Ivres de leur victoire sur les armées de trois pays arabes en juin 1967, les dirigeants israéliens claironnent, en ces temps-là, que « les Palestiniens, cela n’existe pas », ou bien, comme le dit la future chef de gouvernement Golda Meïr, « les Palestiniens, c’est nous les Juifs ».
Mais le 21 mars 1968, le raid punitif qu’ils ont décidé contre le village de Karameh, en territoire jordanien, et qui se promet d’être une petite tuerie de routine, tourne mal : pour la première fois, l’invincible « Tsahal » se heurte à une résistance palestinienne organisée, forte de 250 combattants du Fath.
La majorité de ces jeunes Palestiniens, dont des dizaines d’étudiants rapatriés en urgence de l’étranger pour participer au combat, tomberont dans la bataille. Mais l’armée israélienne finit par se retirer, laissant sur le terrain des chars et des transports de troupes, et emportant les corps de 28 de ses soldats.
Les petites organisations palestiniennes, qui vivaient jusque là exclusivement dans l’orbite de différents gouvernements arabes, se sont paradoxalement émancipées grâce à la défaite militaire. Dès le mois de juin 1967, le Fath, qui sera pendant des décennies l’organisation dominante au sein de la résistance, informe ses militants que sa direction combat à l’intérieur des territoires occupés : ce qui est exact, Yasser Arafat se trouvant à Naplouse et Jérusalem, tandis qu’un autre dirigeant, Mahmoud Maswâda, essaie d’organiser la résistance à Hébron. Les quelques actions armées lancées depuis les territoires occupés sont dérisoires, et la répression israélienne, en Cisjordanie et plus encore dans la bande de Gaza, d’une redoutable efficacité. Au demeurant, les Israéliens se sont emparés, lors de la conquête des territoires, des fichiers de militants palestiniens établis par les polices égyptienne (pour la bande de Gaza) et jordanienne (Jérusalem et Cisjordanie), ce qui facilite la traque.
Il n’empêche. Pour la première fois depuis la grande révolte de 1936-1939, réprimée sauvagement par le colonisateur britannique, le mouvement national palestinien retrouve, aux lendemains de la guerre de 67, une forme organisée.
par CAPJPO-EuroPalestine
ENGLISH TEXT—————————
1968
“The Palestinians? Who’s that?
Intoxicated from their armed victory over three Arab countries in June of 1967, the Israeli leaders trumpeted that “the Palestinians don’t exist” or as the future head of government Golda Meir proclaimed, “we Jews are the Palestinians”.
But Palestinians would concretely define their existence. On March 21 1968, Israel embarked on a punitive raid against the village of Karameh, in Jordanian territory, and from the Israeli army perspective, what was expected to be just another routine slaughter went wrong. For the first time, the invincible “Tsahal” went up against a fierce and organized Palestinian resistance of 250 Fath combatants.
The majority of these young Palestinians were killed in battle, including dozens of students who made an emergency return from their schools abroad to participate in the combat. But the Israeli army was forced to withdraw, leaving behind tanks and troop transport vehicles and carrying the dead bodies of 28 of their soldiers.
Numerous small Palestinian organizations, which existed until this moment exclusively in the orbits of various Arab governments, were paradoxically emancipated thanks to the 1967 military defeat. As of June 1967, the Fath, which was to become the dominant resistance organization for decades, informed its militants that its leadership would be fighting from within the occupied territories. With this change, Yasser Arafat was located in Naplouse and Jerusalem while another leader, Mahmoud Maswada, attempted to organize the resistance in Hebron. Those few armed actions launched from the occupied territories were ineffective. Israeli repression on the West Bank and even more in the Gaza Strip was formidably effective. Incidentally, as loot from their 1967 territorial conquest, the Israelis seized files on established Palestinian militants, from Egyptian police stations in Gaza and from Jordanian police stations in Jerusalem and the West Bank. These files made it easier for the Israelis to track down Palestinian activists.
All the same, for the first time since the great revolt of 1936-39, which was savagely squelched by the British colonial regime, the national Palestinian movement was able to regroup into a defined organization in the aftermath of the 1967 war.
By CAPJPO-EuroPalestine