Lynn Gottlieb, première femme rabbin et militante pour les droits des Palestiniens, qui a participé avec nous à la Marche pour Gaza et qui viendra en Palestine à partir des Etats-Unis, en avril prochain, dénonce l’hypocrisie israélienne qui consiste à pointer les ultra-orthodoxes ségrégationnistes et les colons les plus fanatiques comme les seuls coupables de violence et d’apartheid en Israël. En réalité, souligne-t-elle, la violence et le racisme, sont institutionnalisés à l’encontre du peuple palestinien, en butte à l’occupation et la colonisation. Et ceci en toute impunité.
« Les crimes et les comportements sexistes et/ou racistes dont se rendent coupables les « ultra-orthodoxes anti-sionistes et les colons sionistes extrémistes » ne sont qu’un aspect de la violence structurelle qui définit la relation d’Israël avec les Palestiniens. L’état d’Israël et ses diverses institutions civiles et gouvernementales recourent les uns et les autres à des formes de violence directe ou indirecte pour expulser les Palestiniens, confisquer leurs terres, les incarcérer illégalement, leur refuser l’accès à l’eau, à leurs moyens de subsistance, à leurs sanctuaires et à leurs familles.
Tandis que la violence des colons ne cesse de s’intensifier, elle est, comme nous le savons tous, perpétrée en toute impunité dès lors que ni l’armée ni la police israéliennes ne s’impliquent dans la protection des droits humains des Palestiniens. Cinq cents maisons palestiniennes ont été détruites en 2011. Plus de deux cents enfants ont été arrêtés et emprisonnés pour « avoir lancé des pierres ». Des milliers de soldats refusent à des Palestiniens de tous les secteurs de la société civile le droit de circuler librement sur les routes. La violence des colons et celle de l’état vont main dans la main.
La violence des colons ne serait pas possible sans la coopération implicite de l’état. A maintes reprises, le soutien de l’état israélien à la violence des colons est patente, comme on le voit dans sa pratique d’envoyer des adolescents israéliens enlever le mobilier de maisons palestiniennes détruites dans le Neguev.
En désignant comme coupable la version la plus extrémiste de l’orthodoxie, nous échouons à comprendre l’enjeu structurel majeur de la violence systématisée que symbolise le mot « Occupation ». Les attitudes, les croyances et les comportements qui déshumanisent les « Arabes » par le biais d’un recours inlassable aux stéréotypes, ajoutés à l’occupation militaire, ont un effet délétère sur toute la société.
C’est ainsi que des participants aux voyages en Israël organisés par l’association juive Birthright Israël (Israël par droit de naissance), font fréquemment mention de propos haineux contre les Palestiniens tenus au cours des excursions par leurs guides ou quelquefois par des jeunes de l’armée qui les accompagnent.
Prendre la parole est important sur le plan symbolique. Je crois cependant qu’il en faut davantage. Quelles actions entreprenons-nous pour faire pression sur Israël afin que cessent les confiscations de terres palestiniennes, les détentions administratives abusives, les barrages de contrôle, l’expansion continue des colonies et le siège abominable de Gaza, qui semble n’avoir pas de fin ?
Notre indignation face à tant de violations des droits de l’homme devrait être ample et profonde. Nous ne pouvons nous contenter de condamner seulement un secteur de la société sans mettre en évidence sa relation au tout. Pointer du doigt ces crimes particuliers sans faire référence au contexte a pour effet d’occulter le système de violence dans lequel ces actes ont leurs racines.
Vous connaissez sans doute l’histoire de celui qui voit un homme en train de se noyer en descendant le cours de la rivière, et qui le tire de l’eau. D’autres corps continuent à arriver, et il continue à essayer de les sauver les uns après les autres. Pourtant, il finit par se rendre compte que les sauveteurs, ne mettront fin à cette horreur que lorsqu’ils empêcheront que ces personnes soient jetées à l’eau.
Merci pour votre courage et pour votre détermination à vous mobiliser pour défendre les droits de l’homme. »
Lynn GOTTLIEB
(Traduit de l’anglais par Anne-Marie PERRIN pour CAPJPO-EuroPalestine)
CAPJPO-EuroPalestine
