URL has been copied successfully!
Header Boycott Israël

Ghetto de Varsovie, ghetto de Gaza : des ressemblances frappantes

URL has been copied successfully!
URL has been copied successfully!
Partagez:

Norman Finkelstein publie des écrits de sa mère, Maryla Husyt Finkelstein, rescapée du ghetto de Varsovie, dont les récits font penser au ghetto de Gaza.

Pas seulement en raison de la faim, l’horreur et la lutte désespérée des résistants juifs depuis leurs tunnels face au projet d’extermination nazi. Mais parce que, comme les Palestiniens, ils ont été abandonnés de tous, et ce n »est que bien plus tard qu’ils ont été considérés comme des résistants et glorifiés.

Maryla Husyt et son époux, Harry Finkelstein

Maryla Husyt Finkelstein (1917-1995) a vécu plus de 4 ans dans le ghetto de Varsovie, avant d’être envoyée au camp de concentration de Majdanek et dans deux camps de travail forcé, avant d’être libérée par les Soviétiques.

Ci-dessous des extraits d’une interview qu’elle donna en 1990 et où elle déclarait « La seule ‘f’aute’ des Palestiniens est d’être nés sur leur propre terre… Ils sont innocents et font preuve d’une résilience extraordinaire. »

Tous les membres de la famille de Maryla Husyt Finkelstein ont été exterminés. Après la guerre, elle témoigna lors d’une audience sur les déportations nazies aux États-Unis et au procès des gardiens de Majdanek en Allemagne. Son mari, Zacharias Finkelstein, survécut lui aussi au ghetto de Varsovie, à Auschwitz et à la marche de la mort d’Auschwitz. Toute sa famille fut également exterminée.

En avril 1990, à l’occasion du 47ᵉ anniversaire du soulèvement du ghetto de Varsovie, Maryla se confia à Amy Goodman sur la radio WBAI, 99,5 FM, à New York, au sujet de ce qu’elle avait enduré. Son témoignage sur la faim, l’enfermement et le deuil face au siège nazi impitoyable évoque aujourd’hui la situation de Gaza. Sa condamnation farouche de l’instrumentalisation de l’Holocauste pour excuser les crimes commis par Israël sont plus nécessaires que jamais aujourd’hui, après la démonstration que le slogan « Plus jamais ça » n’a jamais été qu’un paravent pour justifier le génocide des Palestiniens. 

Maryla Husyt Finkelstein : (…) La population du ghetto se jeta dans la construction de bunkers et de cachettes..Le « 13e » [police juive collaborationniste surnommée ainsi car ses locaux étaient au 13 rue Leszno] et le Judenrat [conseils juifs eux aussi collaborationnistes] livraient aux Allemands l’emplacement de nos cachettes. Ils étaient en contact permanent avec les Allemands, qui les avaient mis en place. Ils constituaient l’instance chargée de traiter avec les Juifs. La situation devint si notoire et si insupportable que l’organisation juive adopta simplement une résolution : les tuer. Et ils furent tués, abattus en pleine rue. Qui ? Les membres du Judenrat, les traîtres, le chef de la police. Le premier exécuté fut un Juif qui travaillait pour le « 13e ».Et lorsqu’ils l’abattirent et qu’il s’effondra au sol, l’organisation juive – celui qui l’avait tué – laissa une note près de son corps : « À un chien, un chien est mort. »

En ce qui concerne précisément l’exécution des traîtres, il n’y avait pas d’autre issue. Et, aussi farouchement opposée que je sois à la peine capitale – de tout mon être et avec toute mon émotion – je veux vous dire qu’il n’existait aucun autre moyen de les arrêter. On les avait approchés. Les organisations juives les avaient exhortés [à cesser de collaborer avec les nazis]. Eh bien, il était évident que leur présence jouait contre nous. .

 (…) Dans le ghetto de Varsovie, un mort était considéré comme un élu. Les gens étaient religieux et disaient que Dieu avait enfin mis fin à son supplice et à son martyre.

(…) Il n’y avait pas de munitions, à part pour sept ou huit armes à feu dans tout le ghetto. Oui, les Juifs fabriquaient des cocktails Molotov, et parfois ils recouraient au sabotage, incendiant des lieux où les Allemands entassaient ce qu’ils jugeaient précieux.

Mais tout ce dont on parle, les choses que vous lisez dans les livres… non, ce n’était pas cela. Le monde entier nous avait abandonnés. Je me souviens de tant d’occasions où je compris, encore et encore, que le monde – les puissances, les gouvernements qui dirigeaient le monde – avaient accepté notre extermination. Car rien n’est jamais venu de nulle part. Un sac de farine, un sac de blé, aurait même rendu notre marche vers la mort un peu moins terrible. Nous avons été absolument trahis.

C’était tellement absurde, car certains, dans le ghetto, pouvaient croire que le monde entier ressemblait au ghetto. Mais non, hors du ghetto, il y avait un gouvernement polonais avec des ambassadeurs – peut-être pas d’Angleterre –, il y avait les églises, le pape savait parfaitement tout, et les Américains n’étaient pas des dirigeants impuissants à cette époque.

Vous voyez, je veux expliquer pourquoi je suis un peu critique. En accordant tant de gloire à ce soulèvement, en laissant les gens raconter les munitions qu’ils possédaient, on perd la… vérité. Et la vérité, c’est que nous étions terriblement impuissants, émaciés, affamés, malades, entourés de mort, la mort dans nos familles, tout était coupé, toute résistance héroïque, tout héroïsme qu’on voudrait y voir. Non, ce n’était pas ainsi. L’héroïsme, c’était accompagner sa sœur ou sa mère jusqu’au train, en sachant que, dans une heure ou deux, on serait mort. Mais il n’y a rien eu de ce que vous connaissez, ces [prétendus] combats de cow-boys… non. C’était une extermination. Ce n’était pas un combat. C’était une extermination.

(…) Le ghetto fut bombardé dès le début, quand les Allemands arrivèrent. Du 9 au 21 septembre, Varsovie fut encerclée par les Allemands, qui donnèrent un ultimatum au bourgmestre polonais : livrer la ville. Le maire refusa. Alors ils attaquèrent pendant trois jours, et les avions lâchèrent des bombes… Voilà ma réponse à la destruction progressive de Varsovie : lorsqu’ils sont finalement entrés, il n’y avait déjà plus de murs… la ville était détruite, surtout le quartier juif. Et puis, tandis que les combats continuaient, ils détruisirent le ghetto de fond en comble. Et tout ce qui restait, c’était la misère… Vous savez, si vous vouliez du bois, il fallait briser les escaliers. Le ghetto était déjà anéanti. Nous savions que les Allemands allaient venir pour « nettoyer » le ghetto. Pour l’« assainir »… des Juifs.

Lorsque la première phase de l’insurrection s’est calmée, les Allemands ont commencé à incendier les maisons les unes après les autres, les aspergeant d’essence avant d’y mettre le feu. L’organisation juive de combat a alors perdu son bunker Nous sommes restés dans un bunker pendant un mois. Tandis qu’au-dessus, les combats faisaient rage.Exactement : du 17 avril au 13 mai. Et il a fallu deux jours pour que l’on m’envoie au camp de concentration de Majdanek.

Quand j’ai finalement été libérée, on m’a demandé si je pensais aller en Israël. Je ne suis pas sioniste. Mon cœur et ma sympathie vont au peuple palestinien.On entend souvent des Juifs américains et certains Israéliens invoquer la Shoah comme justification ou explication des politiques menées en Cisjordanie et à Gaza.L’histoire se répète, hein ?

Écoutez, je vais être très brève. Les personnes qui prétendent parler au nom du peuple juif sont simples et ignorantes. Elles n’ont aucun droit de parler de la Shoah. Ce sont tous des menteurs, des imposteurs. S’ils avaient traversé ce que j’ai traversé — ce qu’un autre comme moi a traversé — jamais ils n’accepteraient une telle attitude sanguinaire. Il m’arrive d’assister à des réunions. Et alors, je voudrais être celle qui, pour l’amour de l’histoire, prendra la parole au nom de ceux qui s’opposent à ces politiques [de colonisation israélienne de la Palestine]. Mais on m’empêche toujours de parler. On me réduit au silence, ou on m’expulse carrément de la salle. On ne me laisse pas témoigner.

Laissez-moi simplement vous dire que la seule et unique « faute » du peuple palestinien, c’est d’être né sur cette terre. Je ne crois pas que cela mérite la persécution. Ils sont innocents. Ils font preuve d’une résilience immense. Je leur souhaite, du plus profond de mon cœur, une vie paisible et heureuse. Si je le pouvais, je les étreindrais tous dans mes bras.« 

Source : normanfinkelstein.com

professeur Norman Finkelstein, autorité mondiale sur la question palestinienne, banni des universités américaines pour son engagement.

Traduction et notes entre crochets par Alain Marshal

CAPJPO-Europalestine

Partagez: