Dans son éditorial du 4 octobre, le quotidien algérien L’Expression relève à juste titre le décalage indécent entre la plaidoierie de Chirac en faveur de la reconnaissance par la Turquie du génocide arménien et l’attidude de la France qui n’a toujours pas demandé pardon pour ses crimes en Algérie, mais au contraire fait voter des lois sur les « bienfaits de la colonisation française ».
L’Arménie et le 3ème mandat
«Un pays, une nation, se grandit toujours de reconnaître les erreurs qu’elle a pu commettre». La phrase est de Jacques Chirac, chef de l’Etat français, lors d’une conférence de presse qui vient d’être tenue conjointement avec le président de la République d’Arménie.
Une visite en Arménie où le président français a tenu à rappeler que l’entrée de la Turquie à l’Union européenne est conditionnée par sa reconnaissance du génocide arménien comme l’a fait «l’Allemagne en reconnaissant profondément la Shoah» et qui «n’a pas pour autant perdu son crédit».
De telles vérités prononcées par le premier des Français sonnent de ce côté-ci de la Méditerranée, plus précisément en Algérie, comme une nouvelle agression envers tous les peuples qui ont, par le passé, subi l’envahissement de la France. Les mots que vient d’avoir la France pour les Arméniens se veulent être ceux du Pays des droits de l’Homme. Ici en Algérie, la perception est tout autre pour avoir subi les affres de l’invasion qui tendait vers l’extermination qui ne disait pas son nom. Comme l’expédition qui cachait la conquête. Comme le dépeçage d’un pays en départements.
Qu’aujourd’hui le chef de cette France s’émeuve du martyre vécu par un autre peuple au moment même où se préparaient les fêtes du Centenaire de la colonisation française en Algérie, est d’un aplomb qui laisse perplexe.
Chirac demande à la Turquie un geste en direction des Arméniens que la France refuse aux Algériens. Comment peut-on qualifier 130 années d’assassinats, d’enfumades, de famines organisées? Quelles circonstances atténuantes peut bien trouver Jacques Chirac à ces chefs du corps expéditionnaire français quand il lit leurs «exploits»? Que pense-t-il de Cavaignac, de Pélissier, de Saint-Arnaud, de Deval, de tous ces bouchers qui ont apporté «la civilisation» en Algérie?
Allez si loin prêcher la bonne parole, alors que devant sa porte, le ménage reste à faire, ceci est bien français. Rien cependant n’est fortuit. Tout est rapport de force et calcul politicien. Les «larmes» versées aujourd’hui sur l’histoire des Arméniens sont les mêmes que celles versées hier sur les Juifs sous Vichy.
Et c’est dans un même sens des intérêts français que la repentance est refusée aux Algériens même au prix de tous les traités d’amitié du monde.
Pour mieux comprendre les ressorts qui «décident» ce qui doit être génocide de ce qui ne l’est pas, il faut remarquer que ceux-ci se tendent particulièrement à l’approche d’élections. De là à dire que Chirac veut rempiler pour un 3e mandat…
Zouhir MEBARKI
Le 4/10/06 – http://www.lexpressiondz.com
CAPJPO-EuroPalestine