Article publié par Washington Post d’un Israélien qui parle des conséquences de l’occupation sur la société israélienne.
« (.. .) Les choses ne cessent d’empirer en Israël. Le débat en Israël est de plus en plus intolérant et même menaçant à l’encontre de ceux qui ne partagent pas le fanatisme et la propagande orchestrée par le gouvernement et relayée par ses fidèles médias. Les quelques opposants qui tentent d’apporter la contradiction, de poser des questions, de protester sont au mieux ridiculisés et au pire menacés en tant que « traîtres qui démoralisent nos troupes », voire attaqués physiquement.
Pendant la guerre de Gaza l’an dernier, des manifestants anti-guerre ont été attaqués lors de manifestations à Tel Aviv et Haïfa. Le journaliste Gideon Levy, accusé de trahison par un député, est contraint de sortir avec des gardes du corps. L’actrice Orna Banai a perdu l’un de ses contrats après avoir exprimé dans une interview son horreur des exactions israéliennes contre les Palestiniens. Ce mois-ci à Afula, le correspondant arabe d’une chaîne israélienne a été attaqué ainsi que le reste de l’équipe qui faisait un reportage sur une attaque au couteau. Un nouveau projet de loi encourage la police à refouler tous les visiteurs favorables au boycott des firmes qui profitent de l’occupation. Vendredi dernier, un colon cagoulé a attaqué le président des Rabbins pour les Droits de l’Homme dans une oliveraie en Cisjordanie.
Sur les réseaux sociaux, on ne prend plus de gants, pas la moindre courtoisie, la haine étale sa face hideuse. Les pages Facebook appellent à la violence contre les opposants de gauche et contre les Arabes. Toute expression qui n’est pas consensuelle est attaquée au vitriol raciste.. Un groupe dénommé les » Shadow Lions » discute sur Facebook de la manière de perturber un mariage entre une juive et un arabe, publiant le N° de téléphone du fiancé et lançant un appel pour qu’il soit harcelé. Sur Twitter et Instagram, les hashtags contre les « gauchistes » et les « traitres » sont légion.
La réalisatrice Shira Geffen, qui a demandé une minute de silence pendant la projection de son film par respect pour les enfants palestiniens tués lors d’une offensive israélienne a été insultée sur les réseaux sociaux. “Shame” (« Honte »), une nouvelle pièce de Einat Weitzman, qui porte à la scène les commentaires haineux à son encontre après qu’elle eût porté un T.Shirt avec un drapeau palestinien. Parmi ces commentaires « Si le bébé qui a été assassiné était le tien, je me demande quel drapeau tu aurais affiché. Maintenant piétine le et planque ta vilaine tête dans ton appartement, et n’en sors plus jusqu’à ce que tu y meures de honte, esseulée. Et peut-être qu’à ton enterrement, des djihadistes viendront réciter quelques versets du coran ».
Dans la nouvelle flambée de violence, le son a été élevé d’un cran. La droite, avec le soutien d’une prétendue opposition comme celle de Yair Lapid, on assiste à une nouvelle diabolisation des Palestiniens et des Arabes israéliens. Et on a atteint le paroxysme avec les déclarations de Netanyahou absolvant Hitler, qui aurait été influencé par l’ancien Mufti de Jerusalem, Haj Amin al-Husseini. (Ce qui a déclenché des blagues et quolibets sur internet car il avait sans doute poussé le cochonnet un peu trop loin ce coup-ci )
Les appels à tuer les Palestiniens n’ont cessé. Lapid déclarant lui-même dans une interview » n’hésitez pas. Même au début d’une attaque, il faut tirer pour tuer. Si quelqu’un brandit un couteau, tuez-le ! »
Consignes approuvées par le ministre de la sécurité Gilad Erdan et par le chef de la police de Jerusalem Moshe Edri, ou encore des députés comme Yinon Magal.
C’est ce qui a amené la mort de Fadi Alloun, soupçonné d’avoir voulu attaquer au couteau à Jérusalem Est, puis d’un Juif pris pour un Arabe. Et le lynchage d’un demandeur d’asile érytréen de 29 ans à Beersheba, Haftom Zarhum, accusé à tort d’avoir commis une attaque.
Vidéo insoutenable de la scène de coups et d’insultes obscènes :
Tout ce racisme, toute cette violence est le résultat de 48 ans d’occupation d’un autre peuple, d’une propagande affirmant que nous sommes supérieurs aux autres, que nous avons donc le droit de les contrôler, de décider de leur destin, ceci au mépris des lois et des notions les plus fondamentales d’humanité et de morale.
Nous sommes dans une spirale descendante vers une société irrémédiablement barbare.
Et la seule solution face à cela c’est de mettre fin à l’occupation. Non pour obtenir la paix avec les Palestiniens ou pour leur bien (bien qu’ils aient souffert trop longtemps entre nos mains), mais pour nous mêmes. Cesser l’occupation pour pouvoir se regarder dans une glace, pour pouvoir attendre du reste du monde d’être appréciés. Pour redevenir humains.
Rien ne peut advenir de pire que ce que nous vivons maintenant. Nous n’obtiendrons jamais la sécurité, quel que soit le nombre de soldats que nous envoyons en Cisjordanie, quel que soit le nombre de maisons que nous faisons exploser ou de lanceurs de pierres que nous arrêtons.
Nous sommes de plus en plus isolés sur le plan diplomatique et perçus (souvent à juste titre) comme des bourreaux, des menteurs des racistes. Ce qui est normal car nous sommes les plus forts, nous sommes l’occupant. Pour notre propre bien, pour notre santé mentale, nous devons arrêter maintenant. »
Assaf Gavron
(Traduit par CAPJPO-EuroPalestine)
Source et texte intégral sur : https://www.washingtonpost.com/posteverything/wp/2015/10/23/confessions-of-an-israeli-traitor/
CAPJPO-EuroPalestine