillages aux fenêtres ? Les enfants israéliens qui lui arrachent son voile dans la rue ? Les chiens lâchés par les colons pour effrayer ses enfants ? « C’est comme ça ! Que peut-on y faire ? On n’a nulle part où aller et, de toute façon, on est comme eux, on ne veut pas partir d’ici » , clame la quadragénaire. Installée depuis vingt-six ans, elle ne se fait aucune illusion sur la détermination des Israéliens à renforcer la présence juive sur place.

PROJET D’UNE NOUVELLE ROUTE

« La route qui mène à la colonie a été goudronnée il y a trois jours » , relève-t-elle. Des familles doivent emménager dans un immeuble construit en surplomb des caravanes. En février, l’armée avait annoncé la construction d’une route reliant Tel Roumeida aux enclaves israéliennes de la vieille ville d’Hébron, demeurée sous contrôle israélien après l’accord de 1997, et où vivent quelques centaines de colons extrémistes. Les autorités religieuses palestiniennes ainsi que le Comité de réhabilitation d’Hébron, une association qui tente de préserver le centre historique de la ville rendu invivable par la présence israélienne, ont déposé un recours contre ce projet. Le tracé de la route prévoit la confiscation de terres, le passage sur un cimetière musulman ainsi que la destruction d’oliviers et de vestiges archéologiques. La justice israélienne n’a pas encore fait connaître sa décision.

Dans le même temps, la liberté de mouvement des habitants palestiniens de la vieille ville s’amenuise de semaine en semaine. Des tourniquets métalliques viennent d’être installés à l’une des entrées du centre historique, à côté de la mosquée d’Abraham, lieu saint musulman, qui jouxte le tombeau des Patriarches, lieu saint juif. Ils s’ajoutent aux portails électroniques qui contrôlaient déjà l’entrée de la mosquée. Depuis quelques jours, de nouveaux barrages, blocs de plastique et barbelés amovibles, ont surgi à de nouvelles intersections. Censés protéger les abords de deux colonies déjà fortifiées, ils contraignent les piétons à de multiples détours. Dans une de ces ruelles fantômes, Tayssir tente de vendre ses fromages. Les barbelés viennent mourir au seuil de son échoppe et les clients se font de plus en plus rares. Mais, « être là, même pour personne, c’est un acte de résistance » , commente-t-il sous le regard d’une patrouille israélienne.

Pour Ariel Sharon, le premier ministre israélien, l’affaire est entendue. Les colonies de la vieille ville d’Hébron et de Tel Roumeida « le site de la capitale du roi David » sont partie intégrante du « rêve » lié à l’entreprise de colonisation de l’Etat hébreu. C’est ce qu’il a une nouvelle fois défendu à l’occasion de la Pâque juive, le 22 avril.

Stéphanie Le Bars
Article paru dans l’édition du 27.04.05

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