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Nouvelles alliances du Hamas ? L’analyse d’Hani Almasri

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Une analyse d’Hani Almasri sur la situation politique à Gaza et des changements d’alliances, qui peuvent surprendre…


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La frontière entre Gaza et l’Egypte

LETTRE D’UN GAZA INÉBRANLABLE

« Je vous écris de la Bande de Gaza, inébranlable et assiégée, qui souffre au-delà de ce qu’endurent les êtres humains », écrit Hani al-Masri sur le site www.masarat.ps.

J’ai eu la chance d’arriver à Gaza peu de temps après le retour d’une visite de neuf jours au Caire de la délégation du Hamas, conduite par Yahiya as-Sinwar, laquelle, d’après de nombreuses sources, est susceptible d’emporter des succès meilleurs que ceux de ses prédécesseurs. C’est évident lorsque l’on constate des pourparlers prometteurs : circulation imminente de centaines de milliers de litres de carburant en provenance d’Égypte, et aussi des réunions sans précédent, qui se sont tenues en marge de la visite, entre la délégation du Hamas et une délégation dirigée par Mohammad Dalhan, et qui se sont terminées par des accords qui devraient être établis dans les jours à venir,

Mais qu’est-ce qui a provoqué cet apaisement dans les relations Hamas-Égypte, après la déclaration de Trump du podium de Riyadh, selon laquelle le Hamas est une organisation terroriste ?

On peut expliquer ce qui s’est passé : le Hamas a besoin d’atténuer les pressions grandissantes qu’il subit en conséquence des récents développements, en particulier après la crise du Golf entre le Qatar et certains pays du Golfe sans oublier l’Égypte, et à la suite des crises des moyens de subsistance qui s’aggravent, dans la Bande de Gaza. Ces crises ont atteint le point où elles semblent maintenant se diriger vers une explosion interne, ou vers une guerre contre Israël qu’aucun des deux ne veut (au moins pour le moment), ou encore vers un appel urgent à l’Iran – dernier recours.

Voilà pour les raisons du Hamas. De son côté, l’Égypte a besoin de la coopération du Hamas pour sécuriser sa frontière avec la Bande de Gaza et s’assurer que les djihadistes de takfiri ne passent pas dans le Sinaï ni n’en sortent.

Ce qui a maintenant changé, c’est le nouveau commandement, celui de Yahiya as-Sinwar, qui est le chef du mouvement de la Bande de Gaza. Ces dirigeants ont décidé de desserrer à tout prix la tension dans leurs relations avec l’Égypte, sans toutefois perdre le Qatar ni la Turquie, sans claquer la porte à l’Iran avec lequel les relations se sont améliorées. Il est vrai que c’est peut-être difficile, sinon impossible à réaliser, mais à cause de la « dictature » de la géographie et des choix limités, la priorité du Hamas est toujours l’amélioration de ses relations avec l’Égypte. Quant à l’Égypte, son but est de renforcer le scellé de sécurité avec la Bande de Gaza et d’éloigner le Hamas des Frères Musulmans, du Qatar, de la Turquie et de l’Iran.

Sinwar a rencontré Dahlan en marge de la visite au Caire de la délégation du Hamas. Qu’est-ce qui a mené à cette rencontre – un peu comme si on mangeait la chair d’un mort ? Les deux parties ont été forcées à se rencontrer parce que leur hostilité envers le Président Mahmoud Abbas constitue un intérêt mutuel très significatif. En d’autres termes, le Hamas et Dalhan n’ont pas d’alternative. Le Hamas n’a plus de choix après le plan d’Abu Mazen au sujet de Gaza, qui vise à faire plier le Hamas et à le soumettre en resserrant le siège et en lui imposant petit à petit des sanctions de plus en plus sévères. Le but est de conduire les habitants de la bande de Gaza à se révolter contre l’autorité du Hamas, s’il rejette les exigences du président : Si le Hamas refuse de se soumettre, il sera responsable de ce qui est susceptible d’arriver.

Comme le disent ses dirigeants, le Hamas aurait préféré conclure un accord avec le Fatah et le président. Il espère encore un peu que ce genre de chose est possible, car, tandis que le président est un opposant, Dahlan est un ennemi. Cependant, l’intention de Autorité Palestinienne de renforcer le siège de la bande de Gaza ne permet pas la réconciliation. Il n’y a donc que le choix de chercher l’impossible, même si cela implique une réconciliation entre le Hamas et Dahlan.

Le nouveau chef du Hamas à Gaza a pris une initiative positive, y compris une solution pour l’Université d’Al Aqsa à Gaza, basée sur les préconditions établies par l’AP. Celle-ci n’a pas rendu la pareille. Il a aussi encouragé des médiateurs à prendre contact avec le président – sans susciter de réponse. Au contraire, ce dernier a insisté sur le plan « soit l’un, soit l’autre ». La réponse finale a été profondément influencée par le déclenchement de la crise du Golf, le débat ayant pourtant duré des mois.

Quant à Dahlan, la réaction du Hamas à son offre est une bouée de sauvetage : Lui et son groupe ressentent encore le goût amer de l’exclusion par le Fatah qui a tenu sa septième conférence – en novembre 2016 – sans son groupe, malgré le soutien qu’il avait reçu du Quatuor Arabe (l’Égypte, l’Arabie Saoudite, les Émirats, la Jordanie). Il a essayé de convaincre le Hamas d’accepter son offre il y a quelque temps mais celui-ci hésitait toujours, comme le montre Sinwar qui avait prévenu les nombreuses personnes qu’il avait rencontrées au cours des derniers mois, qu’il avait une offre – sans révéler au début ce que c’était, confirmant plus tard qu’elle venait de Dahlan – qui était susceptible de mettre fin aux crises de Gaza ou de les atténuer. Pourtant, il a ajouté qu’il préfère conclure un accord avec Abu Mazen, même selon des conditions plus défavorables, si on se souvient que le principe constant dans cette affaire est que toute offre ou tout accord entre le Hamas et toute autre partie ne doit pas compromettre les sources de pouvoir du mouvement – en particulier en ce qui concerne sa sécurité et son armement – et son contrôle de Gaza.

Quels sont ces accords ? Quelles sont les chances de leur mise en œuvre ? Selon certaines sources, ils comprennent :

Premièrement, le lancement des activités de la Commission pour la Sécurité Sociale, qui a été organisée il y a plusieurs années. Elle comprend les représentants de nombreuses factions et aussi la branche du Hamas et de Dahlan. La Commission doit commencer ses activités d’ici quelques jours, avec un budget de deux millions de dollars.

Deuxièmement, le lancement des réconciliations dans la société, destinées à résoudre les effets résiduels des hostilités entre les deux groupes (Fatah et Hamas) : versement du « prix du sang » aux parties impliquées, compensation pour les blessés, les handicapés et ceux qui ont souffert un préjudice. Le coût va de 50 à 150 millions de dollars.

Troisièmement, des programmes de soutien pour les jeunes.

Quatrièmement et en dernier, une demande au Conseil Législatif Palestinien de se réunir avec la participation du bloc « Changement et Réforme » (qui représente le Hamas) et du bloc de Dahlan , qui comprend au moins 14 membres, ainsi que toutes les autres factions qui sont d’accord pour cette réunion – ce qui formerait un quorum. Un débat est en cours en ce qui concerne le choix possible d’un représentant et d’un bureau du CLP, que l’on pourrait trouver parmi les membres du Bloc Changement et Réforme.

Le partage de l’administration de Gaza pourrait ainsi être discuté, si on assume que les accords seront mis en œuvre, comme prévu. Alors, le camp de Dahlan contribuerait à l’administration de Gaza. De plus, si cela n’aide pas à l’unité nationale, la situation pourrait mener à démunir le président de l’AP de sa légitimité. Dans ce cas-là, le président pourrait réagir ou empêcher un tel geste en dissolvant le CLP via la Cour Constitutionnelle qui a été établie à cette intention. De plus, le président a le…joker (la carte « Trump »), du fait que le président des États-Unis pourrait agir afin d’empêcher le sauvetage du Hamas. En outre, l’intervention de l’AP pour empêcher l’arrivée des fonds à Gaza pour le paiement du carburant égyptien comme convenu, montre bien que l’affaire n’est pas aussi simple que certains le croient.

La situation donne évidemment naissance à certaines possibilités. Les accords peuvent bien commencer à se réaliser, alors que le plafond et le but n’ont trait qu’aux problèmes sociaux et ceux de subsistance, l’intention étant d’arriver à résoudre ou à atténuer les effets de la crise, dans l’espoir de pousser le président à arrêter la réalisation de son plan punitif. Cependant, la situation pourrait aussi se transformer en accord sur l’administration de Gaza. Cela conduirait le Fatah et le président à s’ouvrir à une réconciliation avec le Hamas, tout en barrant la route du retour à Dahlan qui se sert du Hamas pour entrer par la fenêtre.

On voit ici le rôle de Dahlan. Il souhaite que ces accords forcent la porte de son retour, s’assurant qu’on le reconnaisse en tant qu’acteur de premier plan à Gaza. Après tout, Dahlan ne gère pas une œuvre de bienfaisance pour résoudre les crises de subsistance ou pour libérer le Hamas de sa crise. Il veut un rôle politique. De plus, ces accords peuvent très bien se réaliser, se développer et devenir une alliance dans un effort de la faire évoluer en une participation à l’administration de Gaza, ce qui semble normal du fait que la séparation de Gaza avec la Cisjordanie est le scénario préféré d’Israël, que le monde en général semble accepter, partant de l’hypothèse que c’est ce qu’il y a de mieux.

Une chose demeure : comment expliquer la position de l’Égypte ? Celle-ci se préoccupe en particulier de maintenir ses distances avec les accords entre Dahlan et le Hamas. On peut l’expliquer si on pense à la détermination de l’Égypte d’en finir avec le problème de sécurité dont la cause est le Hamas qui contrôle Gaza, et à son refus d’encourager le plan du président pour Gaza : Il semble que l’Égypte n’ait pas été consultée au sujet du plan. Ou peut-être qu’il y a eu une consultation sans l’encouragement de l’Égypte. En fait, comme Israël, l’Égypte ne souhaite pas l’explosion de Gaza, qui éclabousserait l’un de ses voisins ou les deux. Elle veut une AP sous la conduite d’Abu Mazen, établi comme dirigeant légitime. En outre, à plus ou moins long terme, l’Égypte peut y gagner si le Hamas s’éloignait des Frères Musulmans, du Qatar et de la Turquie et s’il ne retourne pas vers son ancienne alliance avec l’Iran.

Cette visite annonce-t-elle une nouvelle phase pour le Hamas en ce qui concerne l’Égypte et Dahlan ? Ou va-t-elle mener à l’unité nationale palestinienne ? Ou encore, est-ce une pause momentanée au milieu de la tension ?

Tout est possible, ce qui est nouveau. Tout dépend de la façon dont les accords avec l’Égypte peuvent se matérialiser, de leur ampleur et de leur rapidité, en particulier si le carburant s’écoule vers Gaza et si le passage de Rafah s’ouvre après l’Aïd (fin du festival du Ramadan) d’une façon différente de ce qui se passait avant. Cela dépend aussi de l’ampleur et de la rapidité de la conclusion de l’accord entre le Hamas et Dahlan, sans obstacles insurmontables.

En outre, il reste la possibilité d’une marche accélérée vers la séparation entre la Cisjordanie et la bande de Gaza, car c’est la politique d’Israël, soutenue par les États-Unis, et que la communauté internationale garde sous silence. En réalité, cela devient très possible, spécialement si les parties palestiniennes qui s’opposent, demeurent intransigeantes, mêlant actions et réactions.

Conclusion de Masri : De toute façon, les jours et semaines à venir, la plupart des mois à venir, apporteront les réponses définitives à ces questions. »

(Traduit de l’anglais par Chantal C. pour CAPJPO-EuroPalestine)

Source : http://masarat.ps/ar/content/writing-steadfast-gaza

CAPJPO-EuroPalestine

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