Une nouvelle est tombée vendredi matin, comme la presse moutonnière les adore : la mort du général Marcel Bigeard, à son domicile de Toul (Meurthe-et-Moselle), à l’âge de 94 ans.
Réglées comme des métronomes, les rédactions n’ont plus qu’à sortir les « nécros » préparées de longue date à la gloire de cet homme, tandis que les politiques vont pondre l’un après l’autre des communiqués d’hommage au « combattant éternel », au « résistant », voire, et c’est un comble, au « rebelle de toujours ».
Personne ou presque ne relèvera que l’homme qui vient de mourir dans son lit a incarné, dans la deuxième partie du XXème siècle, les soubresauts sanglants d’un impérialisme français décadent.
Car les titres de « gloire » de Bigeard, c’est en servant les causes criminelles du colonialisme français qu’il les avait acquis.
Au Vietnam d’abord, lorsque l’armée française avait tenté, au prix de massacres sans nom, à maintenir sa domination sur tout un peuple. Mais en vain : en mai 1954, les indigènes infligèrent une défaite sans appel à l’armée coloniale retranchée dans ses fortins de Dien Bien Phu, obligeant la France à renoncer, la honte au front, à ses possessions d’Indochine.
Marcel Bigeard se retrouva ensuite en Algérie où la guerre d’indépendance venait d’éclater. Les gazettes ne manqueront pas de nous le montrer, « crapahutant dans le djebel », avec ses parachutistes coloniaux. Elles se feront plus discrètes sur le rôle du colonel Bigeard dans la Bataille d’Alger, vaste opération terroriste ordonnée par le gouvernement (« de gauche », à l’époque) à ses soudards : si le patron de la Bataille d’Alger, le général Jacques Massu, avait fini par exprimer ses remords quant à l’emploi systématique de la torture contre le peuple algérien, Bigeard, lui, n’a jamais eu un mot d’excuses, alors que sa responsabilité opérationnelle dans de tels crimes était pourtant engagée.
Pire, au cours de ces dernières années, et bien qu’un demi-siècle nous sépare désormais de la guerre d’Algérie, le vieux Bigeard avait encore conservé assez de hargne pour s’opposer à toute tentative, même timide, de reconnaissance des crimes passés de l’armée française.
Alors un peu de pudeur, s’il vous plaît.
CAPJPO-EuroPalestine