Plus que gênée aux entournures par l’ampleur de la mobilisation* contre le scandale #apartheidsurseine, la Mairie de Paris a inventé un conte de fées pour tenter de justifier l’indéfendable.
En substance, à en croire Bruno Julliard, premier adjoint de la Maire de Paris chargé de défendre l’initiative, Tel Aviv et Israël n’auraient rien à voir l’un avec l’autre !
« Nous refusons les amalgames entre la politique de colonisation brutale du gouvernement israélien et la ville de Tel Aviv qui est une ville progressiste, symbole de paix et de tolérance », a ainsi déclaré à l’AFP Bruno Julliard.
« Nous, nous ne voulons pas punir une population et des villes qui oeuvrent pour la paix », a-t-il ajouté, avant de proposer de «faire la distinction entre un Etat, sa politique, son gouvernement et de l’autre côté des villes progressistes et leurs maires en opposition avec cette politique ».
De tels propos sont évidemment absurdes, cela va sans dire, mais cela ira encore mieux en rappelant à Julliard et autres hypocrites quelques vérités simples, et pas les fables qu’ils tentent maladroitement de vendre à l’opinion.
Non, en dépit d’une propagande visant à la montrer comme une ville « cool et sympa », « gay friendly » où il fait bon bronzer sur la plage toute l’année, Tel Aviv est bien entendu partie intégrante de l’Etat d’Israël, et de la politique criminelle de ce dernier.
On rappellera d’abord à M. Julliard que Tel Aviv est tout simplement, aux yeux de tous les pays, dont la France, qui entretiennent des relations diplomatiques avec Israël, la capitale de cet Etat. C’est là que les uns et les autres, Etats-Unis compris, ont établi leurs ambassades respectives.
Et même Israël, qui a érigé unilatéralement et illégalement Jérusalem en « capitale indivisible et éternelle » après la conquête de la partie palestinienne de cette ville en 1967, conserve à Tel Aviv les sièges de ses institutions les plus meurtrières, et les personnels qui vont avec : le ministère de la « Défense », l’Etat-major de l’armée, le sinistre Mossad et les tortionnaires du Shabak (police secrète, anciennement appelée Shin Bet).
(Voeux de Nouvel An à l’Israélienne : sans commentaire !)
Ensuite, contrairement à ce qu’essaie de faire croire l’adjoint d’Anne Hidalgo, ni le maire de Tel Aviv, ni son conseil municipal ne sont « en opposition » avec la politique de leur gouvernement.
Le maire, Ron Huldaï, fait partie, comme c’est le cas partout en Israël, de cette caste d’anciens militaires reconvertis dans la politique après leur retrait du service actif. Pendant ses 26 ans de carrière, Ron Huldaï, pilote d’avion, avait collaboré sans états d’âme aux bombardements de populations arabes sans défense, palestiniennes et libanaises notamment.
Son conseil municipal, dirigé par une coalition de la quasi-totalité des formations politiques, comprend des élus de l’extrême-droite la plus ouvertement raciste, et il n’est donc pas le moins du monde « en opposition » avec les horreurs de la colonisation.
D’ailleurs, à l’occasion de l’assaut contre Gaza l’été dernier, la municipalité de Tel Aviv a tenu à souligner fièrement, panneaux publicitaires à l’appui, que la ville était celle qui fournissait le plus fort pourcentage de conscrits à l’armée (92 % des filles endossent le kaki, et 91% des garçons). Tel Aviv se flatte pareillement d’être la ville du pays où habite le plus fort pourcentage de militaires de carrière ! Il est donc parfaitement possible qu’une partie des « gentils organisateurs » qui veulent vendre, tout sourire, leur camelote jeudi à Paris Plages, aient eux-mêmes participé au massacre de la population de Gaza l’année dernière.
(Tel Aviv : panneau municipal félicitant la jeunesse pour sa forte participation à l’armée)
Quant à la « vie quotidienne », elle est marquée à Tel Aviv par les mêmes fléaux de racisme et de ségrégation qu’ailleurs en Israël.
Tel Aviv s’est développée, depuis plus de 60 ans, par absorption de sa voisine Jaffa, ville palestinienne historique, dont 95% des habitants ont été violemment expulsés par les milices juives, lors de ce grand nettoyage ethnique que fut la Nakba de 1948. Au terme des combats, il ne restait plus que 4.000 Palestiniens à Jaffa, contre plus de 60.000 avant la création de l’Etat d’Israël.
Et pas plus à Jaffa qu’ailleurs il ne fut question de laisser les réfugiés rentrer chez eux. Ni de laisser aujourd’hui des citoyens arabes israéliens s’installer dans la plupart des quartiers, réservés aux seuls juifs. Sans surprise, on constate que Tel Aviv – Jaffa, une agglomération d’un peu plus de 400.000 habitants, ne compte que 4% d’Arabes, quasiment tous assignés aux quartiers pauvres de Jaffa, alors que la minorité arabe d’Israël représente 20% de la population totale du pays.
Enfin, on rappellera à M. Julliard qu’à Tel Aviv, le racisme ambiant s’exerce aussi contre d’autres minorités que les Palestiniens, les migrants africains en l’occurrence. La municipalité de Tel Aviv se défend, bien entendu, d’être l’instigatrice des émeutes anti-africaines qui ont lieu à intervalles réguliers dans la ville. Mais ce sont bien M. Huldaï et ses acolytes qui ont interdit récemment l’inscription d’enfants d’immigrés africains dans les crèches de la ville « réservées aux enfants juifs ».
(Tel Aviv : manifestation de la minorité d’origine éthiopienne contre le racisme)
Les édiles de la Ville de Paris ont la possibilité de constater tout cela sur place. Dès lors qu’ils montrent patte blanche à l’apartheid, ils peuvent en effet atterrir sans encombre à l’aéroport Ben Gourion de Tel Aviv. Pas comme les Palestiniens ou tant d’autres voyageurs portant un patronyme arabe ou soupçonnés de sympathies pour la cause du peuple palestinien, systématiquement refoulés aux portes de « la seule démocratie du Moyen-Orient ».
* De nombreuses initiatives sont en cours ; la pétition réclamant l’annulation de Tel Aviv sur Seine (https://secure.avaaz.org/fr/petition/La_maire_de_Paris_Anne_Hidalgo_Annulation_de_Tel_Aviv_Sur_Seine/?preview=live) connaissait lundi un vif succès, avec plus de 13.000 signatures à la mi-journée. Parallèlement (voir ailleurs sur ce site) les appels à se rendre sur place, jeudi, au cas où la Mairie persisterait dans sa complicité avec les criminels de guerre, se multiplient.
CAPJPO-EuroPalestine