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SHARON : L’ART ET LA MANIERE D’EN DECOUDRE AVEC TOUTE POSSIBILITE DE PAIX

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Dans son dernier article, Uri Avnery, militant anticolonialiste israélien, décrit la manière dont Sharon commandite des assassinats et des rafles dans les territoires palestiniens occupés, pour déclencher des ripostes de la part des Palestiniens et pouvoir en découdre avec toute idée de processus de paix énoncée par Bush, en continuant à renforcer la colonisation en Cisjordanie et à y annexer impunément davantage de terres, tout en gardant les habitants de la Bande de Gaza prisonniers.


Après avoir décrit comment Sharon a louvoyé tous ces derniers mois pour gagner du temps et a fait semblant d’accepter l’idée d’une négociation avec Mahmoud Abbas quand il était trop tôt à ses yeux pour lancer « une campagne de diabolisation contre lui avec l’entière participation de tous les médias israéliens et mondiaux », Sharon estime désormais pouvoir se livrer à une attaque frontale pour mieux en découdre avec toute idée de retour aux frontières de 1967, explique Uri Avnery. Mais, souligne-t-il, il n’y a eu, malgré les apparences, aucune trêve dans les attaques israéliennes contre les Palestiniens.

(…) « En fait, la confrontation ne s’est pas arrêtée un seul moment. Les Palestiniens ont certes déclaré une Tahidiya » (« accalmie »), mais c’était seulement un accord entre Palestiniens. L’armée israélienne n’y a pas pris part et a continué à entrer brutalement dans les villes et villages palestiniens, pour arrêter des militants recherchés et pour en tuer quelques-uns de ci de là.

La nouvelle phase a commencé avec l’assassinat de Luay Saadi, un militant du Djihad islamique dans la zone de Tulkarem, qui avait déjà passé cinq années (sur ses 25 ans) dans les prisons israéliennes. L’armée l’a décrit comme un commandant d’un grade très élevé et comme une énorme « bombe à retardement ». Le Djihad s’est emparé de cette ridicule affirmation avec empressement, parce qu’elle justifiait une riposte majeure. En privé, les Palestiniens disaient qu’il n’était qu’un militant local.

Quoiqu’il en soit, quand Sharon a donné, entre le petit déjeuner et le déjeuner, son accord pour cette exécution, il savait qu’il condamnait également des Israéliens à mort – car il était certain que le Djihad répondrait par un acte de vengeance. On ne peut s’empêcher d’en conclure que c’était en fait le but de l’opération.

Ce qui s’est très vite confirmé. Un djihadiste d’un village palestinien voisin a fait un attentat-suicide dans le marché aux fruits de la ville israélienne de Hadera, où cinq Israéliens ont été tués. (Dans la terminologie utilisée par tous les médias israéliens, conformément à ce qui est dit ci-dessus, les Israéliens sont toujours « assassinés » alors que les Arabes « trouvent la mort » ou, au plus, sont « tués ».) Le village du kamikaze est séparé de Hadera par le haut mur de séparation, mais apparemment cela ne l’a pas arrêté. Avant sa mort, il a déclaré sur une vidéo qu’il vengeait l’assassinat de Saadi – réfutant l’affirmation de l’armée que l’attentat avait été préparé avant le meurtre et n’avait rien à voir avec lui.

Comme si elle n’attendait que cet attentat, l’armée s’est immédiatement lancée dans une action bien planifiée. Un blocus général absolu a été imposé sur le nord de la Cisjordanie. Les villes et villages de toute la Cisjordanie ont été isolés de nouveau, quelquefois quelques heures à peine après que les barrages routiers eussent été levés sur l’insistance de Condoleezza Rice. Une chasse à l’homme générale contre les militants de Djihad a commencé, laissant clairement entendre que le tour des militants du Hamas et du Fatah ne tarderait pas à suivre.

Dans la bande de Gaza, un cycle parallèle a commencé. Par solidarité avec les camarades de Cisjordanie, quelques fusées Kassam ont été tirées sur des localités israéliennes sans toucher personne. La réponse était déjà préparée à l’avance : l’armée a coupé la bande de Gaza de tout contact avec le monde, tous les passages ont été fermés. La bande de Gaza a reçu des obus et des bombes, de terre, de l’air et de la mer. Des missiles héliportés ont tué le militant du Djihad, Shadi Muhanna, en même temps que son adjoint et que quatre passants dont un adolescent – une action qui pourrait très bien encore rapprocher le chef d’état-major Dan Halutz de la Cour pénale internationale de La Haye. La vengeance est assurée, de même que la vengeance de la vengeance.

Alors que le monde entier couvrait de louanges le « désengagement » et Sharon, l’homme de Paix, celui-ci a lancé une offensive générale pour l’annexion de presque toute la Cisjordanie.

La semaine dernière, sur tous les territoires palestiniens, les misérables conditions de vie ont encore empiré. Cela ressemble à une punition collective, ce qui est interdit par la quatrième convention de Genève. Mais en réalité, c’est encore bien pire : le but est de semer le désespoir chez les Palestiniens, de les mettre à genoux, de les contraindre à accepter le diktat de Sharon – se contenter de 42% de la Cisjordanie (11% de la Palestine d’avant 1948) dans plusieurs enclaves – et finalement de les convaincre d’émigrer définitivement.

Sharon se conduit comme un torero, plantant ses banderilles dans les épaules du taureau afin de le rendre furieux et de le tourmenter, jusqu’à ce qu’il se débatte dans toutes les directions.

Alors que l’attention est attirée par l’action militaire d’envergure, les colonies s’agrandissent à un rythme effrénée et de nouvelles colonies émergent. La construction du Mur continue de plus belle, malgré l’attentat de Hadera qui a montré sa valeur sécuritaire douteuse. Le démantèlement de centaines d’« avant-postes » construits après 2001 qu’exige la Feuille de route n’est même pas au programme. Tout ce que l’armée a fait a été de déplacer cinq nouveaux « avant-postes » installés cette semaine, avec beaucoup de bousculades et de coups mutuels, sans utiliser gaz lacrymogènes, balles de sel ou de caoutchouc ou bombes assourdissantes, réservés semble-t-il aux militants pacifistes israéliens.

La demande de l’envoyé du Quartette, Jeff Wolfenson, d’ouvrir le passage absolument vital entre la bande de Gaza et la Cisjordanie, a été traitée avec mépris. Comme Wolfenson est très estimé par Bush et par Condoleezza Rice, cela a une signification particulière.

Les gens de Sharon suivent de près les événements à Washington. Ils savent que Bush est en grande difficulté et qu’il est près de devenir un canard boiteux. Condi, la cannette, clopine derrière lui.

Pour Sharon, c’est un soulagement. Enfin, il peut maintenant cesser de faire l’éloge de Abbas et commencer à l’enterrer. »

[Traduit de l’anglais « Abbas and the Lame Duck » : RM/SW]

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