Bien qu’étant avertis de la situation dans les territoires occupés, les 19 membres de la mission UJFP-ATM (Union des Juifs de France pour la Paix et Association des travailleurs Maghrébins) revenue le 24 février du Proche-Orient, sont rentrés à Paris atterrés par ce qu’ils avaient vu et entendu sur place, et peut-être davantage encore par la fin de non recevoir affichée par la plupart des médias face à leur témoignage, ont révélé lundi membres, au cours d’une conférence de presse à Paris.
Incroyable mais vrai, Antenne 2, basée dans l’immeuble de la presse internationale à Jérusalem ouest, a non seulement refusé de les recevoir, mais a appelé la police israélienne pour lui demander de faire évacuer les membres de la mission venus leur raconter ce qu’ils avaient vu à Ramallah, Gaza, Rafah , Khan Younis et Jabalya.
« Nous choisissons de ne pas regarder et de ne pas entendre » leur ont dit textuellement les responsables de la chaîne française.
Même refus de les recevoir de la part de la BBC et de ABC, seule l’AFP acceptant de les rencontrer.
Quant aux correspondants palestiniens de TF1 et Antenne 2 présents lors des attaques israéliennes sur Gaza entre le 19 et le 21 février, qui ont entraîné la mort d’une dizaine de palestiniens dont des civils, leurs rédactions ont refusé de passer les images qu’ils avaient prises. Résultat : Al-Jazeera a été la seule télévision à rendre compte de la situation.
« Cette manière de se boucher les yeux et les oreilles, nous l’avons retrouvée dans la population israélienne, qui dans son immense majorité ne sait même pas ce qui se passe dans les villages palestiniens. Ceux qui voudraient savoir, encourent des peines de prison s’ils franchissent les lignes de démarcation. C‘est la désinformation absolue de la population israélienne.Quasiment pas un seul article dans la presse sur la vie dans les territoires occupés. Les pacifistes israéliens et palestiniens que nous avons rencontrés à Nazareth étaient terriblement isolés. L’un des militants de Ta Yush (mouvement pacifiste israélien) que nous avons rencontré, avait été tabassé deux jours plus tôt par la police israélienne, alors qu’il tentait de débloquer une route qui empêchait les Palestiniens de rejoindre leurs familles pour fêter l’Aïd el Kébir,», ont raconté Joss, Youssef, Matthew, Younes et leurs compagnons de voyage.
« C’est un grand sentiment d’impuissance qu’éprouvent les militants de la gauche contre l’occupation, qui ont témoigné devant nous des difficultés croissantes vécues y compris par les Palestiniens de l’intérieur, des confiscations de terres, de droits, et du délit de sale gueule dont ils font l’expérience au quotidien ».
« Nous devons nous-mêmes avoir des sales gueules, car nous avons été fouillés maintes fois. Notre car a même été arrêté à 4 km de Jérusalem et nous avons dû descendre bras en l’air face à des soldats qui nous mettaient en joue avec des fusils chargés, parce qu’un civil avait prétendu qu’il y avait des terroristes parmi nous. »
« Nous avons également été bloqués sous les bombardements peu avant d’arriver au camp de Khan Younis où nous allions apporter des cadeaux à des familles. Le consul général adjoint de France à Jérusalem Est, Odile Roussel, que nous avions alertée, nous a demandé de nous retrancher après s’être adressée aux officiels israéliens. Ces derniers lui avaient répondu qu’ils ne voulaient pas de nous. »
« Mais tout cela n’est rien à côté de la guerre psychologique et de l’humiliation que subissent continuellement les Palestiniens que nous avons rencontrés. Eau et électricité coupés sans avertissement, selon le bon vouloir des Israéliens qui contrôlent entièrement ces deux ressources essentielles dans les territoires occupés. Villageois plaqués au sol, déshabillés et fouillés à tout bout de champ, maisons détruites ou en instance de l’être, villes devenues fantômes, exode des familles en charrettes souvent enlisées dans le sable, spectres humains dans des camps que l’on devrait désormais appeler des ghettos, chars postés devant les maisons civiles, check point interminables. La honte et la colère nous envahissaient. Et aujourd’hui que nous sommes revenus, nous éprouvons un sentiment de culpabilité, le sentiment d’avoir abandonné des milliers de gens gens dans les camps».
« Plus de journalistes, plus d’ONG , plus de diplomates, et un silence total, voire complice des régimes arabes, comme le disent eux-mêmes les Palestiniens. C’est terrible. »
« Malgré leurs conditions de vie, nous avons été chaleureusement accueillis par tous les Palestiniens, que nous soyons juifs ou arabes . Nous avons parlé longuement avec eux et ils étaient contents de nous voir engager des discussions avec les soldats israéliens derrière les barbelés, même si celles-ci n’étaient guère fructueuses, ces derniers, la plupart du temps très jeunes et peu politisés, nous traitant de traîtres ou d’Arabes ».
« La visite que nous avons faite au Président Yasser Arafat n’a guère été plus réconfortante. C’est un prisonnier que nous avons pu rencontrer 46 minutes à Ramallah. Mais un prisonnier qui garde toute la confiance des Palestiniens, à ce que nous avons pu juger partout où nous sommes allés. De même, nous avons pu constater que la résistance palestinienne était très unie, malgré ce que l’on entend dire. Les rapports entre les militants des différentes composantes de la résistance au sein des camps de réfugiés sont chaleureux. Quand l’un manque de quelque chose, il va voir sans hésiter un militant d’un autre mouvement ».