Nous publions ci-dessous la lettre ouverte adressée par le Dr. Badia Benjelloun à Philippe Douste-Blazy, parrain (au sens propre et figuré) du Congrès de victimologie pédiatrique qui doit se dérouler à Toulouse du 21 au 23 mars, trois jours pendant lesquels il ne sera question que des enfants israéliens et à aucun moment des victimes palestiniennes.
« Monsieur le Ministre et cher confrère,
Parce que vous participez, en tant qu’organisateur associé à un congrès consacré aux enfants victimes « d’un conflit », je me permets de vous rappeler l’article 20 du code de déontologie médicale qui nous impose de veiller à ce que notre qualité de médecin ne soit pas utilisée à des fins publicitaires et a fortiori de propagande.
Car comment qualifier autrement un colloque, financé par les deniers publics, dont le contenu ne s’intéresse qu’aux seules victimes du pays occupant, auteur de la violence première, celle de la colonisation ?
La guerre qui est faite au Peuple Palestinien, avec la complicité des puissances occidentales et aujourd’hui, par ce type d’opération de promotion de l’Etat qui passe outre toutes les résolutions de l’ONU émises à son endroit, avec leur cynisme, a conduit depuis quelques années à des conséquences dramatiques sur la santé physique et mentale des enfants de Palestine.
60% d’entre eux sont carencés et anémiés. 100% ont des troubles psychiques directement liés à l’occupation.
L’Occupation avec ses annexions de terres , ses 730 barrages militaires ses couvre-feux, et depuis 2002 le Mur de l’apartheid, rendent toute vie économique impossible.
L’accès aux écoles est devenu très difficile et le droit des enfants à l’ éducation et la scolarisation nié.
Depuis le début de l’Intifada , plus de 2500 enfants Palestiniens sont passés par les prisons de la Force occupante.
Aujourd’hui encore plus de 300 séjournent dans les geôles israeliennes; Ils sont torturés, sans droit de visite, sans accès aux soins, dans des conditions de détention des plus insalubres, et dans 90% des cas pour le motif allégué d’avoir jeté des pierres contre un char blindé.
Une organisation de médecins israéliens, Physicians for Human Rights, a eu le courage de dénoncer cela.
Veillerez-vous à ce que l’on traite de la chirurgie réparatrice qu’il faut entreprendre pour compenser les dégâts commis par les tireurs d’élite des forces militaires de l’Occupation qui jouent à concourir sur le niveau de précision de leurs tirs : le tiers supérieur de la jambe droite ou le coude gauche ?
Ou celle plus complexe encore nécessaire quand les blessés sont victimes des bombes à fragmentation lancées depuis les F16 sur les quartiers populaires des camps de réfugiés?
Vous n’aurez pas à comptabiliser les enfants tués sur le chemin de l’école ou chez eux. Nous le faisons tous les jours. Plus de 750 à ce jour en 4 ans.
Avec mes salutations les plus vigilantes et mes sentiments les plus confraternels, je vous demande d’annuler purement et simplement la tenue de ce congrès, dont la valeur scientifique est nulle et le projet politique certain, qui ne doit en aucun cas être cautionné par aucun médecin digne de ce nom.
Dr Badia Benjelloun
Paris
