Le nombre de personnes handicapées ne cesse d’augmenter à Gaza, en raison des crimes israéliens et du blocus. Notre visite dans la bande de Gaza nous a permis de rencontrer les responsables d’associations de handicapés, de découvrir leurs problèmes, leur travail et leur grand courage. Récit de Sarra.
«C’est à Gaza que l’on retrouve la plus grande proportion de handicapés au monde. Nous représentons 4% de la population, soit 70.000 personnes handicapés pour une population totale de 1.700.000 personnes», nous disait
Mohammed Alarabi, président du « Club de la paix des handicapés ».
De plus avec le blocus, les bombardements et les différentes agressions israéliennes, le nombre de personnes handicapées ne cesse de croître. Ces crimes de guerres ont causé et causent encore aujourd’hui de nombreuses amputations des membres inférieurs ou supérieurs, des pertes de sens tels que la vue ou l’ouïe, etc…
Parmi cette population handicapée, 4550 personnes le sont directement à cause des attaques israéliennes. Et un nombre encore plus élevé mais non comptabilisé statistiquement, a été blessé à cause du blocus imposé par Israël. Ainsi les coupures d’électricité provoquent à elles seules de nombreux accidents : explosions de générateurs, brûlures lors d’incendies liés aux bougies, pannes d’appareils médicaux vitaux.
Par ailleurs, comme nous avons pu le constater à Gaza, l’impossibilité de faire rentrer des matériaux de construction, de fournir des infrastructures et loisirs aux enfants, amènent ces derniers à s’ennuyer, à sortir dans des rues rendues dangereuses par la circulation, ou encore à se pencher aux fenêtres en haut d’immeubles pour voir, se distraire.
Si le blocus a un impact direct sur la population gazaouie, celui-ci se révèle encore plus néfaste pour les handicapés de Gaza. En effet, entre la nécessité pour eux de recevoir des soins réguliers et le manque d’infrastructures adaptées, le quotidien d’un handicapé gazaoui est parsemé d’obstacles.
Sans oublier que le blocus de Gaza, empêche les handicapés d’aller à l’étranger, même en Egypte pour avoir accès à des traitements. Des blessés auraient pu être sauvés ou éviter une amputation. Ce blocus empêche même l’entrée de tout équipement médical.
« Le blocus nous empêche de nous soigner, d’avoir des prothèses pour améliorer notre vie quotidienne, et cela simplifie la tâche à Israël. Il est plus facile de tuer une population handicapée, car nous sommes incapables de nous protéger lors des massacres de l’occupant», souligne Zaraf El Ghora, un membre du « Club de la paix des Handicapés »
Selon le journal « Les Nouvelles du Pays », 76,4% des handicapés de toute la bande de Gaza ne peuvent pas prendre les transports en commun car ces derniers ne sont pas adaptés pour les personnes à mobilité réduite, 22,2% ont directement dû arrêter leurs études à cause de leur handicap.
Selon l’enquête du ministère des affaires sociales palestinien de décembre 2011, 90,9% des handicapés de Gaza n’ont pas accès au travail, non pas par manque de qualification, mais parce que les infrastructures et les secteurs économiques actuels ne le permettent pas.
Il existe plusieurs associations à Gaza qui défendent les droits des handicapés (y compris une radio animée par des enfants handicapés). La principale d’entre elles est « Le Club pour la Paix des Handicapés » (Peace Club for Disabled), présidé par Mohammed Alarabi.
Ses objectifs :
– aider les personnes handicapées à reprendre une activité,
– sensibiliser la communauté internationale quant à leur situation et à leurs difficultés
– Sensibiliser l’autorité de Gaza sur la nécessité d’avoir des rues adaptées, particulièrement dans les écoles et universités.
– Se battre contre l’isolement des handicapés et leur exclusion de la société, par le biais de programmes de loisirs et de sport avec le reste de la population. Faciliter le mariage pour les femmes handicapées.
– Alerter sur la difficulté des handicapés à accéder aux études qui les intéressent. Les universités ne disposant pas du matériel nécessaire pour accueillir des sourds, muets ou des personnes à mobilité réduite, ces derniers sont contraints de suivre des études qu’on leur impose comme la langue arabe ou la religion.
Mais le «Club de la Paix pour handicapés», créé en 2004, s’est avant tout spécialisé dans la réhabilitation par le sport et le soutien psychologique.
« A travers le sport, nous retrouvons l’envie du dépassement et de la réussite. Cela nous permet également d’avoir des loisirs comme le reste de la population sans négliger les formations qui informent de nos droits et obligations au sein de la société palestinienne. Le sport est aussi un moyen de rappeler à la personne handicapée qu’une partie de son corps est encore valide », explique Mohammed Alarabi.
Lors des tournois internationaux de différentes disciplines sportives, le club de la Paix représente la Palestine, et rappelle que les handicapés ont eux aussi une capacité de résistance face à l’occupant.
-Zaref a remporté le premier prix au tournoi de tennis l’année dernière.
– Khamis Zaqout, lanceur de poids, de javelot et de disque, a décroché un sésame à Dubaï et était présent à Londres en août 2012
- Les Palestiniens ont gagné deux médailles de bronze et une d’argent aux jeux Paralympiques, dont deux au lancer de poids.
- Un autre athlète palestinien, Mohammed Fannouna, 32 ans, mal-voyant, a concouru au saut en longueur, épreuve dans laquelle il avait déjà décroché une médaille de bronze à Athènes avec un saut à 6,59 mètres.
Récemment, un club de gym a ouvert ses portes à Gaza, et le club a pu fournir à 100 handicapés des sacs de sports avec des vêtements de sports pour handicapés.
Malheureusement beaucoup d’athlètes ne peuvent se rendre à l’étranger pour participer à des sessions d’entraînement ou des événements sportifs, car le blocus les en empêche.
« Sans oublier que les derniers bombardements israéliens ont détruit le seul terrain de foot de Gaza, nous avons donc perdu notre terrain d’entraînement, et ce n’est pas la première fois, nous avions déjà perdu notre local à cause des bombardements. C’est toute la politique fasciste, raciste menée par l’occupant contre le peuple palestinien », fait remarquer Zaref.
Destruction du siège du Comité paraolympique de Gaza en novembre 2012
Les sportifs de Gaza font face à des défis quotidiens pour s’entraîner, faute d’équipements dans une enclave soumise à un blocus israélien depuis 2006. »Nous n’avons pas les droits fondamentaux de tout athlète », déplore Khamis Zaqout, auquel les autorités israéliennes ont interdit de se rendre à Jérusalem et à Ramallah pour participer à une cérémonie festive organisée par le Royaume-Uni en vue des jeux Paralympiques.
« Nous n’avons pas d’équipements sportifs adéquats, pas assez de terrains d’entraînement ou même de fauteuils roulants », rappelle-t-il. « Normalement, chaque athlète devrait disposer d’au moins dix javelots. Nous, nous n’en avons que quatre pour six lanceurs à l’entraînement. Et nous n’avons que cinq disques quand il en faudrait au moins vingt ».
Il conviendrait de travailler à la mise en place d’une coopération entre les clubs de la Palestine et des clubs européens. Cette coopération pourrait ainsi permettre aux sportifs palestiniens handicapés de connaître de meilleures conditions d’entraînement tout en mettant le focus sur les conséquences du blocus opéré sur Gaza par l’occupant israélien. De plus, ces coopérations pourraient permettre d’apporter une aide financière pour l’achat de bus équipés pour les sportifs ou la reconstruction des enceintes sportives détruites lors des bombardements.
Rencontre avec les responsables du Club de la paix des handicapés à l’Hôtel Palestine, à Gaza le 29 décembre 2012
Sources :
– interviews réalisées à Gaza entre le 28 et le 31 décembre 2012
– http://www.wattan.tv/new_index_hp_details.cfm?id=a5075482a5423504&c_id=11#.UQVHpb-7X-7
– http://pcbs.gov.ps/Portals/_PCBS/Downloads/book1812.pdf
– http://www.leparisien.fr/flash-actualite-sports/jeux-paralympiques-le-defi-en-or-d-un-palestinien-de-gaza-a-londres-26-08-2012-2137593.php