Bloqué par le cordon de sécurité de la police, malgré sa carte de presse, le journaliste Jacques-Marie Bourget a été empêché de nous rejoindre samedi lors du rassemblement organisé pour saluer la résistance palestinienne à l’occupation, et réclamer des sanctions contre Israël. Nous publions donc ci-dessous le discours qu’il comptait faire, et dont prendront ainsi connaissance nos milliers de lecteurs.
« Puisque Madame Hidalgo, sa concurrente Kosciusko Morizet, et le CRIF ignorent le sens du mot liberté, il faut bien tenter de le leur faire comprendre. Je suis ici pour la défendre, cette liberté. La défendre puisqu’elle est piétinée, massacrée en Palestine. La défendre puisqu’ici, à Paris -et c’est incroyable- la liberté aussi est une peau de chagrin, c’est le cas de le dire.
Je suis ici, comme je l’ai fait pour d’autres combats, pour défendre le droit international, la liberté donc, la justice. Pour défendre la vie contre la mort, contre les assassinats, les missiles et les bombes. Si faire cela c’est être « pro palestinien », nous devrions l’être tous dès le berceau. C’est un devoir et un honneur. C’est parce que depuis près d’un siècle la Palestine subit sans relâche crimes et injustice, spoliation des terres et des droits, que le sort fait par Israël à la Palestine résume cette infamie.
Ainsi, madame Hidalgo, madame Kosciusko Morizet, une organisation confessionnelle, le CRIF, entendent imposer en France une loi qui viendrait interdire tout soutien à la Palestine ! Où sommes-nous ?
Hier l’impuissante ONU a quand même condamné une nouvelle colonisation en Palestine. Protester est-il un acte antisémite ?
Evoquer les meurtres, dont ceux d’enfants de femmes et de vieillards… est-ce aussi être antisémite ?
Parler à propos des Palestiniens, de l’absence de droits, de l’impossibilité à se déplacer, à se soigner, à étudier. De l’absence d’identité qui fait de ce peuple un peuple apatride… Est-ce la réalité ou est-ce une attaque antisémite ?
Evoquer encore ce récent rapport de l’ONU, enterré bien sûr, mais qui parle de « situation d’apartheid en Palestine ». Est-ce aussi être antisémite ?
Il se trouve que j’ai découvert la Palestine en 1967. Depuis un demi-siècle je participe modestement à des réunions, pour qu’on donne enfin leurs droits à ces oubliés du monde. Pendant des années, aux côtés d’amis, j’ai pu manifester sans entraves et sans arrières pensées, sur le thème du droit et rien que le droit. Et soudain on nous interdit la lumière, on nous jette dans les cellules des commissariats, on nous criminalise. Alors que nous sommes les mêmes, simplement toujours révoltés par le sort des Palestiniens. Consolons nous en sachant qu’en son temps Hanna Arendt fut, elle aussi, qualifiée de cette accusation infâme. Une accusation qui est l’arme des faibles, des ceux qui savent, qu’à terme, leur combat est perdu. Pour nous faire taire ils ont inventé cette monstruosité : celle que nous serions racistes.
En ce qui me concerne, dans mon métier, j’ai souvent dénoncé le véritable antisémitisme. Je me souviens d’une longue enquête sur des réseaux américains et européen néo nazis de « l’Antidifamation league ». Etais-je alors un antisémite ?
Notre combat, difficile, doit se poursuivre. D’autres pays d’Europe permettent ce que la France nous interdit. C’est le signe que nous avons raison de lutter, que le véritable droit, celui des peuples et de l’homme, est de notre côté.
Aujourd’hui la tyrannie, celle qui s’exerce en Palestine, se rapproche de nous. Voilà que des banques françaises, qu’une compagnie d’assurance sont prises la main dans le piège du délit : elles financent les colonies. Elles sont ici, en France, en non sur une terre interdite d’accès à la majorité d’entre nous. C’est une opportunité pour notre lutte.
Enfin je voudrais vous parler des médias. Tous ici, il y a longtemps que, par démonstration, nous savons que les journaux et télévisions sont des astres morts. Ils bougent encore comme le vent qui agite une mèche de cheveux sur un cadavre. Mais plus grand monde ne les croit, ils sont hors-jeu.
Le relais a été pris par Internet. Pour nous, pour notre combat, c’est le moyen de faire circuler les informations, de nous mobiliser, de rester en lien avec ceux qui souffrent et meurent. Sachez que ce dérivatif, qui a pris la place du grand courant officiel de l’information, est son tour menacé. Aux Etats-Unis une campagne de diffamation est engagée contre des sites d’information militants. Ils sont accusés de tous les maux et le pire, d’être des relais de Poutine, ce qui est grotesque. En France c’est le journal « Le Monde » qui se colle à cette sale besogne. Obéissant à la consigne mondiale donnée par cette ex presse « main stream », le journal de Xavier Niel de Bergé et Pigasse, donc de Macron, a lancé un outil chargé de chasser les sorcières, un mistigri abusif et liberticide nommé pompeusement « Decodex ».
Déjà au travail, ce machin a bien sûr ciblé tous les sites qui nous informent sur la Palestine. Il est bien évident qu’au mieux ils sont qualifiés de «complotistes », au pire d’antisémites.
Nous voilà revenus au cœur du débat. Restons sereins, fermes et sachons qu’il n’y a qu’en France, entre les pays dits démocratiques, que défendre la liberté peut être un délit.
Enfin je souhaite qu’en ce jour que nous ayons tous une forte pensée pour Georges Ibrahim Abdallah, combattant exemplaire pour la liberté de la Palestine. Aujourd’hui prisonnier en France, depuis 33 ans, son sort est une honte pour la justice et la démocratie. Abdallah n’est plus un prisonnier, c’est un otage. Luttons sans relâche pour sa libération. »
Jacques-Marie Bourget
CAPPO-EuroPalestine