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Palestine occupée : les crimes israéliens du 16 au 22 décembre

Deux meurtres, 48 blessés, dont 12 sérieusement, parmi lesquels 4 mineurs et un journaliste, 93 raflés, dont 13 mineurs et une femme, 97 raids contre villes et villages de Cisjordanie, 60 attaques des forces d’occupation contre des manifestants pacifiques, des pêcheurs ou des terres agricoles à Gaza… Bref, une semaine comme les autres en Palestine… 

Palestine occupée : les crimes israéliens du 16 au 22 décembre

Permis de tuer 

Tirer pour tuer, même en l’absence de danger pour les soldats, c’est la nouvelle norme dans l’armée la plus morale du monde (voir l’article https://europalestine.com/2021/12/22/le-gouvernement-israelien-donne-carte-blanche-pour-lassassinat-de-palestiniens-meme-lorsquils-ne-posent-aucun-danger/)

Mardi soir, à un checkpoint barrant l’entrée nord-est du village de Yabad, près de Jénine, Abdel Moussa, un jeune homme de 22 ans, meurt brûlé vif dans sa voiture. La victime aurait foncé en direction d’un blindé léger de l’armée et ses occupants auraient alors ouvert le feu, déclenchant l’incendie de la voiture. Faute de témoin, on ne dispose que de cette version officielle mais, vraie ou fausse, elle ne justifie pas que l’armée ait empêché les secours d’approcher, si bien que lorsque les Israéliens ont enfin retiré le corps du véhicule, il n’était plus que cendres. Une torture particulièrement cruelle qui, comme d’habitude, contrevient au droit international.

Mercredi soir, une Mazda avec trois personnes à bord est stationnée à proximité du camp de réfugiés d’al-Amari, à al-Bireh. Un blindé léger survient et stoppe à une cinquantaine de mètres de la voiture. Un soldat en descend, tire cinq balles et remonte dans le blindé qui repart aussitôt. Sur le siège arrière, Mohammed Abbas (26 ans) est touché dans le dos. La Mazda fonce alors vers l’hôpital de Ramallah mais Mohammed décède en salle d’opération. Selon la version de l’armée, la victime aurait tiré en direction de la colonie de Psagot (ilôt ultra-orthodoxe qui surplombe Ramallah, gardé par une base militaire et une clôture). Vu la distance qui sépare la colonie du lieu du crime, cette version parait peu vraisemblable selon l’enquête de terrain menée par le PCHR.  

Manifs sauvagement réprimées 

Vendredi midi, les habitants de Kafr Qaddoum, près de Qalqiliya, protestent pacifiquement contre le bouclage de leur village. L’occupant riposte avec son arsenal habituel et l’on dénombre, outre les suffocations, deux blessés par balles, dont un jeune de seize ans, atteint à l’épaule. Le lendemain, la même scène se répète. Cette fois, c’est un jeune de 17 ans qui est blessé à la tête, tandis qu’un homme de 25 ans est atteint à la poitrine.

A Sheikh Jarrah, un sit-in est organisé vendredi dans la cour de la maison des Salem, frappés d’expulsion au profit d’un certain Yossef, qui prétend avoir acheté la maison à une famille juive qui aurait vécu là avant 1948. Sauf que les prétendus droits de propriété de familles juives à Sheikh Jarrah n’existent que dans l’imagination des colons. En visite, Sven Kühn, chef de la mission de l’UE pour la Cisjordanie et Gaza, a reconnu lui-même que ces expulsions « violent le droit international » et sont « inacceptables ». Protestations qui restent platoniques, comme d’habitude.

En attendant, les coups et les bombes assourdissantes essuyés par les résistants à l’expulsion sont quant à eux bien réels. Mahmoud Illean peut en témoigner : blessé sous l’oeil gauche et ses lunettes brisées par un éclat de grenade assourdissante, ce photographe d’Associated Press est jeté à terre et tabassé avant de finir à l’hôpital. On attend toujours une réaction des USA, patrie de l’agence AP et défenseurs bien connus de la liberté de la presse, comme Julian Assange peut en témoigner.

Dans la foulée, les forces d’occupation raflent deux manifestants, dont le jeune Mohammed al-Kiswani (17 ans).* Dimanche matin, à Sa’ir, près d’Hébron, les occupants pourchassent un rassemblement de jeunes et d’étudiants. Un enfant de douze ans, Saber Jaradat, blessé à la jambe droite, est emmené dans un véhicule militaire. Cinq autres enfants nommés de la famille Jaradat, à savoir Abdel (10 ans), Jamal, Mohammed, Youssif (11 ans chacun) et Zaher (12 ans) sont enlevés et relâchés après une détention éprouvante.

Lundi après-midi, à Al-Mazra’a al-Gharbiya, au nord de Ramallah, Muhammad Shraitah (17 ans) est blessé à la main droite tandis que Muhammad Ladadoa, son aîné de deux ans, est touché au dos.  

Familles kidnappées 

Une fois de plus, le nombre de Palestiniens raflés par l’occupant approche la centaine. Le plus âgé, Mahmoud Shubeib, a 59 ans, le plus jeune, Karam Moussa, en a douze. Ahmed al-’Ajlouni et Omar al-Roshoq, kidnappés mardi à leur domicile de Bab Huta (porte du Pardon à Jérusalem), ont 17 ans tous les deux. Pour le crime d’avoir hissé un drapeau palestinien mardi sur l’esplanade des mosquées, Amir al-Bazlamit (13 ans), Amir al-Salayma (13 ans) et Hamza al-Ja’bari (12 ans) vont connaître à leur tour la prison et les sévices qui vont avec.

A Beit Ommar, au nord d’Hébron, Jamil Abu Ayyash (15 ans) est enlevé dans la nuit de mercredi.

Mardi à 7h20, c’est une femme de 40 ans, Samaher Atiya Zubaidat, qui est enlevée lors de la prise d’assaut de son foyer.Souvent, les arrestations se font en famille.

Dimanche à 15h, lors d’une manifestation à Kafr Malik, près de Ramallah, deux frères sont faits prisonniers : Adam et Abdul Farraj (14 et 15 ans).

Vendredi à 1h du matin, dans le quartier de Bab Huta, trois frères âgés de 20 à 27 ans sont emmenés en captivité : Ahmed, Mohammed et Ayman Ghushah.

Dimanche à 13h, à al-Khader, au sud de Bethléem, Fo’ad Moussa est arrêté alors qu’il tente de secourir son fils Karam (12 ans), kidnappé par les soldats.

Non loin de là à 23h, dans le camp de réfugiés d’Aida, Saleh As’ad Faraj et son frère sont enlevés lors de la prise d’assaut de leur domicile.

Lundi à 11h, à al-Dhahiriya (au sud d’Hébron), quatre frères âgés de 29 à 35 ans  sont enlevés de la même façon :  Mohammed, Ahmed, Wassim et Mo’taz al-’Aqabi.

Mercredi en pleine nuit, à Yatta, près d’Hébron, un père et ses deux fils figurent parmi les cinq personnes enlevées à leur domicile : il s’agit de Yasser al-Jundi (43 ans), de Yazan (20 ans) et de Yazid (18 ans).

 Nettoyage ethnique par le vide 

A Sheikh Jarrah, la judaïsation bat son plein. Comme 39 autres familles, les Salhiyia sont sommés de quitter leur terrain de 0,6 hectares acheté en 1967 et les deux maisons qu’ils y ont construites. Mahmoud, sa mère, sa femme, sa sœur et leurs neuf enfants sont jetés à la rue sous prétexte de construire une future école pour les colons. L’échéance est fixée au 25 janvier. Bon prince, la municipalité a proposé de retarder l’expulsion de 8 mois contre le renoncement des Salhiyia à leur propriété et le versement d’un loyer ! En attendant, la famille a déjà versé plus de 600 000 shekels d’amende (169 000 €, soit 45 fois le revenu annuel moyen palestinien), sans compter les honoraires d’avocat.

Mardi, à Jabel Mukaber, quartier sud-est de Jérusalem où se sont installées deux colonies, Mohammed Ja’abis détruit sa propre maison pour échapper aux frais de démolition exorbitants exigés par la municipalité. Il y vivait depuis vingt ans avec son père, puis avec sa femme et leurs quatre enfants.

A l’ouest de Bethléem, Nahalin, célèbre pour ses ruches, ses amandiers, ses oliviers, ses vignes… pourrait évoquer l’Eden s’il n’était une enclave entourée par cinq colonies ! De nombreux villageois résistants sont tombés en 1947, 1948, 1952, 1954, 1956, 1970, 1987…** L’occupant a déjà confisqué la majeure partie des terres du village, ne lui laissant que 700 hectares sur 2300. Aujourd’hui, ce sont 100 hectares supplémentaires qu’il s’apprête à voler, 300 autres hectares étant également menacés. Le schéma directeur israélien ne fait pas de quartier : 120 maisons doivent être abattues. Au cours des deux dernières semaines, quatre granges et des serres ont été rasées et il y en aurait eu davantage sans la résistance des villageois. Mardi, c’est la maison de deux étages de Atif Najajrah (marié, cinq enfants) qui y est passée malgré l’opposition des voisins sous le feu des balles et des lacrymos. 

Les démolitions peuvent aussi être motivées par des punitions collectives. Cette pratique indigne même un ancien procureur israélien (voir l’article https://europalestine.com/2021/12/25/un-juge-israelien-demissionne-a-cause-des-demolitions-de-maisons-palestiniennes-en-tant-que-represailles/).

On en a encore deux exemples cette semaine : lundi, à l’ouest de Jénine, le père et l’oncle de Ghaith et Omar Jaradat, emprisonnés pour une attaque contre des colons, ont dû détruire leurs propres maisons.  

Colons terroristes 

On dénombre cette semaine 39 attaques de colons. Les caillassages de voitures et de maisons palestiniennes sont légion mais il est à noter que, vendredi à la première heure, c’est avec le soutien de l’armée que le village de Burqa, près de Naplouse, est attaqué et que le local de Nizar Saif est incendié. Les attaques vont se répéter pendant deux jours. Au moins, c’est clair : l’armée est l’auxiliaire des colons – et réciproquement ! 

Vendredi, 3h30 du matin à Qaryut, près de Naplouse. Samiha Moqbel (52 ans) réveille son mari Wael (62 ans) : quelqu’un frappe à la porte. Wael descend, constate que la lucarne de la porte est cassée et aperçoit un officier israélien qui a l’air de malmener un jeune homme en sweater blanc, qu’il prend pour son fils. Il ouvre pour s’apercevoir que l’homme au sweater est en fait un colon. L’officier l’attrape par le cou et toute une bande de colons déboule dans la maison, saccageant tout à l’intérieur et à l’extérieur, notamment sa voiture et ses deux tracteurs. Quant à lui, il est roué de coups jusqu’à l’évanouissement. Sa femme est aspergée de gaz poivre avant de parvenir à se barricader dans la chambre. L’histoire s’achève à l’hôpital où les villageois venus à la rescousse l’ont conduit avec sa femme. Bilan : fractures à la cage thoracique et à la mâchoire, œil au beurre noir et ecchymoses sur tout le corps.

Vendredi soir, Raied Abu ‘Asab rentre de son travail à Jérusalem Ouest en direction de la vieille ville où il habite. Il tombe sur une clique de sept colons d’une quarantaine d’années qui l’injurient, l’aspergent de gaz poivre et le frappent avec un objet tranchant. Il se réveille à l’hôpital, blessé aux yeux et au nez, et on lui fait deux points de suture au front. Il souffre depuis de maux de tête nécessitant un suivi médical.

Samedi matin, dans la vieille ville d’Hébron, Sadiyia Farajallah (65 ans) est violemment frappée à la tête par un colon. Quand elle se réveille, c’est pour être conduite par l’armée au centre d’interrogatoire de la colonie de Kiryat Arba, le colon l’ayant accusée d’être une terroriste ! 

La Cisjordanie entravée 

Aux 108 points de contrôle permanents se sont ajoutés 69 checkpoints temporaires et 15 fermetures de points névralgiques pour compliquer encore un peu plus les déplacements à risque des habitants de Cisjordanie.  

Dans Gaza assiégée 

Les violations du cessez-le-feu par Israël continuent d’être quotidiennes. Tant que les Gazaouis ne ripostent pas, qui s’en émeut ? Ainsi, cette semaine :

– Alors qu’ils naviguent à moins de trois milles des côtes (la limite autorisée par les accords d’Oslo est de 20 milles), d’inoffensifs bateaux de pêche sont encore attaqués vendredi.

– Des terres agricoles sont encore visées par des soldats campés dans la « zone tmpon » vendredi, dimanche et mercredi.

– Des habitants à proximité de la ligne de séparation essuient des coups de feu samedi, lundi, mardi et mercredi.

– Des engins de chantier couverts par des véhicules militaires et des avions de reconnaissance pénètrent lundi et mardi en territoire gazaoui pour se livrer à des travaux de terrassement.

– Dimanche, au nord de Beit Lahia, des soldats pénétrent en territoire gazaoui pour kidnapper deux habitants, Abdullah al-Manay’a et Jehad Abu Jarad, accusés de posséder trois bombes artisanales… et un couteau. Les Gazaouis sont priés de manger avec des baguettes !

– Dimanche, deux Gazaouis non identifiés qui tentaient de fuir leur camp de concentration sont interceptés et enlevés à la frontière. 

* Source : Pierre Barbancey, L’Humanité.** Source : en.wikipedia

Compilé par Philippe G. pour CAPJPO-EuroPalestine à partir du Palestinian Centre for Human Rights (PCHR) et du Palestinian Monitoring Group (PMG): http://www.nad.ps/ .

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