17 août – L’usage de la torture pendant les interrogatoires de détenus palestiniens s’est généralisé au cours des deux dernières années, a dénoncé dimanche une organisation israélienne de défense des droits de l’homme, citée par le quotidien Haaretz.
Dans son rapport, rendu public le même jour, la Commission Publique contre la Torture précise en particulier que le nombre d’interrogatoires conduits par le Shin Beth et pouvant être définis comme étant de la torture, des traitements inhumains ou dégradants, se sont comptés par centaines au cours de chacun des six premiers mois de 2003, alors qu’en septembre 2001, on comptait encore en dizaines.
La nature des mauvais traitements infligés aux Palestiniens s’est aggravée, et peut raisonnablement être qualifiée de torture selon les critères établis par le droit international, ajoutent les auteurs du rapport. De plus, le type de tortures mis en œuvre est en infraction avec des règles (pourtant, ô combien permissives, NDR) édictées par la Cour Suprême israélienne en 1999.
« La torture en Israël est redevenue de routine », concluent les auteurs.
Ceux-ci déplorent, notamment, que les institutions du pays (Cour Suprême, Procureur général de l’Etat) qui sont censées surveiller l’activité des services de sécurité (Shin Beth) et garantir que les procédures d’interrogatoire des suspects restent dans le cadre de la loi ont failli à leurs responsabilités. Elles ne font en réalité qu’entériner l’activité du Shin Beth.
De fait, au cours des derniers mois, la Cour Suprême a rejeté la totalité des 124 recours déposés par la Commission Publique contre la Torture, demandant que des suspects palestiniens soient autorisés à conférer avec leurs avocats.
De même, ajoutent-ils, c’est à un responsable du Shin Beth que le Bureau du Procureur de l’Etat a confié la mission d’examiner les plaintes de détenus palestiniens ; il n’est pas surprenant, dans ces conditions, qu’aucun des policiers du Shin Beth procédant à des interrogatoires n’ait été incriminé pour torture « sans cause » d’un suspect.
Parmi les exactions du Shin Beth lors des interrogatoires sont cités, les coups directs, les gifles, les coups de pied, le piétinement des membres entravés par des menottes, le maintien prolongé dans des postures douloureuses, ainsi qu’une méthode « classique » des tortionnaires israéliens : secouer sans relâche le détenu.
Il faut y ajouter la privation de sommeil, les menaces et humiliations, l’exposition à des températures extrêmement basses ou élevées, l’isolement dans des conditions de confinement inhumaines.
Sur un échantillon de 48 détenus qui ont rapporté aux avocats de la Commission Publique au cours des quatre premiers mois de 2003, 58% ont déclaré avoir été victimes de violences directes, 52% se sont plaints de privation de sommeil, et 90% ont dit avoir été menottés, les mains dans le dos, de manière durable.
Le rapport conclut à la dégénérescence morale en Israël et à la violation des normes d’une société censément démocratique, et appelle le gouvernement à se conformer pleinement au droit international, lequel, faut-il le rappeler, interdit la torture et plus généralement tous les traitements inhumains des suspects.
(Haaretz, 17 août 2003, par Moshe Reinfeld)