Ci-dessous une lettre de remerciement d’Emad Bornat* qui est l’un des pionniers de la lutte contre le Mur de l’annexion à Bi’lin. Grâce à vos dons, CAPJPO-EuroPalestine vient de faire parvenir à ce caméraman palestinien 2000 euros pour contribuer à payer ses frais d’hôpitaux après une grave opération liée à une blessure pendant qu’il filmait une manifestation.
« Je remercie infiniment l’association CAPJPO-EuroPalestine qui grâce à sa générosité me donnera la possibilité d’être opéré de l’abdomen, opération qui avait été reportée temporairement pour raisons médicales. Il y a un peu plus d’un an j’ai été gravement blessé dans un accident : j’ai été touché de plein fouet par un tracteur alors que j’étais en train de filmer les constructions dans la colonie Modi’in Illit qui s’élève à ce jour sur la terre de Bil’in. Au moment de ma blessure j’étais dans un état grave mais après 50 jours d’hôpital et après des soins intensifs je me suis remis. Mais maintenant, au bout d’un an je dois subir une autre intervention pour obturer l’abdomen. L’Autorité palestinienne, ne voulant pas payer ces dépenses, j’ai encore besoin d’aide pour terminer les soins qui restent à faire et pour subvenir aux besoins de ma famille à mon retour et continuer à participer à la cause non-violente contre le mur d’annexion et contre les colonies. Mon objectif est de finir le nouveau film que je projette en dépit de 5 caméras détruites par les colons et par l’armée israélienne. »
Emad Bornat
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Le Résistance contre le Mur à travers les caméras d’Imad Burnat, combattant modèle :
un mur qui menace la vie
Imad Mohammed Yassin Burnat, 36 ans, originaire du village de Bil’in et père de quatre enfants, a rejoint le Comité Populaire contre le mur à Bil’in dès le moment où les bulldozers israéliens ont commencé à détruire les terres de Bil’in. Il a été la première personne blessée par l’armée israélienne dans le cadre de la résistance. Il a été choisi parmi ses camarades pour être le vidéaste du Comité Populaire et de cette façon pouvoir suivre de près les opérations et apporter toute l’information sur la violence, la brutalité et la répression exercées par les soldats.
Lors de la première année du Mur à Bil’in, l’armée israélienne a essayé plusieurs méthodes pour dissuader les manifestants de poursuivre leur résistance. Cela allait des intrusions nocturnes dans le village, à l’assaut contre les maisons de combattants, au tir de grenades assourdissantes et à l’extorsion des jeunes de leurs maisons une fois baillonnés. Les soldats pratiquaient la torture, l’humiliation et parfois même les mettaient sous arrêt. Imad, ses camarades et un groupe de militants internationaux qui habitaient dans le village commencèrent à faire connaître les activités des soldats dans l’intention de les poursuivre en justice. Cela donna du courage aux habitants du village, augmenta leur envie de les défier, de s’opposer à eux et leur permit d’oublier leur peur. Cela eut aussi pour conséquence d’atténuer la violence des soldats qui craignirent des poursuites judiciaires.
Imad a pris part à toutes les manifestations avec sa caméra dans le but de montrer toutes les violations faites par les soldats contre les protestataires. Jour et nuit, il usait de son énergie et de sa créativité, il accueillait constamment des invités et des délégations. Il avait coutume de dire « mes amis, n’ayez pas peur, cette caméra est votre protection et tout ce que vous faites est montré en détail ».
Imad s’est servi de sa caméra pour témoigner dans de nombreux procès qui ont eu lieu dans les tribunaux israéliens. Beaucoup de villageois furent arrêtés durant leur manifestation et comme d’habitude, ce que racontaient les soldats israéliens était pris pour argent comptant, mais les vidéos prises par Imad et ses compagnons ont prouvé la nature mensongère des propos israéliens. Les manifestants étaient la plupart du temps accusés d’avoir jeté des pierres, d’avoir agressé les soldats ou d’avoir intenté de prendre l’arme d’un soldat. Les soldats faisaient leurs déclaration au tribunal, mais le film montrait souvent le contraire et mettait les soldats dans l’embarras. Certains israéliens durent admettre que certains de leurs officiers les avaient forcés à faire un faux témoignage. D’autre part, il y avait beaucoup de manifestants qui avaient été blessés sans que cela représentât une menace pour ces soldats; les vidéos d’Imad étaient donc là pour poursuivre ces soldats en justice. Les soldats israéliens étaient conscients des risques que les caméras leur posaient depuis le début de la résistance populaire de Bil’in contre le mur. Il n’y avait jamais d’incursion dans le village sans que les caméras soient prêtes à témoigner. Imad représentait une cible et avait été blessé des douzaines de fois, mais il était décidé à continuer la lutte en filmant, ce qui obligea les soldats israéliens à trouver d’autres moyens.
En octobre 2006, alors qu’il faisait un reportage sur une incursion israélienne dans le village, il fut arrêté et condamné à un mois de prison, plus deux mois d’arrêt domiciliaire en dehors de Bil’in. Quand il en sortit, il reprit de nouveau le chemin de la résistance.
Il y a un an, un des soldats lança sur lui une balle d’acier entourée de caoutchouc qui brisa sa caméra. Cette balle se trouve encore dans la lentille de sa caméra, un témoignage qui montre que la presse et les journalistes sont ciblés.
Imad prenit fréquemment la relève dans l’avant-poste destiné à protéger et à conserver les terres derrière le mur. Il venait là tôt le matin, observant les violations commises par les colons et encourageant les fermiers à aller travailler sur leur terre.
Le premier janvier de cette année, un groupe de colons fit rentrer des mobile-homes sur les terres de Bil’in, et à ce moment-là plusieurs jeunes gens du village s’avancèrent pour se confronter avec les colons. Cette action était suivie par Imad avec sa caméra. Le groupe arriva sur place à la nuit tombée et Imad se mit en position et commença à filmer ce qui se passait. Puis un certain nombre de colons attaquèrent Imad et ses compagnons et les ruèrent de coups. On les transféra immédiatement à l’hôpital pour les soigner. En réponse au travail courageux qu’ils avaient fourni lui et ses camarades, sa caméra fut brisée.
Imad fut nominé, avec d’autres membres du Comité populaire contre le Mur pour recevoir le prix Carl von Oostaizhaki. C’est un prix qui devait lui être attribué par l’Assemblée Mondiale des Droits Humains en Allemagne le 17 décembre 2008. Il allait être récompensé pour son rôle dans la défense des droits humains et avait obtenu un visa à cet effet. Il était impatient et attendait anxieusement ce voyage mais il n’a toujours pas été autorisé à partir.
(Traduit par Annie & Pedro pour CAPJPO-Europalestine)
CAPJPO-Europalestine