Du 6 au 15 décembre dernier, une équipe de médecins comprenant les Pr. Christophe Oberlin, Bernard Ciritsis, Christophe Denantes et Samir Benallou, a mené sa 18me mission de chirurgie réparatrice des lésions périphériques à Khan Younes, dans des conditions difficiles et dans la tristesse à l’annonce du décès d’un de leurs confrères palestiniens. Le Pr. Oberlin, indique que son équipe a été très choquée d’apprendre que l’un de ses élèves, le Dr Samir E Jazi, 38 ans, a été tué le 27 novembre, à son domicile de Rafah par l’armée israélienne. Il devait faire partie de la prochaine session d’initiation à la microchirurgie.
Samir E. Jazi était marié, père de 2 enfants, un garçon et une fille, et avait en charge ses deux parents âgés. Il était diplômé du German Medical College. Il a fait partie de l’hôpital Nasser de Khan Younis comme résident dans le département des urgences pendant 2 ans avant de rejoindre le service d’orthopédie. Sérieux au travail, apprécié des patients, il était discret et attentif. Il participait médicalement au traitement des patients blessés, et a sauvé de nombreuses vies.
Il souffrait particulièrement de l’occupation israélienne car sa maison, proche de la frontière était exposée régulièrement à des tirs. Il protégeait le coté face à la frontière avec des sacs de sable.
Le 27 novembre, à 21h, tandis qu’il était prêt à aller à l’hôpital, car il était de garde, il couchait sa fille à son domicile. Il a alors reçu à l’abdomen une balle explosive qui a entraîné une saignement massif du foie et de la veine cave. Transporté à l’hôpital de Rafah, il n’a pu être sauvé.
BUTS DE LA MISSION CHIRURGICALE
« Cette nouvelle mission avait pour premier objectif d’opérer une vingtaine de blessés à Gaza. Pour rappel, la mission d’octobre 2004 prévue sur Gaza avait du être détournée sur Naplouse du fait de l’attaque israélienne sur le camp de réfugié de Jabalia au nord de Gaza (3 semaines d’occupation, 140 morts et de très nombreux blessés). L’autre but était de faire passer à l’hôpital Nasser de Khan Younis le premier examen du diplôme de microchirurgie pour les chirurgiens palestiniens », indique le Pr. Oberlin à CAPJPO/EuroPalestine.
Premier obstacle rencontré : un des médecins de l’équipe a été retenu pendant 8 jours par l’armée israélienne au passage d’Eretz et n’a donc pu participer à la mission que le dernier jour.
(Un médecin de MSF chargée de consultation de médecine générale dans les zones les plus bouclées a également signalé des tirs d’intimidation de soldats israéliens à l’intention de son équipe lors de certains passages. )
Du mercredi 8 au dimanche 12 décembre, 20 patients souffrant pour la plupart de lésions ballistiques, ont été opérés, 4 par jour en moyenne, avec de longues journées opératoires (8h-20h). Entre les interventions, le chirurgien consulte tandis que l’infirmier et l’anesthésiste préparent la salle et le malade pour l’intervention suivante. Le plus jeune patient avait 2 ans, le plus âgé 31 ans et 6 avaient moins de 15 ans.
Le lundi 13 décembre, l’équipe s’est rendue à Khan Younis pour faire passer l’examen du diplôme de microchirurgie, le ministère de la Santé palestinien ayant sélectionné, 6 chirurgiens, 3 de Gaza et 3 de Khan Younis.
Mais les 60 heures de pratique individuelle n’ont pas été possible pour les 3 chirurgiens de Gaza qui n’ont pu se déplacer sur Khan Younis en raison des barrages israéliens. Et en plus, l’accès à la ville de Khan Younis était fermé en ce 13 décembre par l’armée israélienne. L’équipe a donc été contrainte d’organiser un examen au pied levé à l’hôpital Shiffa qui s’est déroulé exactement dans les mêmes conditions que l’examen parisien (Suture chez un lapin anesthésié par Christophe Denantes d’une aorte abdominale et d’une carotide en termino terminal, et greffe du nerf sciatique par le nerf opposé, le tout en 3 heures). Le Dr Rantissi a été reçu, avec la note de 14/20, et son diplôme lui sera adressé ultérieurement. Pour le Dr Aimen El Astal, une session sera organisée, en avril 2005 et il peut bénéficier de son inscription universitaire.
« Le bilan des missions approche les 350 opérés, précise le Pr. Oberlin. Surtout notre programme de formation commence à porter ses fruits. Le Dr Rantissi a ainsi été aidé sur la plupart des interventions palliatives que nous avons faites au cours de cette dernière mission. Il est maintenant diplômé de microchirurgie et l’administration palestinienne prévoit de lui confier la responsabilité d’une unité de chirurgie des paralysies à l’hôpital Nasser de Khan Younis, aboutissement logique de nos efforts. »