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Yitzhak Rabin : tout sauf un homme de paix, par Amira Hass

A la veille des de la commémoration de l’assassinat d’Yitzhak Rabin, il y aura 25 ans le 4 novembre prochain, Amira Hass remet dans Haaretz quelques pendules à l’heure, sur le soi-disant « grand homme de paix », en titrant un article : « Les négociations sans fin, un héritage de Yitzhak Rabin ».

Yitzhak Rabin : tout sauf un homme de paix, par Amira Hass

Sans même avoir besoin de revenir sur les « exploits militaires » de celui qui participa au nettoyage ethnique de 1948-1949, puis au déclenchement de la « Guerre des six jours » avec le grade de général, et qui se distingua durant la première intifada par sa férocité contre les enfants palestiniens qui jetaient des pierres, en recommandant à l’armée d’occupation de leur « briser les os », la journaliste israélienne raconte ce que le premier ministre Rabin, avait promis au parlement, un mois avant sa mort.

« Assassiné par un sympathisant israélien de l’extrême droite, Rabin n’avait pourtant rien d’un pacifiste endurci. « Les affinités politiques de son meurtrier ne prouvent en rien que le premier ministre Yitzhak Rabin s’était éloigné de l’héritage et de l’establishment israéliens pour rechercher une paix véritable. Bien au contraire. 

Le 5 octobre 1995, un mois avant son meurtre, il donnait au parlement israélien les détails de l’accord intérimaire avec l’Organisation de Libération de la Palestine (OLP) . Rabin y exposait les principes de ce qu’il a appelé une «solution du statut final». Leur ressemblance avec la réalité d’aujourd’hui des enclaves palestiniennes et de l’annexion de facto de la plus grande partie de la Cisjordanie n’est pas un hasard. 

Les voici : 
1. Une entité palestinienne sera moins qu’un État. 

2. Pas de retour aux lignes du 4 juin 1967. 

3. Une Jérusalem unie, y compris les colonies de Ma’aleh Adumim et Givat Ze’ev, en tant que capitale d’Israël. 

4. La vallée du Jourdain, frontière de sécurité d’Israël. 

5. Gush Etzion, Efrat, Betar et d’autres colonies de Cisjordanie feront partie d’Israël. 

6. Des blocs de colonies comme Gush Katif dans la bande de Gaza seront établis en Cisjordanie. 

7. Israël représentera la majorité du territoire de la Palestine mandataire, car il est préférable que ce territoire soit juif plutôt que binational. 

Lors de cette session du parlement, Rabin a également déclaré: « Nous ne nous sommes engagés à aucun moment sur la portée du redéploiement.»  En d’autres termes, Israël veillera à ce que le territoire contrôlé par les Palestiniens soit aussi petit que possible. Et c’est bien ce qui est arrivé. 

De plus, a-t-il déclaré, « Nous avons promis au parlement de ne pas déloger une seule colonie durant l’accord intérimaire, et de ne pas geler leur construction ou leur croissance naturelle.»  

Quelqu’un qui dépense aujourd’hui des dizaines de millions de dollars pour la construction de blocs de colonies, d’infrastructures, de routes, de bâtiments et d’institutions publiques n’a pas l’intention de les démanteler demain – à moins qu’une puissante force politique ou économique n’émerge qui l’oblige à cesser de se moquer du droit international et de le violer. 

Une telle force politique aurait-elle pu naître dans les années 1990 contre le vieux déterminisme du colonialisme de peuplement ?  La plupart des Israéliens qui ont soutenu la paix et les droits des Palestiniens n’ont jamais pris la peine de s’intéresser aux détails. Certains pensaient que parler de paix créerait une «dynamique positive» ; certains ont ignoré les demandes fondamentales et raisonnables de l’OLP ; et certains considéraient les colonies comme une entreprise privée et temporaire d’un groupe spécifique plutôt que comme faisant partie de l’ADN de leur pays. 

L’OLP s’est embourbée tandis que l’union européenne améliorait ses relations avec Israël comme si ce pays avait déjà obéi aux résolutions de l’ONU et au droit international et s’était retiré des territoires occupés. Dans divers États arabes, les élites se préparaient déjà à de bonnes relations économiques avec Israël. 

Et cela a satisfait le secteur des affaires israélien, qui à l’époque avait poussé à un accord avec les Palestiniens pour ouvrir la voie à de nouveaux marchés, technologies et contrats internationaux. Si cela pouvait être réalisé uniquement par des négociations sans fin, sans paix, alors pourquoi pas ?  Et c’est ainsi que la route a été pavée pour les relations diplomatiques aujourd’hui achevées avec les États arabes. 

Que la droite ait cru ou non, à l’époque, qu’une telle force anti-colonialiste pouvait émerger, elle était assez intelligente pour créer une force politique opposée par l’activisme de rue, la propagande, l’intimidation, en forgeant des liens avec la droite américaine, et en décrivant les attaques palestiniennes comme une menace existentielle. 

Rabin a déclaré lors de la même session au parlement que ces attaques ne l’étaient pas, mais constituaient un obstacle à la mise en œuvre du processus de paix. Et ainsi, comme la plupart des Israéliens, il a rejeté la faute sur les dépossédés et les occupés. 

Son meurtre a été le point culminant de l’incitation à la colonisation. Il a accéléré et intensifié cette dynamique coloniale que Rabin avait énoncée dans ses principes pour une solution au statut final. « 

(Traduit par Sarah V. pour CAPJPO-EuroPalestine)

Source : https://www.haaretz.com/israel-news/.premium-the-legacy-of-endless-negotiations-1.9274308

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