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ISRAEL : VOUS AVEZ DIT APARTHEID ? (BIS)

30 août – Nots amis Deborah Bernard et Haïssam Younès répondent, dans les contributions qui suivent, à un lecteur qui a récemment critiqué l’emploi du terme « apartheid » pour dénoncer la politique d’Israël à l’encontre du peuple palestinien (voir texte publié il y a quelques jours ce même site)


DEBORAH BERNARD :
« Un lecteur conteste qu’on puisse parler d’apartheid à propos des mesures qu’applique l’état d’Israël aux Palestiniens, au prétexte que « l’Afrique du Sud n’a rien à voir avec Israël ; les juifs réfugiés en Palestine en 48 et créant l’état d’Israël ne peuvent se comparer aux blancs colonisant sauvagement l’Afrique du Sud avec des lois apartheid »

A la base du sionisme herzlien, il y a bel et bien l’idée de colonisation, et ce sionisme-là est calqué sur le colonialisme allemand de cette époque, au tournant du XIXème siècle (Je parle du sionisme herzlien, parce que c’est hélas, celui qui a réussi. Mais Achad Haham , par exemple, défendait une autre forme de sionisme, qui faisait sa part aux Palestiniens).

Dans les années 1930, il y a eu des révoltes palestiniennes – bien avant la création de l’Etat – auxquelles ont répondu des actes terroristes juifs à l’encontre des civils palestiniens. Quand l’Etat d’Israël voit le jour en 1948, il ne s’agit pas d’un miracle ; certes, la mauvaise conscience occidentale trouve-là à se racheter, mais le travail préliminaire, lui, a commencé il y a déjà longtemps, nullement dans la douceur. Avec, sous-jacente, l’idée éminemment coloniale que certaines civilisations sont si supérieures aux autres, que celles-là sont faites pour dominer celles-ci.

De nos jours, Israël, au mépris de toute résolution de l’ONU qui ne lui convient pas, récusant ses frontières reconnues de 1967, cherche par tous les moyens à évacuer les Palestiniens. Quand ce n’est pas militairement pour « assurer sa sécurité » c’est par toutes sortes de mesures ségrégationnistes.

Hier encore, l’ancien ministre Shulamit Aloni faisait savoir combien elle était scandalisée de faire l’objet d’une enquête pour avoir « violé un ordre militaire datant de l’année 2000 interdisant aux Israéliens d’aller dans les « territoires tenus par les Palestiniens ».

Mais en quoi consiste la vie de tous les jours, pour les Palestiniens : Gaza est entouré de clôtures électriques sous surveillance militaire.
Les Palestiniens se déplacent-ils librement ? Non. Ils doivent présenter un permis de circuler qui se décline en fonction de la situation de tel ou tel.
Amira Hass, journaliste israélienne installée dans les territoires occupés indique : « c’est Israël qui dicte les règles, les besoins ; qui définit les catégories de chanceux qui pourront obtenir les laissez-passer, leur nombre et leur nature » et elle décrit ces laissez-passer valables pour passer une nuit en Israël, et d’autres laissez-passer qui exigent de quitter Israël dès la tombée de la nuit, (…) certains peuvent se rendre en Israël et en Cisjordanie, d’autres » etc…

De toutes façons, les routes de contournement – construites pour la sécurité des colons – isolent les Palestiniens. ( Mais Il y va de la sécurité d’israël » va-t-on immédiatement me répondre d’un ton choqué ; manière facile de détourner la question. Au lieu se préoccuper de la seule sécurité d’Israël on pourrait assurer simultanément et également celle des Palestiniens. Mais, Golda Meir ne disait-elle pas « Les Palestiniens, ça n ‘existe pas » ?)

Une proposition de loi récente vise à renforcer les interdictions faites aux Arabes israéliens d’acheter des terres en Israël.

Les Palestiniens d’Israël veulent-ils construire ? Ils attendront longtemps le permis. Et si lassés ils construisent quand même, on démolira leurs maisons

Quant aux enfants palestiniens « Israël pratique une discrimination systématique à l’encontre des citoyens arabes palestiniens dans son système scolaire public » déclarait Human Rights Watch dans un rapport de décembre 2001. « Sur pratiquement tous les points, les enfants arabes palestiniens reçoivent un enseignement de qualité inférieure à celui des enfants juifs (…) Le Ministère de l’Education n’attribue pas autant d’argent par tête pour les enfants arabes et palestiniens que pour les enfants juifs(…) »

Les femmes enceintes partant pour accoucher, sont retenues aux barrages. Conséquences, un certain nombre d’enfants palestiniens sont morts-nés et mourront encore pour cette sinistre raison.

Quant aux ressources – électricité, eau, téléphone – toutes sont entre les mains des israéliens. L’eau ? A Hébron (450 colons et 150 000 palestiniens) la proportion est de 1 pour dix en plein été. A Gaza, 1 150 000 palestiniens se voient attribuer 10% des ressources en eau.

L’internet aussi : j’en sais personnellement quelque chose. Il arrive que les installations de l’Internet palestinien soient coupées par Israël, à sa guise.

Fille d’un homme et d’une femme exterminés par les nazis, ayant été un enfant caché, je m‘interroge depuis longtemps sur ce qui a permis, il y a soixante ans, à des millions de gens dans le monde de perdre toute espèce de sens moral ; je continue de m’interroger sur ce qui se passe aujourd’hui en Israël-Palestine au vu et au su du monde entier, et qui n’émeut pas grand monde. On ne pourra plus prétendre qu’on « ne savait pas ».

L’archevêque d’Afrique du Sud et prix Nobel de la paix, Desmond Tutu déclarait ceci, en avril dernier : « J’ai été profondément désespéré lors de ma visite en terre sainte ; ça m’a tellement rappelé ce qui nous est arrivé à nous, peuple noir en Afrique du Sud. J’ai vu l’humiliation des palestiniens aux checkpoints et aux barrages routiers, souffrant comme nous quand les jeunes officiers de la police blanche nous empêchaient de nous déplacer »

Et on ne devrait pas parler d’apartheid à propos d’Israël , on n’en aurait pas le droit,
pas le doit non plus, comme l’avait fait Yeshayahou Leibowitz, cette grande conscience israélienne, savant et théologien O combien intégre, de parler de « judéo nazisme » ?
Tabous.

Israël et apartheid, Israël et nazi, ce sont des mots qu’on ne peut pas lier, ce serait aussi obscène que de montrer ses fesses sous l’arc de Triomphe.

Je pense, moi, que l’obscénité c’est de refuser de voir ce qui crève les yeux, à savoir qu’Israël viole à longueur de temps le droit international et les droits de l’homme.

Quand en février dernier, un haut responsable militaire israélien déclare que contre les Palestiniens « on a le droit de s’inspirer des méthodes de nos ennemis passés Y COMPRIS DES METHODES QUI FURENT EMPLOYEES DANS LE GHETTO DE VARSOVIE », ou quand un journaliste israélien appelle à la castration des Arabes, je n’entends pas les belles âmes professionnelles, ni les autres d’ailleurs, protester, elles si promptes à dénoncer la moindre atteinte à une personne juive. C’est ce silence qui est obscène.

Quel est donc ce statut qui fait d’Israël une manière de grand malade qui ne peut être considéré à l’égal des autres Etats et qui peut dire et faire ce qu’il veut, sous la protection de cet immense et monstrueux manteau de Noé qu’est l’Extermination, ?
Deborah Bernard


HAISSAM YOUNES
« J’ai lu avec intérêt l’avis de notre ami M. Georges Ouanounou sur le terme « apartheid » utilisé pour dénoncer la politique d’Israël.
Je souhaite lui conseiller la lecture d’un excellent livre sur le sujet, dont l’auteur (Marwan BISHARA) est le frère du député arabe israélien « Azmi BISHARA » :
Palestine/Israël : la paix ou l’apartheid aux éditions La découverte (6,40 €)
En outre, je comprend que le terme « apartheid » puisse choquer certaines personnes, mais la ségrégation pratiquée par Israël est,malheureusement bien réelle et la combattre ne veut pas dire la destruction de l’Etat d’Israël comme l’a compris notre ami (on n’a pas détruit l’Afrique du Sud en dénonçant et combattant l’apartheid !)
Bonne continuation et bon courage.
Haïssam YOUNES