« Qu’arrive-t-il à deux millions d’êtres humains privés d’électricité presque tout le temps, de nuit comme de jour ? C’est ce qu’expérimente Gaza. L’une des plus grandes expériences, impliquant des sujets humains jamais réalisée, est en train de se dérouler actuellement sous nos yeux, et le monde entier regarde les bras croisés. »
Le journaliste israélien tire à nouveau la sonnette d’alarme sur la situation à Gaza, dans un article, dont nous publions plusieurs extraits.
( Photo : 16 avril 2015, dans une décharge publique à Rafah, au sud de la bande de Gaza, un jeune palestinien fouille dans un tas de déchets à la recherche, entre autres, d’objets recyclables qu’il espère vendre (AFP).
Ce projet vient d’atteindre son paroxysme dans l’indifférence générale. Il s’agit d’une expérience sur êtres humains pour laquelle aucune des institutions scientifiques internationales n’a obtenu l’approbation de la déclaration d’Helsinki. Son but ? Examiner les comportements humains dans des situations de tension extrême et de privations.
Il ne s’agit pas d’un groupe expérimental de quelques dizaines, centaines, ni de milliers ou dizaines de milliers, ni même de centaines de milliers des personnes. Les sujets de cette expérience ne sont pas moins de deux millions d’êtres humains.
Jusqu’à présent, ils ont réussi d’une façon stupéfiante à résister à cette épreuve. Évidemment, on a certes constaté quelques turbulences dans la cocotte minute à l’intérieur de laquelle ils sont confinés, mais elle n’a pas encore explosé. La bande de Gaza est sous observation afin de déterminer quand et comment elle finira par exploser. Ce n’est visiblement qu’une question de temps.
Voici comment est présentée cette expérience par Israël, l’Autorité palestinienne et l’Égypte : qu’arrive-t-il quand deux millions d’êtres humains sont privés d’électricité presque tout le temps, de jour comme de nuit ? Que leur arrive-t-il en hiver et au printemps, et surtout maintenant que frappe la terrible chaleur de l’été au Moyen-Orient ?
Cette expérience, comme toutes celles de ce genre, s’échelonne en une succession de phases. On va faire cuire la grenouille dans de l’eau chauffée, progressivement, jusqu’à ébullition.
Pour commencer, Gaza fut privée d’électricité pendant environ huit heures sur 24, puis environ douze heures, et maintenant le temps de privation d’électricité a été porté à un tel niveau que les deux millions d’habitants de Gaza n’en disposent qu’environ 2 heures et demi sur 24. Examinons-en maintenant les effets sur les sujets. Voyons comment ils réagissent. Et que se passe-t-il quand on leur accorde l’électricité pendant seulement une heure par jour ? Ou pourquoi pas une heure par semaine ? Cette expérience n’en est qu’à ses débuts et personne ne peut prévoir comment elle va tourner.
Au cours de la dernière décennie, cette bande de terre malmenée s’est aussi transformée en une cage – la plus grande cage sur terre. (…)
Des Palestiniens déambulent dans une rue du camp de réfugiés d’Al-Shati (ville de Gaza) pendant une panne d’électricité, le 11 juin (AFP)
On peine à concevoir la vie quotidienne, dans cette chaleur oppressante, avec seulement deux heures et demie d’électricité dans la journée. Comment imaginer conserver la nourriture ? On frémit à la pensée de toutes ces tâches ordinaires à accomplir sans électricité. Imaginez toutes ces personnes hospitalisées dont la vie dépend de l’électricité : c’est affreux.
Récemment, un article paru dans Haaretz (le 4 juin) de Mohammed Azaizeh, qui travaille pour Gisha, une organisation israélienne de défense des droits de l’homme, a décrit ce qui se passait à l’Hôpital d’Al-Rantisi à Gaza.
Au service pédiatrie, les enfants sont placés sous respirateur, mais comme l’électricité n’est disponible que quelques heures par jour, leur vie tient désormais au bon fonctionnement d’un générateur – qui parfois tombe en panne. Le directeur de l’hôpital, Dr Muhammad Abu Sulwaya donne une description catastrophique de son établissement. La situation est évidemment similaire dans tous les autres à Gaza.
À cause du manque d’électricité, l’eau propre manque et les égouts débordent d’eaux non traités qui inondent les rues. Gaza a l’habitude d’une telle situation, mais même l’incroyable et incomparable résilience des Gazaouis a ses limites.(…)
Gaza se meurt, lentement. Ses souffrances n’intéressent personne ailleurs. Personne à Washington, Bruxelles, Jérusalem ou au Caire, ni même à Ramallah. Aussi incroyable que cela puisse paraître, visiblement personne ne se soucie du sort de deux millions de personnes, abandonnées aux ténèbres la nuit et à la chaleur oppressante des journées d’été, avec nulle part où se tourner et pas le moindre espoir. Aucun. »
(Traduction de l’anglais (original) par Dominique Macabies.)
Source : http://www.middleeasteye.net/fr/opinions/gaza-isra-l-fait-des-exp-rimentations-sur-des-humains-en-situation-de-stress-et-de
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