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Comment Israël expulse quotidiennement des Palestiniens de Jérusalem

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Merci à Carole Sandrel pour sa traduction du témoignage de Mona, qui décrit ce qu’elle subit, ainsi que sa famille, en tant que Palestinienne de Jérusalem.


Message de Mona

Chers Amis, chère Famille,

Je vous écris pour partager (avec vous) un peu ce qui se passe dans ma vie ces derniers temps. Comme la plupart d’entre vous le savent, je suis à Jérusalem depuis le 18 mars avec Ramzi qui à ce moment là venait d’avoir cinq mois. Nous avons laissé Habib et fait le sacrifice de nous séparer pendant les 4 mois à venir pour pouvoir préserver mes papiers d’identité de Jerusalem et garder mon statut de résidente. Je sais que ça peut paraître étrange, mais un Palestinien qui a vécu toute sa vie à Jerusalem, en dépit même du fait que ma famille vit à Jérusalem et en Palestine depuis des siècles, selon la loi israélienne, les Palestiniens vivant à Jerusalem ne sont que résidents mais pas nécessairement des résidents permanents, et dès lors ils risquent tout le temps de perdre leur droit à résidence.

Pendant ces 3 dernières années, je me suis mariée avec Habib, palestinien de sang mais de citoyenneté américaine, parce que le droit à résidence d’Habib à Jérusalem a été annulé en 2004 – bien qu’Habib soit né à Jérusalem, et y ait vécu jusqu’à l’âge adulte. De toute façon, maintenant c’est à mon tour de renouveler mon visa pour « Israël » (oui, j’ai besoin d’un visa dans mon propre pays) – J’ai vu un avocat qui m’aide à renouveler mon visa d’entrée, ce qui devrait préserver mon droit de séjour (pour un maximum de trois ans), mais cette fois les Israéliens m’en ont refusé le renouvellement et m’ont dit que, puisque j’avais pris la décision d’épouser un « Américain », qui ne peut résider à Jérusalem, j’avais décidé de trouver une résidence dans un pays étranger, en « choisissant » par là même d’abandonner mes droits à résidence à Jerusalem. (Les Palestiniens n’ont pas le droit de dsiposer d’une double résidence ou d’une double nationalité.)

Pour faire court, j’ai perdu mon droit à résidence dans mon propre pays !!! Je ne peux qu’y revenir en visiteuse, comme une touriste et dois obtenir un visa de tourisme auprès de l’ambassade israélienne !! L’ironie de la chose, c’est que toute ma famille vit toujours ici. Mais je ne peux jamais les retrouver. Nous, le peuple de cette terre, nous sommes jetés dehors.

Sur le chemin du retour, en revenant du bureau de l’avocat, j’ai été arrêtée par des soldats israéliens qui ont demandé à voir mes papiers – ils parlaient russe – et j’ai pensé en moi-même, ces immigrants ne connaissent rien de cette terre qu’ils servent et protègent – ils ne connaissent même pas la langue. Ils viennent de Russie, d’Europe, d’Afrique, des Etats-Unis et d’ailleurs et choisissent de résider dans mon pays – et ils le peuvent ! Il n’y a pas que ça, car ils peuvent limiter mes déplacements dans mon propre pays et même m’en sortir à coups de pied aux fesses ! Quand je me suis plainte à mon avocat de cette injustice il a simplement répondu : « Mona, c’est une occupation ». Je ne cherchais pas du tout une réponse juridique – ici il n’y a pas de loi humaine qui peut me protéger, ou préserver mes droits. Inutile de dire que j’ai perdu mon droit au retour, mon droit à mon pays… au seul pays auquel j’ai jamais appartenu, le seul endroit que j’ai jamais appelé mon foyer.

En tant qu’adulte qui vit sous occupation depuis trente trois ans, j’étais bouleversée mais je ne peux pas dire que j’étais surprise de ce qui m’arrivait. Mais ce qui m’a étonnée c’est ce qui se passe pour Ramzi mon bébé de 7 mois. Ramzi est né aux Etats-Unis et par conséquent il a un passeport américain. Bien qu’il soit le fils de deux Palestiniens nés en Palestine, qui appellent Jerusalem et la Palestine leur foyer, on lui dénie le droit de résider à Jerusalem et on lui a octroyé un visa touriste. J’ai demandé à la dame de l’aéroport quand nous sommes arrivés la première fois si elle pouvait donner à Ramzi (qui avait alors 5 mois) un visa de 4 mois au lieu du traditionnel visa de trois mois, je lui ai montré ma carte de résidente (à l’époque j’étais encore considérée comme résidente) et lui ai montré nos billets de retour. Elle a dit non, et dit que je devrais demander une extension (de séjour) pour Ramzi au ministre de l’intérieur. Pour éviter un conflit et pour me rendre la vie plus facile j’ai demandé à l’avocat de demander une extension pour Ramzi… à ma grande surprise, cette autorisation a été refusée à Ramzi. Le gouvernement a refusé de donner une extension de visa à un bébé de 7 mois, même avec l’aide de notre avocat et de toutes ses relations !

Alors maintenant je suis acculée au choix suivant : partir avec Ramzi d’abord et changer nos projets de vacances, ou rester avec Ramzi ici, comme prévu, jusqu’au 25 juillet, avec mon bébé de 7 mois dont le séjour se prolongerait illégalement sur la terre de ses ancêtres. Ironie du sort c’est que ce pauvre petit bébé qui ne peut même pas dire (encore) « maman » ou « papa », représente une menace pour la sécurité d’Israël qui lui refuse un mois de plus sur son visa !

Alors maintenant ma petite famille de trois personnes s’est ajoutée aux millions de Palestiniens qui ont perdu leur droit de résidence dans leur propre pays et sont chassés à coups de pied de leurs maisons. Nous sommes maintenant des résidents de Las Vegas, mais je me référerai toujours à la Palestine, mon pays. Depuis 1948, la diaspora de notre peuple, les palestiniens du monde attendent une solution juste qui leur donnerait le droit de retourner dans leur patrie, mais soixante ans plus tard la liste s’allonge tous les jours de gens qui, exactement comme nous trois, ont été expulsés de notre pays. Je n’abandonnerai jamais l’espoir d’avoir, un jour, le choix de vivre en Palestine et je ferai en sorte que Ramzi aussi sache qu’il a le droit au retour. »

Mona

Lettre transmise par Mazin Qumsiyeh wheelsofjustice@lists.riseup.net

(Traduit par Carole SANDREL)

CAPJPO-EuroPalestine

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