« Comme si tout cela ne suffisait pas – les milliers d’enfants morts, le nombre de morts proche de 20 000, les centaines de milliers de personnes déracinées de leurs foyers, les dizaines de milliers de blessés et la famine, la maladie et la destruction à Gaza – en plus de cela, ils doivent aussi être humiliés.
Humiliés jusqu’à la moelle, pour qu’ils apprennent. Nous devons leur montrer (et à nous-mêmes) qui ils sont (et qui nous sommes). Pour montrer à quel point nous sommes forts et à quel point eux sont faibles. C’est bon pour le moral. C’est bon pour les soldats. C’est bon pour le front intérieur.
Il n’y a pas de meilleure preuve que nous nous sommes égarés que les tentatives méprisables d’humilier les Palestiniens aux yeux de tous.
Il n’y a pas de plus grande preuve de faiblesse morale que la nécessité de les humilier dans leur défaite.
Nous sommes comme le Hamas ; s’ils sont de tels monstres, alors nous le sommes aussi.
Après avoir effacé la vie des Gazaouis, leurs biens, leurs maisons et leurs enfants, nous allons désormais également écraser ce qui reste de leur dignité. Nous les forcerons à se mettre à genoux jusqu’à ce qu’ils se rendent. Quelques soldats sont masqués ; peut-être ont-ils honte de leur comportement ?
Selon certaines informations, les Gazaouis forcés à se déshabiller ont été retirés d’un abri de l’Office de secours et de travaux des Nations Unies à Beit Lahia et détenus pour interrogatoire. Personne ne sait avec certitude si l’un d’entre eux était membre du Hamas.
Après la photo de la victoire, ils ont été emmenés vers un lieu inconnu, leur sort étant incertain. Qui s’en soucie, à part leurs proches ?
A quoi ça sert ?
Ce n’est pas la première fois que l’armée israélienne dépouille ainsi les Palestiniens afin de les humilier. De telles « marches de la honte » ont eu lieu dans le passé dans la bande de Gaza, en Cisjordanie et au Liban. Des hommes recherchés et indésirables en caleçons, à la vue de tous.
Mais la vérité est que les images humilient les Forces de défense israéliennes bien plus qu’elles n’humilient leurs victimes nues.
À Gaza, nos forces ont détruit le bâtiment du Parlement et le palais de justice. Pourquoi ?
Dans le camp de réfugiés de Jénine, en Cisjordanie, ils ont détruit tous les monuments, y compris la « clé du retour » à son entrée. L’armée a également détruit et pillé le grand cheval de fer-blanc à l’entrée de l’hôpital, construit par un sculpteur allemand à partir des débris d’ambulances palestiniennes détruites, un monument aux morts.
A TulKarem, elle a démoli le mémorial de Yasser Arafat.
Bientôt, nous brûlerons aussi leur conscience. Et comble du grotesque : le commandant du 932e bataillon de la brigade d’infanterie Nahal, dans une vidéo de l’unité du porte-parole de Tsahal, exhibe la carte de crédit d’Ismail Haniyeh, qui a expiré en 2019. Félicitations à Tsahal ! »
Par Gideon Levy, journaliste à Haaretz
CAPJPO-EuroPalestine