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Intervention d’Olivia Zémor devant le tribunal de Bobigny

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Pour toutes celles et tous ceux qui ne peuvent assister aux procès BDS (qui se suivent actuellement à raison d’un par semaine en région parisienne). Ci-dessous l’intervention d’Olivia Zémor devant le tribunal de Bobigny, jeudi 15 mars. Les trois avocats de la défense, ainsi que les témoins ont développé bien d’autres arguments encore. Nous y reviendrons, de même que sur les mensonges et inventions des parties civiles.


Madame la Présidente,

J’aimerais dire en préambule que je suis bien consciente des limites de l’indépendance de la justice en France, puisque que des magistrats reçoivent leurs ordres du gouvernement, qui les reçoit du lobby israélien, lequel vous demande de condamner uniquement les personnes qui boycottent Israël, toutes les autres, n’étant absolument pas inquiétées.

Pourquoi le gouvernement ne poursuit-il pas M. Bernard Henri Lévy qui appelle au boycott de la Chine et à celui de la Corse, ou encore Mmes Alliot-Marie et Aubry qui appellent au boycott du Mexique, (la maire de Lille ayant été jusqu’à interdire et faire annuler les manifestations culturelles en l’honneur du Mexique dans sa ville en 2011) ?

Il y a toutefois des juges et même des magistrats représentant le Parquet pour s’en remettre à la loi, au bon sens et à leur conscience, et je tiens à leur rendre hommage.

Je parle de loi, car il est clair que la loi du 29 juillet 1881 (alinea 8), sur laquelle le gouvernement et les parties civiles s’appuient pour nous poursuivre, a pour vocation de protéger les personnes contre des discriminations, et non de protéger un Etat, l’Etat d’Israël.

Vous savez pertinemment que nous ne nous attaquons pas à des personnes physiques et encore moins « à raison de leur nationalité ».

Non seulement les poivrons et les clémentines que l’on voit dans les vidéos incriminées, ne sont pas des « personnes » ou « des groupes de personnes », mais vous seriez bien incapables de nous dire au demeurant par qui ils ont été produits (des Israéliens ? Juifs ? Arabes ? des travailleurs immigrés, des Palestiniens obligés de travailler sur leurs terres volées en Cisjordanie, puis exportées par Israël ?)

Et vous devez également savoir qu’outre les produits exportés par Israël, la campagne internationale BDS, lancée par la société civile palestinienne, à laquelle nous participons, appelle également au boycott de produits et de firmes qui ne sont pas israéliennes.

Telles L’Oréal que vous voyez dans la vidéo d’Aulnay, ou encore Veolia ou Dexia dont vous trouverez les vidéos de boycott sur notre site, et qui sont des firmes françaises et non israéliennes:
– Véolia, multinationale qui s’est engagée dans l’exploitation d’un tramway colonial qui relie Jérusalem aux colonies en Cisjordanie, et qui ramasse les ordures des colons pour les déverser sur des terrains Palestiniens
– Dexia, banque franco-belge, parce qu’elle participe au financement des colonies israéliennes.

Nous avons également appelé au boycott de l’Egypte de Moubarak, qui participait au blocus de la bande de Gaza. Nous avons clairement appelé sur notre site europalestine à ne pas aller faire du tourisme dans ce pays tant que son gouvernement contribuerait à affamer la population gazaouie.

Mais cet appel au boycott de l’Egypte ne semble pas avoir ému le ministère de la justice ? N’y avait-il pas discrimination contre une nation dans ce cas ?

J’ai participé au boycott des produits venant de pays qui font travailler les enfants, et ce faisant j’ai sans doute pénalisé également des producteurs qui n’en employaient pas. Et c’est ainsi qu’ils ont fait pression sur leurs gouvernements pour obtenir l’interdiction du travail des enfants dans toutes les entreprises.

Les producteurs israéliens qui ne sont pas contents du boycott n’ont qu’à faire pression sur le gouvernement Netanyahou et Lieberman pour qu’il mette un terme à l’occupation et à la colonisation des territoires palestiniens.

Il est clair que nous n’appelons pas au boycott de personnes ni israéliennes, ni juives, ni palestiniennes, ni françaises, ni belges, ni égyptiennes, mais à des sanctions contre la politique coloniale d’un Etat qui opprime tout un peuple, lui vole ses terres, le dépouille, l’emprisonne, le bombarde.

Les actions de boycott incriminées se sont déroulées quelques semaines seulement (en février et mars 2009) après les bombardements de la population de Gaza, faisant 1400 morts dont près de 400 enfants et des milliers de handicapés à vie.

Vous rendez-vous compte qu’il n’y a pas de crimes plus grave, plus écoeurant que celui qui consiste à enfermer des femmes, des hommes et des enfants, à leur boucher toutes les issues, puis à les bombarder ?

Et le « cycle de violences » comme on dit pudiquement, c’est Israël qui le crée, en occupant des terres qui ne lui appartiennent pas depuis des décennies, en installant ses colons dessus et en violant ainsi le droit international.

Si Israël voulait assurer la paix et la sécurité à sa population, il lui suffirait de cesser cette occupation et cette colonisation et tout leur cortège d’atrocités : torture légalisée, emprisonnement d’enfants, démolitions de maisons, écoles et mosquées, femmes palestiniennes obligées d’accoucher aux check-points, plus de 500 checkpoints à l’intérieur non pas d’Israël mais bien des territoires palestiniens reconnus par les résolutions de l’ONU.

Vous rendez-vous compte que le peuple palestinien n’habite plus que sur 9% de sa terre initiale et que l’Etat d’Israël poursuit malgré cela la colonisation ?

Les parties civiles ne cessent d’accuser le Hamas, mais qui pratique les attentats contre des civils de manière massive, qui a commencé à les pratiquer en premier et à grande échelle ?

Les massacres de milliers de femmes, d’enfants, de vieillards en 1948, les 500 villages rasés comme à Deir Yassine, les massacres de civils désarmés dans les camps de Sabra et Chatila en 1982 sous la supervision de Sharon, et plus récemment les bombardements du Liban en 2006 et ceux répétés de la population de Gaza, pas seulement il y a 3 ans, mais des dizaines et des dizaines sans discontinuer depuis, comme ces derniers jours ?

Savez-vous que le premier kamikaze, celui qui a donné le « la » pendant les accords d’Oslo, en 1994, en faisant un carton sur des fidèles en prière à Hébron, en tuant 27 pendant qu’ils étaient agenouillés et en blessant de nombreux autres, n’est pas un Palestinien, mais un colon israélien : Baruch Goldstein ?

Et qu’en réaction Israël a confiné pendant 6 mois toute la population palestinienne d’Hébron sous couvre-feu, condamnant définitivement l’accès au centre de la vielle ville, et envoyant des milliers de soldats pour permettre à ces colons fanatiques de poursuivre leurs exactions ?

Qui a tué Itzhak Rabin pendant les accord d’Oslo ? Un Palestinien ? Non, un israélien !

Alors le couplet des parties civiles sur la démocratie israélienne intouchable et leur déni de réalité concernant l’apartheid israélien ne trompe plus personne !

Oui nous réclamons des sanctions contre un Etat qui pratique l’apartheid :

– Le Mur de l’annexion jugé illégal par la Cour internationale de justice de la Haye
– les routes de contournement réservées aux colons
– les sources d’eau palestiniennes inaccessibles à ces derniers et inépuisables pour les colons (je vous renvoie au rapport Glavany, déposé à l’Assemblée Nationale par deux députés)
– la justice civile pour les Israéliens, et les tribunaux militaires ainsi que la détention administrative pour les Palestiniens

Comment appelez vous cela si le mot apartheid ne plait pas aux officines israéliennes ? ségrégation ? racisme ?

Le racisme, il est institutionnalisé dans la grande démocratie israélienne :
L’Etat juif, qui ne se reconnait aucune frontière, est un Etat qui n’accorde pas les mêmes droits à tous ses citoyens. Les plus de 20 % qui ne sont pas juifs, n’ont pas le droit d’acheter des terres ou même des logements dans la plupart des localités, ils ne peuvent étudier dans les mêmes écoles.

Les parties civiles qui nient qu’il y ait une situation d’apartheid en Israël, se vantaient jeudi dernier à la Cour d’Appel de Paris que le président de l’Etat d’Israël ait été condamné pour viol par un juge israélien d’origine palestinienne.

On ne va pas épiloguer sur le fait que la grande démocratie israélienne ait choisi un violeur au plus haut sommet de l’Etat. Nous ne sommes pas passés très loin, nous-mêmes, n’est-ce pas ?

Mais que cela permette de faire croire que les citoyens israéliens d’origine arabe aient les mêmes droits que les autres, notamment en matière d’emploi, c’est une farce !

Je ne vais pas vous énumérer la longue liste des mesures racistes mises en place par Israël et vous renvoie pour cela au rapport de la FIDH dans notre dossier ( http://www.europalestine.com/spip.php?article1887 )

Vous demanderez à Leehee Rothschild, israélienne qui témoignera, comment cela se passe dans la plus grande démocratie du Moyen Orient.

Et si vous ne la croyez pas, vous pouvez demander à
– Nurit Peled (lecture : message de soutien et description du racisme d’Etat israélien)
– Rabbin Lynn Gottlieb (lecture : soutien aux 4 inculpés de la campagne BDS)
– la Coalition israélienne des Femmes pour la Paix (lecture : message de soutien aux inculpés BDS et description de l’exploitation par Israël des ressources des territoires occupés)

Sans parler de nombreuses autres ONG et associations israéliennes de défense des droits de l’homme telles que B’Tselem, Médecins pour les Droits de l’Homme ou le Comité Israélien contre la Torture.

Tous des antisémites ?

Demandez à tous ces Israéliens s’ils ont la haine d’eux-mêmes ou bien s’il y a urgence pour secourir un peuple persécuté, et pour sauver la jeunesse israélienne du terrible lavage de cerveau qu’elle subit, qui la déshumanise en même temps que celles et ceux qu’elle opprime.

Regardez ces T.Shirts dans lesquels se promènent de jeunes soldats israéliens :
– Une femme enceinte et en dessous le texte dit : « c’est pratique : avec une balle on score deux fois »
T-Shirt_soldat_ter_9_mars.jpg
– Et celui- ci montrant un enfant et disant « Plus c’est petit plus c’est difficile »
T-Shirt_soldat_israelien.jpg
(Affiches remises au tribunal en séance)

C’est autre chose que nos T.Shirt Palestine Vivra/Boycott Israël, non ?

Qui incite à la haine ? Qui incite à la violence ?

Madame la présidente, nous, nous incitons les citoyens à ne pas verser un sou à Israël, et comme malheureusement, nous ne pouvons pas boycotter les drones exportés par Israël en France, nous boycottons des clémentines et des lingettes pour bébés, ainsi que des médicaments venant d’un pays qui bombarde les dépôts de médicaments sur Gaza, qui interdit aux Palestiniens de se soigner, dont l’armée tire sur les ambulances et oblige les femmes à accoucher aux check-points.

Nous ne bombardons personne, et nous n’appelons pas au bombardement d’Israël malgré le fait qu’il ait un gouvernement d’extrême-droite, clairement fasciste à sa tête. Nous ne sommes pas comme ceux qui vous réclament notre condamnation et qui ont préconisé des bombardements sur la Libye, qui appellent aujourd’hui au bombardement de l’Iran.

Nos « mises en scène » dans les magasins qui n’ont pas l’heur de plaire aux officines israéliennes, ont pour but de faire comprendre aux consommateurs et aux responsables des magasins la gravité de la situation. Les clémentines ne sont pas des balles, certes. il s’agit d’une métaphore signifiant qu’acheter ces produits c’est nourrir le budget militaire israélien qui sert effectivement à tuer des hommes, des femmes et des enfants.

Et elles sont parfaitement non-violentes, elles !

En utilisant à l’envi l’expression « opération coup de poing », les parties civiles essaient d’insinuer que nos actions sont violentes, là où elles sont parfaitement pacifiques. Nous n’agressons personne, nous ne détruisons rien, et nous demandons le plus souvent à parler avec un responsable du magasin.

Nos méthodes ne sont pas celles des voyous de la LDJ, les gros bras des officines qui nous poursuivent. Nous ne blessons pas les gens avec lesquels nous ne sommes pas d’accord, nous ne saccageons pas les librairies, nous ne déversons pas des tombereaux d’ordures sur nos sites.

Et je le redis, nous n’appelons à bombarder personne !

Tant que durera
– l’occupation, la colonisation, la privation de tous les droits fondamentaux pour les Palestiniens
– tant que nos gouvernements refuseront d’assumer leurs obligations (article 1 de la 4ème convention de Genève) et de prendre des sanctions contre Israël,

nous poursuivrons cette campagne de boycott, à moins que vous ayez une meilleure idée à nous suggérer pour faire cesser le nettoyage ethnique du peuple palestinien et la menace que fait peser Israël sur l’existence même des droits de l’homme et du droit international en les bafouant en permanence en toute impunité.

Mettez-moi en prison si vous voulez, Mandela y a passé de longues années mais il a gagné son combat, et le boycott de l’Afrique du Sud de l’apartheid, n’a pas été un boycott institutionnel avant que s’exerce la pression d’un boycott citoyen pendant très longtemps.

Mandela a appelé au boycott de l’Afrique du Sud en 1959, et ce n’est qu’en… 1977, soit 18 ans plus tard que l’ONU en a fait autant.
(On ne peut pas en dire autant d’Israël qui a apporté son soutien militaire et économique sans discontinuer aux dirigeants de l’apartheid sud-africain)

Et vous connaissez Rosa Parks ? Elle aussi a subi la répression pour avoir lancé le boycott de la compagnie des bus de Montgomery, en Alabama, où les Noirs devaient laisser les places de devant aux Blancs et même leurs places à l’arrière quand les Blancs n’en avaient plus devant.

Et cela se passait aux USA, dans un pays très démocratique n’est-ce pas, qui appliquait néanmoins des lois racistes. Et ce n’est que la mobilisation citoyenne qui a réussi à en venir à bout de ces lois racistes, et ceci malgré la répression.

Tout le reste : chantage à l’antisémitisme, « on va déligitimer Israel », n’est que poudre aux yeux.

Ces pyromanes essaient de tirer en permanence un trait d’égalité entre juifs et politique israélienne, en venant prétendre que toute réprobation de cette politique, toute solidarité avec le peuple palestinien pousse à l’acte anti-juif, alors que c’est l’impunité d’Israël et les gens comme eux qui provoquent l’antisémitisme.

Permettez-moi par ailleurs de m’interroger sur la notion de discrimination contre une nation concernant un Etat qui refuse de définir ses frontières. M.Ghozlan, ici représenté, refuse ainsi, tout comme le gouvernement israélien, de reconnaitre la moindre limite géographique à Israël. Ni celle du partage de l’ONU en 1947, ni celle du tracé de la ligne verte.

 
D’ailleurs la notion même de « nation israélienne » n’est pas reconnue par les tribunaux israéliens qui estiment qu’il y a seulement une « nation juive » qui s’applique à tous les juifs du monde (et pas seulement à ceux qui vivent en Israël). Pour les autres, qui ne sont pas juifs, il y a uniquement une « citoyenneté israélienne » qui n’ouvre pas aux mêmes droits.

Donc, que reste-il comme arguments à nos détracteurs ?

Je passe sur celui qui consiste à nous demander systématiquement pourquoi on s’occupe de la Palestine et pas d’autre chose.
 En première instance, j’ai eu droit, ainsi que tous mes témoins à la question assez surréaliste : « pour quelles autres causes militez-vous ? », comme si s’intéresser aux droits des palestiniens était de prime abord suspect.
- Comme si on demande aux militants qui luttent pour le Tibet ou la Tchétchénie pourquoi ils ne se battent pas aussi pour l’Afrique Noire ou Cuba.

Comme si on demande aux militants contre le nucléaire ou les OGM pourquoi ils ne luttent pas également contre les publicités mensongères et les faillites frauduleuses ?

Il faudrait aussi demander aux parties civiles qui réclament le boycott de l’iran et de la Syrie, pourquoi ils ne demandent pas également celui de l’Arabie Saoudite et du Bahrein qui ne sont guère plus démocratiques, sans parler des régimes de MM Ben Ali et Moubarak contre lesquels ils n’ont rien eu à redire !

On veut en vérité nous baillonner, comme le CRIF a empêché la tenue de conférences sur la politique israélienne à l’ENS, à Paris 8, à l’IEP de Lyon et dans d’autres universités. 
Mais cela ne marche pas. Cela ne peut pas marcher. Cette campagne BDS ne se déroule pas uniquement dans le 93. Elle a lieu dans toutes les villes de France et dans tous les pays du monde, y compris en Israël !

Plus de 69 % des Européens estiment qu’Israël est la plus grande menace pour la paix dans le monde et sont préoccupés par la poursuite du nettoyage ethnique des Palestiniens.
 Et je dis bien nettoyage ethnique car le mot n’est pas trop fort.

Nous avons parlé d’occupation, d’apartheid, de racisme, mais il s’agit en fait d’un peuple en voie d’anéantissement. Il y a urgence !

Monsieur le procureur a dit qu’il « respecte nos idées et notre cause » mais qu’il fallait « prendre en compte la marge d’appréciation de l’Etat ».
Que doit-on faire quand l’Etat apprécie mal, ce qui a été le cas dans différents pays, à différentes époques ?

Doit-on refuser l’assistance à un peuple en danger ?

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