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La Palestine étranglée (compte-rendu de mission en Cisjordanie)

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Edouard et Marie-Paule Devillers, militants d’Evry-Palestine et d’EuroPalestine, viennent de rentrer de Palestine occupée, où ils participaient à une mission de l’association « Pour Jérusalem », aux côtés de parlementaires, élus locaux, hauts fonctionnaires et anciens diplomates. Ils racontent.


« Le processus de colonisation avance à grande vitesse, et répond au plan d’ensemble pensé, rédigé et planifié depuis 1978 par Sharon. Il se poursuit en toute impunité, et ce n’est certainement pas l’écran de fumée d’Annapolis qui l’a arrêté. La preuve : de janvier 2007 à octobre 2007, c’est-à-dire au cours de l’année précédant la conférence d’Annapolis, 137 unités de construction de logements ont été décidées par Israël. Mais de novembre 2007 à novembre 2008, donc au cours de l’année qui a suivi cette pseudo « Conférence de Paix », il y en a eu 2.210 !

Maale Adunim, la ‘ville nouvelle’ de colonisation a actuellement 35.000 habitants, ou en tout cas de quoi loger 35.000 colons. Mais l’objectif israélien est d’atteindre rapidement 150.000 habitants. S’étendant d’ouest en est, Maale Adunim a pour but de créer une séparation complète entre le nord et le sud de la Cisjordanie. Toutes les colonies sont reliées entre elles, permettant à tout Israélien de se rendre de la Méditerranée au Jourdain sans voir un seul Palestinien.

La construction du mur avec toutes les conséquences humaines, sociales et économiques que nous connaissons, se poursuit.

Le nombre de barrages (check-points) fixes et mobiles a augmenté. Les Israéliens en suppriment quelques uns à grand renfort de publicité, mais ils en installent d’autres ailleurs. A noter, à propos du mur et des check-points, qu’Israël fait actuellement les yeux doux aux touristes et pélerins, leur facilitant les passages (sauf pour Gaza, bien évidemment). C’est à peine si les voyageurs ont le temps d’apercevoir le mur et les soldats. En huit jours, nous n’avons pas eu à sortir une seule fois nos passeports.

Le tramway, ‘la honte de la France’ nous ont dit nos interlocuteurs palestiniens, se construit rapidement. Les rails sont posés dans certains endroits. Il doit être inauguré en 2009, et reliera une dizaine de colonies en territoire palestinien occupé. Le tramway ne devrait pas pouvoir être utilisé par les Arabes.

Lors de la construction du tramway, des sites archéologiques sont mis au jour. Or, il faut le souligner, et cela nous a été confirmé par des archéologues français et palestiniens, Israël impose son monopole sur la recherche archéologique, à des fins de propagande biblique essentiellement. Cela est bien sûr contraire au droit international en la matière. Les professeurs d’archéologie et leurs élèves de l’Université Al-Qods (Jérusalem-Est), pas plus que les pères dominicains, ne peuvent actuellement se rendre sur les terrains de fouilles.

La destruction de cimetières musulmans est aussi un exemple de la volonté de main mise d’Israël sur le passé.

La commémoration de l’anniversaire de la mort de Yasser Arafat, à la Moukhataa de Ramallah, le 11 novembre, a eu lieu en présence de nombreux jeunes. Le discours de Mahmoud Abbas nous a laissés perplexes. Alors que dans la première partie de son allocution, il proclamait sa volonté d’être le président de tous les Palesitniens, il a ensuite vitupéré pendant une demi-heure contre le Hamas. Le préfet de Hébron, rencontré quelques jours plus tard, fidèle ‘voix de son maître’, reprend devant nous la même diatribe, ajoutant que le Hamas n’était qu’une simple association caritative (un équivalent d’association loi 1901, en somme), incapable de gérer un Etat ! Nous avons la désagréable impression, au cours de ces échanges, que nos interlocuteurs tapent plus volontiers sur le Hamas que sur Israël.

Aux universités de Bir Zeit et Al-Qods, les étudiants et leurs enseignants sont lourdement gênés dans leurs déplacements par le mur et les barrages. Avec la transformation du territoire en une série d’enclaves, et les restrictions très sévères à tout voyage à l’étranger, on assiste à une véritable cantonisation des universités. Seuls les jeunes de Jérusalem-Est peuvent aller tant bien que mal à Bir-Zeit, près de Ramallah, mais l’inverse est strictement impossible. Ce qui est la négation même de la vie universitaire.

A noter aussi qu’Israël refuse de reconnaître aux Palestiniens de Jérusalem la validation des diplômes obtenus dans les universités palestiniennes, d’où l’impossibilité pour des médecins et des pharmaciens d’exercer leur métier.

Durant notre séjour, profitant de la focalisation des médias sur l’élection américaine, l’armée a détruit plusieurs maisons de Jérusalem-Est. La destruction de 115 maisons à Jérusalem est prévue, de manière imminente. Par ailleurs le ministère israélien de l’Intérieur a fait fermer le théâtre de Jérusalem-Est, ce qui augure mal du projet de l’UNESCO de faire, en 2009, Jérusalem capitale culturelle du monde arabe.

Nos compagnons de voyage ont été révoltés par la situation qu’ils ont vue. Celle-ci se détériore de jour en jour, rendant improbable la création d’un Etat palestinien un tant soit peu viable. Ils sont surtout révoltés par l’absence de réactions, en France, de la classe politique.

La préoccupation immédiate, et c’est prioritaire, c’est que le Fatah et le Hamas arrivent à trouver un compromis. A entendre les représentants de l’Autorité Palestinienne que nous avons rencontrés, ils n’ont pas l’intention d’en prendre le chemin. Le prochain différend portera notamment sur la date des élections présidentielles : janvier 2009 si le calendrier de la loi et respecté, mais Mahmoud Abbas voudrait un report à janvier 2010, lui permettant de conserver encore un an la présidence sans passer par les urnes.  »

Marie-Paule et Edouard DEVILLERS

CAPJPO-EuroPalestine

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