Plus le mensonge est gros, plus il est répété et plus il a de chances de passer : c’est bien connu et le gouvernement israélien aurait tort de se gêner. Voici plusieurs mois que Sharon balade l’opinion publique internationale avec son futur « désengagement » de la Bande de Gaza en soulignant quotidinnement combien la tâche est délicate, difficile, pour ne pas dire insurmontable.
S’il ne tenait qu’à une colombe comme lui, cela serait déjà fait, bien entendu. Mais évacuer et reloger moins de
8000 colons sur les 450.000 installés dans les territoires occupés, s’avèrerait très compliqué. Comprenez bien
qu’il faut tenir compte de toutes les sensibilités politiques israéliennes, que la tension est grande, qu’une guerre civile peut éclater, qu’il risque sa propre vie…
De qui se moque-t-on au juste ?
A qui le gouvernement israélien veut-il faire croire qu’il est difficile d’évacuer les colons ? Il n’a qu’à leur
supprimer la protection militaire dont ils jouissent et pas un seul colon ne continuera à faire le fier et à pourrir la vie des Palestiniens, à leur voler leurs meilleures terres et leur eau.
Moins de 8.000 colons israéliens installés sur un tiers de la bande de Gaza (la partie la plus fertile, au hasard),
un déploiement militaire faramineux pour les « protéger », des routes de contournement réservées aux juifs, pendant
que 1,2 million de Palestiniens s’entassent sur le reste de cette étroite bande de terre, croupissent dans des camps de réfugiés ou forment des files d’attente interminable aux multiples check-points… et il faudrait que cela dure encore combien de temps ?
Quant au relogement des colons en Israël, il ne doit apparamment poser aucun problème puisque le gouvernement exprime régulièrement son souhait de voir plus de juifs de la diaspora venir s’installer en Israël.
Beaucoup de colons israéliens ont fait savoir depuis longtemps qu’ils sont prêts à accepter des compensations. Pourquoi le gouvernement israélien ne les leur verse-t-il pas ?
Et la minorité d’extremistes, de fanatiques qui fulminent, qui menacent, ou qui agressent les Palestiniens, n’est-ce pas parce qu’ils ont toujours été encouragés à se comporter ainsi ? Qui leur donne l’exemple en continuant à construire des logements pour colons dans les territoires occupés ? Qui a jamais sanctionné ceux qui blessent, qui tuent ou qui détruisent ce qui appartient aux Palestiniens ? Au contraire, à chaque fois qu’ils se conduisent ainsi, ce sont les Palestiniens qui sont punis : bouclages, couvre-feux, matraquages. On se souvient comment à Hébron, lorsque Baruch Goldstein, un colon, avait assassiné 24 Palestiniens en train de prier au Caveau des Patriarches en 1994, Rabin avait refusé de sévir contre les colons et avait en revanche bouclé les Palestiniens chez eux.
Et maintenant, alors qu’une minorité de colons d’extrême-droite annonce qu’elle se prépare à attaquer sur ‘Esplanade des Mosquées, que fait Sharon ? Il envoie la police réprimer les manifestants palestiniens « pour parer à d’éventuels troubles ».
Des dizaines de Palestiniens ont été blessés ce 9 mai et souffrent de fractures après avoir été battus par des policiers.
« Des centaines de manifestants ont tenté de bloquer la circulation aux abords de la Vieille ville, et nous avons
été contraints d’avoir recours à des tirs de grenades assourdissantes après les avoir vainement appelés à se
disperser », a déclaré à l’AFP le porte-parole de la police, Shmolik ben Ruby.
Quelque 5.000 fidèles étaient simplement rassemblés sur l’Esplanade, pour défendre ce site sacré contre toute intrusion d’une poignée de militants du groupuscule d’extrême droite Revava. Qu’a fait la police israélienne ? Elle a empêché tous les musulmans de moins de 45 ans d’entrer dans la Mosquée, se permettant de contrôler les identités des Palestiniens entrant dans la Vieille ville.
Le mufti de Jérusalem, Ekremah Sabri, a accusé l’occupant d' »entretenir délibérément la tension » autour de l’Esplanade dans une tentative de « s’ingérer dans sa gestion ». « La police devrait sanctionner les fauteurs des troubles qui sont les extrémistes juifs et non pas les musulmans », a-t-il déclaré à l’AFP.
Mais le dernier mot revient aujourd’hui à Shimon Peres, qui vient de déclarer que le retrait de la Bande de Gaza « n’était pas encore acquis » et pouvait même être « compromis » si les maisons des colons de la région devaient être démolies. « Nous parlons de 12 millions de tonnes de gravats. Il faudrait trois mois pour les dégager, et cela nous coûterait 250 millions de shekels (57 millions de dollars). Il faudrait aussi trouver un endroit en Israël qui puisse servir de décharge, ce qui en soi pourrait ruiner le plan de désengagement », a affirmé Peres au quotidien Jerusalem Post.
Mais qui s’apprête à démolir les maisons des colons ? Ces derniers ? Et le gouvernement israélien qui réussit à contrôler chaque instant de la vie de plusieurs millions de Palestiniens, qui dispose d’une des plus grandes puissances militaires au monde, ne serait pas capable de les en empêcher ?
