Interview de la Vice-présidente du Parlement européen, l’écologiste belge Isabelle Durant, de retour de Palestine, par Baudoin Loos du journal belge Le Soir.
Isabelle Durant : « Il faut de vraies pressions sur Israël »
Baudouin Loos
« Vice-président du Parlement européen, l’écologiste belge Isabelle Durant revient de Palestine, où elle a assisté ces derniers jours à une conférence sur la thématique des prisonniers palestiniens en Israël. Elle nous a confié ses impressions à son retour.
© Sylvain Piraux/Le soir
Dans quel contexte vous êtes-vous déplacée à Ramallah ?
En tant que représentante du président du Parlement européen Martin Schultz, je suis allée participer à la conférence « Freedom and Dignity » organisée à l’occasion du 11e anniversaire de la captivité du député du Fatah Marwan Barghouti (condamné en 2004 à la prison à vie pour meurtres pendant la seconde intifada par un tribunal israélien qu’il a refusé de reconnaître, NDLR). Je n’étais pas le seul élu européen, il y avait d’ailleurs aussi des députés du monde entier, du Chili, d’Afrique du Sud, etc.
La question de prisonniers n’est pas secondaire mais centrale pour les Palestiniens. Ils sont encore quelque 4.900 dans les prisons israéliennes, il y a eu des décès suspects, plusieurs prisonniers sont en grève de la faim : c’est un dossier qui devrait donner lieu à de vraies pressions sur Israël, notamment à propos des cas de détention administrative (des incarcérations de six mois renouvelées parfois indéfiniment, sans inculpation ni procès, NDLR).
Comment avez-vous trouvé les responsables palestiniens rencontrés ?
J’ai pu voir pas mal de monde, dont le Premier ministre démissionnaire Salam Fayyad. J’ai aussi découvert des jeunes Palestiniens énergiques, lucides et motivés. L’une de leurs priorités se révèle un but très ardu : la réconciliation interpalestinienne. Il n’y avait par exemple pas de représentants du Hamas (les islamistes qui dominent à Gaza, NDLR) à cette conférence, ce qui est symptomatique.
Je me suis rendue à Hébron et à Jérusalem-Est ; j’ai pu constater que la colonisation israélienne dans les territoires palestiniens se poursuit sans désemparer, y compris dans le quartier arabe de la vieille ville. Je crois que la communauté internationale doit définir une stratégie vis-à-vis de ce problème qui mine la solution des deux Etats côte à côte. Et la question des prisonniers doit faire partie de la stratégie. L’internationalisation de la cause, par le biais de l’accession à l’ONU comme Etat observateur, par exemple, permet de gagner des batailles auprès de l’opinion publique.
Avez-vous également vu des Israéliens ?
C’était mon souhait même si ce n’était pas le but de mon voyage. J’ai pu rencontrer des membres d’ONG israéliennes et une députée arabe, Hanin Zoabi, mais les rendez-vous sollicités auprès d’autres députés à la Knesset n’ont pu aboutir pour des problèmes d’agenda ; ce n’est que partie remise, j’espère. Je sais que l’action du Parlement européen n’est pas bien perçue en Israël. Pourtant, quand notre parlement adopte une résolution, comme celle sur les prisonniers palestiniens du 14 mars dernier, nous ne nous positionnons pas contre Israël mais contre la politique menée par son gouvernement, notamment la prolongation de l’occupation. Mais nous sommes pour le dialogue, bien entendu. Nous avons croisé des juifs européens membres de « J-Call », un mouvement en faveur de la paix avec qui nous avons des affinités.
J’ignore en tout cas pourquoi notre arrivée à Tel-Aviv s’est passée de si curieuse manière : plusieurs de mes collègues députés et moi-même avons été retenus pendant cinq heures dans un salon à l’aéroport sans explications…
De mon côté, j’ai aussi profité de ce voyage pour découvrir pour la première fois Yad Vashem, le musée de la Shoah, qui est un exceptionnel lieu de mémoire.
http://www.lesoir.be/236054/article/actualite/monde/2013-05-02/isabelle-durant-il-faut-vraies-pressions-sur-israel
CAPJPO-EuroPalestine