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Mort d’Elias Khoury, un très grand romancier défenseur de la cause palestinienne

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Elias Khoury, l’un des plus grands romanciers libanais de sa génération, défenseur acharné de la cause palestinienne, est décédé des suites d’une longue maladie. Son œuvre a été traduite dans de très nombreuses langues.

« Il faisait partie des figures arabes de gauche qui ont, tout au long de leur vie, oeuvré à lier le combat pour la libération de la Palestine à celui de la démocratie dans la région », écrit Soulayma Mardam Bey, dans L’Orient Le Jour.

Nous publions ci-dessous de larges extraits de son article.

« Beyrouth comptait au rang de ses grands amours. C’est là qu’il est né, là où il a également rendu son dernier souffle dimanche dernier, à l’âge de 76 ans. Il y a mené ses combats politiques et culturels, organisé sa révolution littéraire, contribué au rayonnement d’une cité qu’il percevait comme étant résolument, passionnément, arabe.

C’est là où il a commencé à militer pour la Palestine et a participé pleinement au débat d’idées à travers son rôle de journaliste, à une époque où les intellectuels de la région publiaient dans la presse libanaise ce qu’ils ne pouvaient exprimer à domicile, faute de liberté.

Beyrouth a abrité ses engagements, avant, pendant et après la guerre civile, et la lutte contre le siège israélien en 1982.

Né le 12 juillet 1948 dans une famille grec-orthodoxe de la classe moyenne, Elias Khoury grandit dans le quartier d’Achrafieh, dans une ambiance baignée de culture religieuse et de poésie arabe classique. Très jeune, il est passionné par la cause palestinienne, qui deviendra le moteur principal de son engagement politique. Homme de gauche, il aurait pu rejoindre le parti communiste libanais mais il se rapproche plutôt du Fateh, à la suite de la défaite de 1967, après un séjour en Jordanie dans un camp de fedayin.

De 1975 à 1979, il est rédacteur en chef de la revue Affaires palestiniennes, collaborant avec le poète Mahmoud Darwich. Il sera également le directeur éditorial des pages culturelles du quotidien libanais As-Safir (1983-1990) et rédacteur en chef, après la fin de la guerre, d’Al-Mulhaq, le supplément culturel d’An-Nahar. Et il a assumé, jusqu’à sa disparition, la direction de la Revue d’études palestiniennes (édition en langue arabe).

Romancier de premier plan, dramaturge, journaliste… au cours de sa vie, Elias Khoury a porté plusieurs casquettes et constitue l’un des cas les plus emblématiques de l’écrivain engagé dont les combats imprègnent la littérature mais ne s’y limitent pas. Et dont la littérature dépasse les combats pour projeter sur le devant de la scène des situations et des personnages complexes aux identités tourmentées.

Deux sujets hantent l’œuvre de l’écrivain : la guerre civile libanaise d’une part et la Nakba palestinienne de l’autre. « Ils reviennent sans arrêt sous sa plume, comme un leitmotiv lancinant »

Parmi les quatorze romans publiés par Elias Khoury, La porte du Soleil reste le plus célèbre. Et pour cause : il est LE récit de l’exode palestinien et de la Nakba. « Le titre La porte du Soleil – Bab al Shams en arabe – est même devenu en 2013 le nom d’un village contestataire fondé par des militants palestiniens près du bloc de colonies illégales de Maale Adumim, à l’Est de Jérusalem, pour protester contre l’occupation  ».

De façon générale, le romancier s’est distingué par sa capacité à explorer la question palestinienne sous tous ses aspects, y compris juif. En témoigne par exemple le roman L’étoile de la mer, qui met en scène le jeune Adam Dannoun, enfant de la Nakba, Palestinien d’Israël qui grandit dans le guetto de Lod après que la majorité de la population avait été expulsée par les forces sionistes et qui, d’une péripétie à une autre, se trouve confronté à l’identité de « l’Autre » israélien et à son histoire traumatique, marquée par la Shoah.

Traduite dans une quinzaine de langues dont le persan, le turc et l’hébreu, son œuvre lui a valu plusieurs prix littéraires et d’être nommé Global Distinguished Professor à la New York university, fonction qu’il a exercée de 2005 à 2014.

« Elias Khoury était aussi opposé aux accords d’Oslo et à l’Autorité palestinienne, même si cela s’est exprimé un peu tardivement car il fallait soutenir Yasser Arafat face aux critiques qu’il subissait de la part du camp despotique arabe, notamment le régime syrien », note le chercheur et politiste Ziad Majed, proche ami d’Elias Khoury.

En octobre 2004, avec d’autres militants libanais, il cofonde le mouvement de la gauche démocratique qui vise à conjuguer l’engagement historique de la gauche en faveur de la Palestine à la revendication d’un Liban indépendant, souverain et démocratique.

Extrêmement affaibli par des opérations chirurgicales successives subies depuis juillet 2023, le romancier n’en a pas pour autant abandonné l’écriture. Il a surtout continué de commenter l’actualité avec fougue, notamment les horreurs de la guerre israélienne contre la bande de Gaza. »

CAPJPO-Europalestine

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