Nous avions rencontré Hana lors de notre mission de décembre 2012 à Gaza et, depuis, elle suit et relaie nos activités. Nous correspondons régulièrement et sommes impatientes de la retrouver.
J’habite à Gaza, vous savez cette ville auprès de la mer où les navires israéliens empêchent nos pêcheurs d’aller exercer leur métier, et s’amusent à provoquer des explosions dans l’eau tous les matins pour nous terroriser…
Quand ces explosions de nous réveillent pas brutalement le matin, elles nous secouent parfois en plein milieu de la nuit.
En tant que journaliste freelance*, moi aussi je vais à la pêche… aux infos, tous les jours sur le terrain, et j’essaie également de me creuser la tête pour trouver des idées de communication, pour réussir à percer le mur du silence sur la situation sociale, économique, politique et sécuritaire de Gaza.
La plupart du temps, il n’y a pas d’électricité chez moi, aussi je me rends dans des cafés ou chez des collègues dans d’autres quartiers pour pouvoir transmettre mes reportages. L’agence pour laquelle je travaillais l’an dernier me permettait d’utiliser ses bureaux en cas d’urgence.
Ce blocus est une catastrophe dans tous les sens du terme.
Il me vole mon avenir, mes espoirs de contribuer à la construction d’un Etat indépendant et démocratique, qui soit en mesure de fournir des services dans tous les domaines économiques, sociaux et politiques, et qui trouve sa place dans la communauté internationale.
Il m’interdit à la fois de sortir pour voyager, et il empêche mes amis et ma famille de venir me voir. Autrefois, nous recevions la visite annuelle de parents proches qui vivent à l’étranger. Désormais, ils ne peuvent plus entrer à Gaza et je ne les vois plus.
La mère de l’un de mes amis en est morte. Elle était malade et on lui a refusé de sortir de Gaza pour aller se faire soigner à l’étranger.
Une autre ne peut pas aller se faire traiter pour un cancer du sein qui a été diagnostiqué précocément, mais qui ne lui laisse pas davantage de chances puisque les soins nécessaires lui sont refusés.
Je ne sais pas si vous pouvez vous imaginer vivre dans un pays dont toutes les frontières seraient hermétiquement fermées ?
Dans cette grande prison où nous sommes enfermés, ce sont les femmes qui sont souvent obligées de nourrir leurs familles, les hommes ne trouvant désormais plus de travail; et les relations conjugales en sont affectées..
Combien de temps encore ce siège illégal va-t-il se poursuivre ainsi ? Je suis terrifiée à l’idée que le monde puisse nous avoir totalement oubliés et que nous restions encore plus longtemps dans cette situation qui ne cesse de s’aggraver en raison de toutes ces privations, et avec peut-être de nouvelles attaques israéliennes ?
Nous ne sommes même plus capables de faire des projets. Nous vivons dans l’incertitude permanente, comme si nous étions sur une route inconnue et plongée dans le noir.
Chaleureuses salutations,
Hana SALAH
*http://www.al-monitor.com/pulse/contents/authors/hana-salah.html