Mireille Delamarre reprend sur le site PlaneteNonViolence l’article intitulé « Mon minaret est plus grand que le tien » du journaliste Pepe Escobar, qui analyse l »’ingérence de la dictature saoudienne dans les affaires intérieures de la Syrie, de la région en général et le développement d’une politique de répression de type fasciste en interne sans que la « communauté internationale » accro aux pétrodollars n’y trouve à redire. »
Intervention militaire de l’Arabie Saoudite au Bahreïn 2011
« Mon minaret est plus grand que le tien
Londres brûle. Wall Street brûle. Les marchés mondiaux sont entrain de brûler. Tandis que Rome brûle, la Maison des Saoud magouille – rêves d’étendre la torture et de construire un minaret monstre en critiquant la Syrie parce qu’elle réprime son propre peuple. La «communauté internationale» émet tout juste un piaulement ; quand vous êtes une dynastie de famille médiévale assise sur un océan de pétrole vous pouvez pratiquement faire tout ce que vous voulez.
La déclaration du roi saoudien Abdullah malade demandant la fin du bain de sang en Syrie a déjà été enregistrée dans les annales de l’hypocrisie du 21ème siècle. Le discours du roi se référant à la gouvernance de Bashar Al Assad met l’accent sur le fait que « soit il choisit la sagesse de sa propre volonté ou bien plonge dans les profondeurs du chaos et de la déperdition. » Le roi appelle aussi à des «réformes rapides et raisonnables» pour répondre aux protestations qui ont couté la vie à plus de 1600 personnes.
Même Monty Python à son apogée n’a pas trouvé un sketch tel celui du méga prêche de la Maison des Saoud donnant des leçons de démocratie à des Arabes méfiants.
C’est un régime qui a offert l’asile au dictateur tunisien déchu, Zine el -Abidine Ben Ali ; était furieux contre l’administration de Barack Obama quand elle a abandonné le dictateur égyptien Hosni Moubarak, a envahi le Bahreïn lors d’une crise néo impérialiste en invoquant l’accord militaire glauque du Conseil de Coopération du Golfe ( GCC) pour sauver la dynastie al-Khalifa des manifestants pro démocratie, a empêché des manifestations pro démocratie en Arabie Saoudite même, invité deux autres monarchies pauvres dépourvues de pétrole, la Jordanie et la Maroc, à faire partie du GCC ; a mené une contre révolution incessante pour détruire toute possibilité de Printemps Arabe dans le Golfe et s’active à choisir le prochain dirigeant du Yemen – imposant un « plan de transition » conçu par le GCC et qui n’a rien à voir avec les souhaits des manifestants yéménites pro démocratie.
Tout en prêchant des « réformes « à la Syrie, le mot « réforme « en Arabie Saoudite même cela veut dire que le roi distribue des dizaines de milliards de dollars pour acheter toute velléité même d’opposition. De plus, la Maison des Saoud méprise la simple possibilité d’une démocratie en Syrie. Ce qu’elle veut vraiment – avec insistance- c’est que les Sunnites monopolisent le pouvoir en Syrie de préférence via les Frères Musulmans, au détriment des Allawites de Syrie liés à Assad et des Shi’ites d’Iran.
Damas sous Assad est un proche allié de Téhéran. Bien que ce soit un état policier la Syrie est une République séculière. La Maison des Saoud méprise les républiques arabes séculières – de la Syrie d’Assad à la Libye de Moummar Kadhafi. Pas étonnant que la Maison des Saoud – de même que le Koweït et les EAU – aient financé le courant le plus important des Frères Musulmans de l’opposition syrienne de même que des éléments salafistes louches.
Le fond de l’affaire c’est que le roi Abdullah – suivi des minions du GCC, également connu sous le nom de Club Contre Révolutionnaire du Golfe, et de la Ligue Arabe impuissante – a déjà positionné les riches monarchies du Golfe pour une Syrie post Assad sous contrôle sunnite.
Atteindre les étoiles
Pendant ce temps là à Jeddah – allant à l’encontre de toute justification économique et écologique – une tour de 23 milliards de $ de plus d’un kilomètre de hauteur sera construite pour célébrer la suprématie saoudienne. Incroyable : les constructeurs ne seront autres que le Groupe Ben Laden. Le cadavre d’ Osama doit donner des coups de pieds dans sa tombe dans la mer d’Arabie.
Le cerveau de ce projet c’est le Prince Alwaleed bin Talal, un neveu du roi Abdallah, le 19ème homme le plus riche du monde, et l’homme d’affaires arabe le plus riche, qui entre autre possède d’ importantes actions dans la News corporation de Rupert Murdoch, Citigroup et Apple.
La tour dont le design s’inspire d’une plante du désert sera la plus haute du monde – plus haute de 172 m que la tour Burj Khalifa de Dubaï construite en 2009. On peur discuter si ce minaret monstre saoudien reflète le culte d’Allah ou l’adoration de la richesse pétrolière et des marchés financiers.
Actuellement toutes les tours les plus hautes du monde se trouvent en Asie ou dans le Golfe. La Burj Khalifa, 828 m de haut, suivie de la tour de Canton à Guangzhou (600 m), Taipei 101 à Taipei (508 m), le Shanghai World Financial Center (492 m) et l’IFC à Hong Kong (484 m). Il y a longtemps que les tours Jumelles de Petronas à Kuala Lumpur (410 m) sont dépassées.
Torture dans la Maison
En fait l’intérêt de la construction de cette tour de la Maison des Saoud c’est ce que cela cache en terme de criminalisation de toute possibilité de contestation dans le royaume. La nouvelle législation « anti terroriste » qui doit encore être votée va condamner à au moins 10 ans de prison quiconque doute de l’intégrité du roi ou du prince royal.
Le ministère de l’intérieur – dirigé par le sinistre Prince Nayef – aura pratiquement des pouvoirs illimités. La torture – déjà pratiquée – sera quasiment officialisée. La détention et l’isolement – avec aucun accès à des avocats- sera étendue à 120 jours ou indéfiniment selon le jugement d’un tribunal spécial sous les chefs d’inculpation allant de « mettre en danger… l’unité nationale » à «salir la réputation de l’état ». Les décapitations – souvent réservées aux travailleurs asiatiques – vont se multiplier.
La faute à la paranoïa de la Maison des Saoud face au Printemps Arabe, l’émergence d’un Irak dominé par les Shi’ites ; la résilience de la République Islamique d’Iran, et l’indéfectible perception à Ryad d’une conspiration Shi’ite organisée par Téhéran pour écraser les monarchies du GCC.
Donc c’est ce qui passe pour des « réformes « en Arabie Saoudite ; une version arabe de « ou vous êtes avec nous ou contre nous ». Les cyniques trinquerons à la fraternité entre l’Arabie Saoudite et le Texas occidental adoré par Georges W. Bush. Amnesty International prévoit malheureusement des violations importantes des droits de l’homme. La Maison des Saoud, subjuguée par la contemplation torture – et – minarets, les ignorera solennellement toutes. »
Pepe Escobar – 11/08/2011
Pepe Escobar est l’auteur de Globalistan: How the Globalized World is Dissolving into Liquid War (Nimble Books, 2007) de Red Zone Blues: a snapshot of Baghdad during the surge. Son nouveau livre Obama does Globalistan vient tout juste d’être publié (Nimble Books, 2009).
Email : pepeasia@yahoo.com
Source : http://www.planetenonviolence.org/La-Dictature-Monarchique-De-L-Arabie-Saoudite-Donne-A-La-Syrie-Des-Lecons-De-Democratie-_a2470.html?preaction=nl&id=2053747&idnl=95217&
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