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Politique israélienne : une lente prise de conscience aux Etats-Unis ?

On observe indubitablement quelques frémissements intéressants aux Etats-Unis concernant la remise en cause du soutien inconditionnel apporté par l’administration américaine à la politique israélienne. Hillary Clinton et Barack Obama ont beau se faire de la surenchère sioniste, l’AIPAC, principal lobby pro-israélien, semble dans une position moins confortable. Ci-dessous un article instructif du site Rue89.


« Un an après la publication du livre de John Mearsheimer et Stephen Walt, « Le lobby pro-israélien et la politique étrangère américaine », peu de choses ont changé et cette question n’a toujours pas fait l’objet d’un examen critique au sein de la classe politique aux États-Unis. La naissance d’un nouveau groupe aux Etats-Unis, « pro-israélien et pro-paix » change peut-être la donne.

Pour preuve de l’immobilisme jusqu’ici, la surenchère pro-israélienne entre les candidats démocrates Hillary Clinton et Barack Obama. Ce dernier vient d’ailleurs de créer un site de campagne en hébreu, pour le public israélien donc. Tout est bon pour démontrer son attachement à Israël.

En réalité, cela fait plusieurs années qu’un malaise croissant entoure le rôle joué par le American Israel Public Affairs Committee, AIPAC, groupe de pression majeur à Washington. AIPAC, qui n’est pas un groupe émanant directement de la communauté juive américaine -il ne faut pas le confondre avec l’American Jewish Committee par exemple, beaucoup plus proche des idées défendues par les Démocrates- a souvent pris des positions particulièrement anti-palestiniennes, quitte à s’opposer au gouvernement israélien, comme ce fut le cas à l’égard d’Itzhak Rabin lors de l’application des accords d’Oslo après 1993.

Aux États-Unis, des voix juives s’élèvent contre le monopole dont jouit l’AIPAC. Elles sont restées jusqu’à présent très marginales et peu audibles. Le milliardaire George Soros, actif au sein de la gauche américaine, a régulièrement dénoncé les prises de position d’AIPAC et militait en faveur de la création d’une organisation juive de gauche favorable à la création d’un État palestinien. Americans for peace now, le pendant américain du mouvement pacifiste israélien, a aussi cherché à faire entendre un autre son de cloche au sein de la société américaine et ceci avec de peu de succès.

La semaine dernière a vu la création de J street, la forme la plus aboutie de cette contestation. Ce groupe se présente clairement comme un lobby « pro-israélien et pro-paix » voulant battre en brèche le monopole d’AIPAC sur cette question et favoriser un débat plus ouvert en vue de défendre des positions plus équilibrées, notamment par une critique claire et assumée de la colonisation israélienne des territoires occupés palestiniens.

Les positions défendues par J Street sont celles de la gauche israélienne, essentiellement du Parti travailliste et de Meretz. Ce nouveau groupe estime que la rapide création d’un État palestinien et une politique plus équilibrée des États-Unis au Moyen-Orient sont les meilleurs moyens d’assurer la sécurité d’Israël. Les fondateurs de J Street sont pour la plupart d’anciens conseillers de Bill Clinton et des dirigeants d’associations juives de gauche. Un tableau très différent d’AIPAC qui n’a pas caché sa proximité avec les néo-conservateurs lors des deux mandats de George W. Bush.

Il serait pourtant trompeur de voir dans la naissance de J Street une rupture fondamentale. Le groupe défend la « relation spéciale » entre les États-Unis et Israël et, à titre d’exemple éloquent, ne remet pas en cause le versement annuel de 3 milliards de dollars d’aide à l’état hébreu. Ses positions sont encore floues sur des questions essentielles, comme celle d’un possible dialogue avec le Hamas dans le cadre d’un cessez-le-feu ou sur l’avenir du mur construit par Israël dans les territoires palestiniens.

De plus, J Street aura certainement du mal dans les semaines et mois à venir à éroder la puissance d’AIPAC. En effet, ce dernier a pour lui l’ancienneté, il a été créé en 1951, et dispose d’une impressionnante logistique: plus de 100000 adhérents qui font régulièrement des dons, un budget de plusieurs dizaines de millions de dollars, un réseau aussi bien développé dans le Parti démocrate que chez les Républicains, ainsi que le soutien massif des « Chrétiens pour Israël »…

La naissance de J Street est toutefois un événement à saluer. Il est sain, en particulier en période électorale, que le débat démocratique américain sur Israël puisse bénéficier d’une véritable pluralité d’opinions et que cesse le monopole qu’exerçait AIPAC. Reste à savoir si ce nouveau groupe saura à la fois proposer des initiatives fortes en faveur d’une implication américaine pour une paix juste et durable entre Israéliens et Palestiniens et se construire une solide légitimité, ce qui passera nécessairement par une campagne d’opinion publique qui devra aller bien au delà de la seule communauté juive américaine.

http://rue89.com/2008/04/28/un-lobby-pro-israelien-et-pro-paix-change-la-donne-aux-etats-unis

Une vidéo en anglais accompagne cet article sur le site de Rue89.

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