« En Israël, le centre et la gauche n’ont pas su proposer de stratégie progressiste claire capable de contrer l’idéologie kahaniste de l’extrême droite, ne laissant ainsi à l’opinion publique israélienne d’autre choix politique que la droite », analyse Gideon Levy dans Haaretz

« Ce phénomène est quasiment inconnu ailleurs dans le monde. En Israël, la gauche est empreinte d’un esprit conservateur : sclérosée, hésitante, trompeuse et lâche. La droite, quant à elle, incarne le mouvement révolutionnaire, débridé, un mouvement qui dit les choses telles qu’elles sont. », pense Gidéon Levy.
» À gauche : « Le peuple d’Israël vit en bleu et blanc » avec Gantz et Lapid ; à droite : « Le kahanisme est vivant » avec Ben-Gvir, Bibi, Smotrich et Meir Kahane. Généralement, la radicalisation de la droite entraîne celle de la gauche. Mais en Israël, c’est l’inverse qui s’est produit. Tandis que la droite se radicalisait, la gauche s’est recentrée. Elle a brouillé ses positions, s’est alignée sur la droite, a tenté de l’imiter et s’est retrouvée dans une situation des plus défavorables.
Lorsque Donald Trump est devenu président des États-Unis, la réaction de la gauche a été immédiate. Le bloc libéral s’est radicalisé et est devenu plus progressiste. Mais lorsque le kahanisme est arrivé au pouvoir en Israël, la gauche non seulement n’a pas réussi à se radicaliser, mais a même cherché à s’aligner sur les positions du gouvernement.
Lorsque le gouvernement de Netanyahou a présenté un projet de loi rejetant la création d’un État palestinien, l’opposition l’a largement soutenu. Lorsque la Knesset a voté le rétablissement de la peine de mort pour les terroristes – l’un des projets de loi les plus racistes et fascistes jamais présentés dans le pays – l’opposition a boycotté le vote. La réaction face à l’esprit kahaniste a été déplorable.
Le kahanisme – qui, comme l’écrivait pertinemment Ravit Hecht le 14 novembre dans l’édition en hébreu de Haaretz, est devenu le plus important mouvement populaire en Israël depuis le 7 octobre 2023 – se heurte à un mur. Au lieu de durcir ses positions, la gauche les a rendues plus vagues. La gauche conservatrice s’est figée. Plus aucune position d’extrême droite n’est considérée comme illégitime. Et plus aucune position de gauche n’est considérée comme légitime. Le moindre murmure venant de la gauche modérée est perçu comme une trahison. Il suffit d’écouter les chaînes de télévision : pas une seule voix subversive ne se fait entendre.
Cette situation a été créée de concert par la gauche et les médias. Proposez n’importe quel crime de guerre – du nettoyage ethnique à l’extermination – et il sera jugé légitime. Proposez quelque chose de moral, de démocratique, d’humanitaire ou conforme au droit international, et vous le réduirez au silence. La gauche et le centre, qui auraient dû se radicaliser comme aux États-Unis, sont paralysés par la peur. La droite est favorable au génocide et aux transferts de population. Mais que propose la gauche ? »
Traduit par Tlaxcala
CAPJPO-Europalestine


