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A l’hôpital Shifa (bande de Gaza) : la catastrophe sanitaire est là

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A lire, ci-dessous, un reportage de l’envoyé spécial du journal Le Monde, Benjamin Barthe, décrivant la situation à l’hôpital Shifa (bande de Gaza). Des centaines de dirigeants gouvernementaux et hauts fonctionnaires français liront cet article cet après-midi à leur bureau, après avoir déjeuné plus ou moins copieusement. Mais cela ne troublera pas leur digestion pour autant.


Reportage
Coupures d’électricité et manque de médicaments à l’hôpital Shifa
LE MONDE | 04.07.06 | 13h08
Le sort des malades de l’hôpital Shifa de Gaza se joue dans l’arrière-cour de l’établissement, à l’intérieur d’un conteneur de couleur sable qui abrite trois générateurs. Depuis le bombardement de son unique centrale électrique par les hélicoptères israéliens, mercredi 28 juin, la bande de Gaza ne reçoit que six heures d’électricité par jour. A Shifa, le bon déroulement des opérations et des traitements dépend donc de la capacité des générateurs à pallier les coupures de courant. « Nous disposons de suffisamment de diesel pour encore six ou sept jours, dit Jomaa Al-Saqqa, le directeur des relations publiques de l’hôpital. Dimanche, les Israéliens ont ouvert pendant quelques heures le terminal de Karni et nous avons pu reconstituer une partie de nos réserves. Mais si l’un de nos générateurs tombe en panne, ce sera très vite la catastrophe. »
L’électricité produite est d’un voltage trop faible pour assurer un fonctionnement normal. Toutes les opérations à caractère ordinaire ont donc été reportées. Dans la salle des dialyses, les sautes de tension ont grillé la carte à puce d’un des appareils. Elle a rejoint dans un débarras cinq autres machines du même type en attente d’une hypothétique réparation. « A cause du bouclage de Karni, les pièces détachées ne rentrent plus et nous ne pouvons pas assurer la maintenance de notre équipement », dit Khader Hassouna, l’infirmier en chef de l’hôpital.
Ces contraintes qui obligent le personnel à s’improviser bricoleur minent le moral des malades. Affalée dans un siège de dialyse, une couverture remontée sur les jambes, la vieille Fawzia, au visage cuivré par le soleil, colle un transistor à son oreille. « Je suis les infos en permanence car j’ai très peur d’une invasion israélienne, dit-elle. J’ai trois traitements par semaine. Si l’électricité est coupée et que l’un d’eux est annulé, je peux mourir. Le jour où il n’y avait plus d’essence, je suis venue en carriole pour être à l’heure à la séance. » Un étage plus haut, dans le service de cancérologie, les patients sont eux aussi devenus des adeptes du « système D ». Rika, qui veille son mari en cure de chimiothérapie, explique comment leur fils, installé dans les Emirats arabes unis, a apporté un remède introuvable dans les stocks de l’hôpital. « Ce n’est pas humain, soupire-t-elle. Pour un simple soldat, Israël met en danger la vie de milliers de Palestiniens. Imaginez que cela se passe en France ? Comment réagiriez-vous ? »
FRONTIÈRE FERMÉE
En mai, à la suite d’un bouclage prolongé de Karni, deux cents variétés de médicaments manquaient sur les étagères de Shifa. La menace d’un effondrement du système hospitalier gazawi avait poussé les autorités israéliennes à rouvrir le terminal. Mais comme les caisses du régime palestinien sont quasiment vides, les réserves n’ont pas été entièrement reconstituées. « Nous avons de quoi tenir trois ou quatre semaines, dit Jomaa Al-Saqqa. Si les Israéliens attaquent et que les blessés affluent, ce stock va disparaître en quelques jours. »
Farid, un fonctionnaire atteint d’une tumeur au poumon, avait cru se mettre à l’abri de ce scénario catastrophe. Il avait obtenu le feu vert du ministère de la santé pour se faire hospitaliser au Caire, loin du volcan gazawi. C’était sans compter la capture du caporal Shalit et le retour en force des tanks israéliens. Devant la montée des périls, le terminal de Rafah sur la frontière avec l’Egypte a été fermé, interdisant à Farid de quitter les couloirs de l’hôpital Shifa.
Benjamin Barthe

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