URL has been copied successfully!
Header Boycott Israël

La vitalité de la création artistique palestinienne à travers le monde

URL has been copied successfully!
URL has been copied successfully!
Partagez:

L’art de la résistance, c’est aussi la résistance par l’art. Dans l’édition du 21 octobre du quotidien britannique, The Guardian, Ahdaf Soueif montre comment l’art palestinien s’est frayé son chemin et a désormais conquis une reconnaissance mondiale.


« L’Art de la Résistance »

Dimanche dernier au Festival de Littérature Palestinienne de Manchester, Salma Khadra Jayyusi s’est dirigée lentement vers un micro dans le grand auditorium. Poète, critique, universitaire et traductrice le professeur Jayyusi, maintenant fragile et un peu difficile à entendre, est la doyenne incontestée des lettres palestiniennes. En 1980 elle a fondé le Projet pour la traduction de la Littérature Arabe (PROTA) et a lancé la compilation et l’édition critique d’anthologies de poésie et fiction arabes, véritables pierres angulaires des littérature palestinienne et arabe en anglais. La semaine dernière elle a lu ses poèmes dans les deux langues et parlé avec passion de la réception mondiale de la littérature palestinienne, citant le chaleureux accueil que le mémoire de Mouri Barghouti, « J’ai vu Rammallah », a reçu : « Le monde ne pourra jamais être notre ennemi » a-t-elle dit, « s’il voit que notre cause est juste ».

Des pamphlets politiques et économiques décrivent le morcellement et la corruption dans les rangs palestiniens, mais le peuple palestinien a répondu à leur position menaçante en devenant plus fort et plus créatif, comme le prouve son mouvement artistique autour du globe. Au cours des derniers douze mois, par exemple, « Paradise now » le film de Hani Abu Assada a obtenu le Golden Globe et a été nominé pour l’Academy Awvard en mars. Réalisée en Palestine, une exposition s’étendant sur trois générations d’artistes palestiniens vivant en Cisjordanie, à Gaza, dans des secteurs d’Israël, de Syrie de Jordanie et aux Etats-Unis a déclenché une tempête à New York, et Sovereign Threads, une collection de broderies, qui a duré de juillet à octobre au Craft Museum de Los Angeles a obtenu des critiques flatteuses.

Les Palestiniens utilisent la technologie pour se contacter les uns les autres dans différents pays et dans le reste du monde : un concert en solidarité avec le Liban en septembre a été « un tremblement de terre » à Ramallah, et la plupart les artistes venaient du Caire, de Paris, New-York, Dubaï et Durban, et le tout, ainsi que des photos du public de Ramallah, a été transmis à la télévision par satellite.

Des organisations palestiniennes comme la « Quattan Foundation » mettent de l’argent dans l’art et l’éducation à l’art. Le « Edward Said National Conservatory »de Ramallah avec « Dar al-Nadwa » de Bethléem et « Yabous Productions « de Jérusalem, ont établi un programme annuel ambitieux de concerts pour les trois villes. Le « Salkakini Cultural Centre » de Ramallah et la « Ma’mal Fondation « d’Art contemporain de Jérusalem envoient chaque semaine des programmes détaillés. Bien qu’ils doivent souvent annuler les spectacles en raison des bouclages israéliens et des couvre-feu, ils les reprogramment tout simplement.

Il existe maintenant un ensemble de travail enthousiaste et grandissant, qui peut se définir comme un art « de la Palestine ». Créé par des Palestiniens et des non Palestiniens, c’est essentiellement un art de résistance. Il existe depuis des décennies dans le monde arabe mais maintenant il vient aussi de l’ouest. On pense au roman graphique de Joe Sacco « Palestine », aux peintures de l’artiste en tags Bansky sur le mur de « sécurité » israélien, et, évidemment, à l’East-West Divan Orchestra, co-fondé par Daniel Barenboïm et le regretté Edward Said. La contribution « Palestine » à la Biennale de Venise il y a quelques années avait pris la forme d’un certain nombre de documents de voyages à taille humaine devant lesquels les spectateurs passaient un par un, immobilisés entre les pavillons des différents Etats. Les documents venaient de différents pays mais leur titulaire était toujours né en Palestine. Par opposition lors de la récente exposition « Mot dans l’Art » du British Museum, on pouvait trouver une installation de poche sur la page ouverte d’un dictionnaire dans lequel un mur de clous noirs emprisonnait et portait le mot « philistine »

Définir toute cette créativité, pourtant, pose encore problème. Avec la meilleure volonté du monde, il semble que les agents artistiques ne puissent échapper à certains pièges pourtant évidents comme cet universitaire qui offre à l’auditoire une parodie de conférence sur sa propre histoire et sa propre ethnicité. Mais lors du festival la semaine dernière Nicholas Blincoe a lu un extrait de ses romans « The Dope Priest » et « Paris Burning » qui tous les deux évoquent des aspects de la situation palestinienne. Sa lecture montrait (si tant est qu’il soit besoin de le montrer) que la fiction peut être intelligente, drôle et inquiète, et garder du cœur et une position morale. Salma Khadra Jayyus et la romancière Liana Badr ont parlé de « juste cause » et « d’identité collective », mais les artistes palestiniens se sont souvent opposés à eux, contre l’idée que leur art soit « engagé ».

A l’ouverture du festival quelqu’un a demandé – comme on peut s’y attendre – quelle fonction la poésie peut avoir dans la vie palestinienne maintenant ? Quelle a été la contribution de la poésie au combat palestinien d’aujourd’hui ? Mourid Barghouti a rappelé que « la poésie n’est pas un fonctionnaire, ni un soldat, et qu’elle n’est le serviteur de personne » ».

Lauréat de Palestine, Mahmoud Darwish a revendiqué le droit d’écrire sur d’autres sujets que la Palestine. Mais il a aussi soulevé des questions sur le rôle du poète en temps de crise, un temps où il doit se détacher de son moi intime pour ose recentrer sur le monde. Barghouti, Darwish et d’autres artistes palestiniens se sont engagés de façon créative dans les revendications d’une communauté et de sa cause, en les assimilant tout en les repoussant.

Dans la dernière édition du magazine littéraire Palestinien, Al Karmel, le « Carnet » de Darwish (répondant aux bombardements israéliens sur le Liban) prend la forme de 15 petites pièces de prose et de poésie. La cinquième pièce met le soi et le monde en balance :

« De la fumée monte de moi, je tends une main pour retenir mes membres éparpillés de tant de corps, assailli d’une terre, d’un ciel, d’une mer, et d’une langue. Le dernier avion a décollé de l’aéroport de Beyrouth et m’a laissé face à l’écran pour regarder/ avec des millions de spectateurs/ les restes de ma mort/. Quant à mon cœur/ je vois qu’il roule, comme une pomme de temps, du Mont Liban jusqu’à Gaza. »

Ahdaf Soueif

http://www.guardian.co.uk/israel/comment/0,,1927420,00.html

Traduit par Carole Sandrel pour CAPJPO-EuroPalestine

CAPJPO-EuroPalestine

Partagez: