« Il y a urgence, nous sommes à deux doigts d’un génocide comme on n’en a plus connu depuis des années », a alerté l’avocat Michael Mansfield, jeudi, à l’occasion d’une session extraordinaire du Tribunal Russell sur la Palestine, qui s’est tenue à Bruxelles.
Les témoignages recueillis permettent au Tribunal Russell d’affirmer que l’Etat hébreu s’est rendu coupable, lors de l’opération « bordure protectrice » lancée début juillet, de crimes contre l’humanité tels que le meurtre, l’extermination et la persécution, et de crimes de guerre tels que des exécutions délibérées, destructions injustifiées, attaques dirigées intentionnellement contre des civils ou encore un usage disproportionné de la force.
« Il ne s’agit pas d’une guerre entre deux Etats, Israël est l’occupant et ne peut prétendre à l’auto-défense. A contrario, le droit international autorise une population à résister à une occupation », souligne le Tribunal.
« Ce fut une journée choquante qui nous a laissés estomaqués, ces témoignages ne peuvent être ignorés », a commenté le réalisateur Ken Loach, qui a insisté sur la rhétorique de destruction qui prévaut au sein d’une partie de la classe politique israélienne et qui fournit, selon le Tribunal, le cadre dans lequel s’inscrivent les crimes perpétrés à Gaza.
Le Tribunal Russell conclut que le crime d’incitation au génocide et des crimes contre l’humanité ont été commis à Gaza
Il a également conclu, à l’écoute de nombreux témoignages, que le discours employé à différents niveaux de la société israélienne pendant l’été 2014 avait parfois atteint le seuil nécessaire pour pourvoir le qualifier d’incitation directe et publique au génocide.
Afin de rendre ses conclusions, le Jury a entendu les témoignages des journalistes Mohammed Omer, Max Blumenthal, David Sheen, Martin Lejeune, Eran Efrati et Paul Mason, présents à Gaza durant l’Opération Bordure Protectrice. Ils ont également entendu les récits des chirurgiens Mads Gilbert et Mohammed Abou Arab, de l’expert sur le crime de génocide Paul Behrens, du Colonel Desmond Travers et d’Ivan Karakashian, chargé du plaidoyer pour Defence for Children International.
Crimes de guerre. Le Tribunal a conclu que les crimes de guerre suivants ont été perpétrés par l’armée israélienne : l’homicide intentionnel, la destruction de biens, non justifiée par des nécessités militaires et exécutée sur une grande échelle; le fait de diriger intentionnellement des attaques contre la population civile en tant que telle ou contre des civils qui ne participent pas directement part aux hostilités ; l’utilisation disproportionnée de la force, le fait de diriger intentionnellement des attaques contre des bâtiments consacrés à la religion, à l’enseignement et des hôpitaux qui ne sont pas des cibles militaires ; l’utilisation de Palestiniens comme boucliers humains ; le fait d’employer les armes, projectiles, matières et méthodes de guerre de nature à causer des maux superflus ou des souffrances inutiles ou à frapper sans discrimination en violation du droit international des conflits armés ; et l’utilisation de la violence dans le but principal est de répandre la terreur parmi la population civile.
Crimes contre l’humanité. Le Tribunal a conclu que les crimes contre l’humanité suivants ont été commis par l’armée israélienne : meurtre, persécution et extermination.
Crime d’incitation au génocide. Le Tribunal a reçu des preuves qui démontrent l’intensification de la rhétorique raciste et l’incitation à la violence durant l’été 2014, à différents échelons de la société israélienne : dans les médias traditionnels ou sociaux et par des officiers de police, des leaders religieux, des représentants publics et des fans de football, notamment.
LDe plus, « l’effet cumulatif du régime prolongé de punition collective à Gaza semble infliger les conditions de vie calculées pour entrainer la destruction graduelle des Palestiniens en tant que groupe à Gaza ». Le Jury a ajouté : « nous avons sincèrement peur que dans un environnement d’impunité et d’absence de sanctions pour des crimes graves et répétés, les leçons du Rwanda et d’autres atrocités de masse, restent lettre morte ».
Le Tribunal a appelé Israël à respecter ses obligations en droit international et la Palestine à accéder sans délais au statut de Rome de la Cour pénale internationale. Il a rappelé qu’il était du devoir des Etats tiers de coopérer afin de mettre fin à la situation illégale qui découle de la situation d’occupation, du blocus et des crimes commis dans la Bande de Gaza. Il a également appelé l’Union européenne à adopter des sanctions à l’encontre d’Israël, en ligne avec sa politique sur les mesures restrictives, afin de poursuivre les objectifs de préservation de la paix, de renforcement de la sécurité internationale et de respect des droits de l’homme. Le Tribunal a également appelé l’UE à exclure les entreprises israéliennes d’armement des programmes de recherche européens.
Le RToP a enfin adressé des recommandations à l’Egypte, concernant la levée du blocus.
« Des lois et conventions existent, il faut les faire respecter », a martelé l’artiste Roger Waters.
Les conclusions sont disponibles ici.
Membres du Jury : http://www.russelltribunalonpalestine.com/en/sessions/extraordinary-session-brussels/meet-the-jury Témoins: http://www.russelltribunalonpalestine.com/en/sessions/extraordinary-session-brussels/witnesses
Avec l’Agence de presse Belga
CAPJPO-EuroPalestine