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B’Tselem équipe les Palestiniens pour filmer les abus des colons

Des caméras à la rescousse des Palestiniens pour prouver les exactions des colons et répondre à leurs mensonges. L’association israélienne des droits de l’homme B’Tselem a lancé le programme « shooting back » (filmer pour se défendre) qui a quelques effets dissuasifs. Lire l’article de Libération.


« Dia, Hussai et Mohammed Jabaari ne quittent pas l’écran du caméscope des yeux. Serrés, tête contre tête, dans le salon de la maison familiale, ils font défiler les dernières images prises par Mohammed, 12 ans. Sur la vidéo, leurs voisins, des habitants de la colonie juive de Kyriat Arba, près de Hébron, en Cisjordanie, se dirigent vers une synagogue improvisée – une tente surmontée d’une étoile de David géante – installée sur le terrain des Jabaari, à une centaine de mètres de leur maison. «Le plus important quand tu filmes, c’est que la main ne tremble pas», explique Mohammed, d’un ton sérieux. «La caméra nous protège contre les colons et les pierres», ajoute-t-il.

La famille Jabaari, ainsi que plusieurs autres familles palestiniennes, est installée à l’entrée d’Hébron, sur une bande de terre prise en tenaille entre Kyriat Arba et Givat Avot, une extension récente de la colonie, à quelques dizaines de mètres des habitations palestiniennes.

Après un incident sérieux, en avril 2007, au cours duquel des colons ont pris à parti plusieurs des enfants Jabaari et lancé des pierres contre leur maison, l’organisation de défense des droits de l’homme israélienne B’Tselem leur a donné une caméra, dans le cadre de son programme «Shooting Back» (Filmer pour se défendre). «Les caméras sont très dissuasives. Les colons réfléchissent à deux fois avant de harceler des Palestiniens munis d’un caméscope», explique Issa Amro, responsable du secteur de Hébron pour B’Tselem. «Nous apprenons surtout aux enfants, qui sont particulièrement réceptifs, à se servir des caméras. Nous en profitons pour leur expliquer que les moyens non violents, comme les caméras, sont plus efficaces que les pierres», ajoute-t-il.

Heurts fréquents. Une centaine de caméras ont été distribuées depuis le début 2007 par B’Tselem à des familles palestiniennes vivant dans des zones de Cisjordanie, comme à Hébron, où les heurts avec les colons sont très fréquents. Aux termes d’un accord avec l’Autorité palestinienne, Israël a évacué en 1997 80 % de la ville, occupant une enclave autour du Caveau des patriarches, où quelques centaines de colons vivent retranchés au milieu de 150 000 Palestiniens, sous la protection de l’armée. Les images vidéo recueillies par les Palestiniens sont ensuite conservées et archivées par l’organisation, qui les met à la disposition des journalistes. «De trop nombreux incidents ne sont jamais rapportés et restent invisibles parce que les journalistes ne peuvent être partout. Nos caméras permettent de les porter à la connaissance du public, et du même coup de faire diminuer le nombre et l’intensité des violences», explique Oren Yakovobich, responsable du programme de B’Tselem.

Alors qu’il était encore en phase de test, «Shooting Back» a reçu le soutien financier de donateurs américains après la diffusion, en mars 2007, par les médias israéliens et internationaux, d’une Israélienne insultant pendant plusieurs minutes sa voisine palestinienne dans la vieille ville de Hébron. Mais l’incident le plus grave filmé par une caméra de B’Tselem s’est produit en juin : deux colons, masqués et armés de bâtons, frappant des bergers palestiniens près de Hébron. Quelques jours après la diffusion de la vidéo par la BBC, les deux jeunes ont été arrêtés par la police israélienne.

«Hors contexte». B’Tselem a enregistré plus d’une quarantaine de cas de violences – tirs, coups, jets de pierres – perpétrées par des colons contre des Palestiniens au cours de l’année 2007 en Cisjordanie et 14 cas depuis le début de l’année 2008.

Le porte-parole de la communauté juive de Hébron met en doute la fiabilité des images fournies par l’organisation de défense des droits de l’homme. «Les images sont très facilement manipulables et les vidéos sont prises hors contexte. Elles ne montrent pas ce qui s’est passé avant. Peut-être y a-t-il eu une provocation ?» estime David Wilber. Selon lui, de nombreux Israéliens vivant à Hébron ont peur des Palestiniens, qui sont souvent armés.

«Argent». Abed Karim Jabaari est quant à lui bien convaincu que sans la caméra de B’Tselem, il serait déjà en prison : «Si je ne les filmais pas, les colons m’accuseraient auprès de la police de lancer des pierres, et je serais immédiatement emprisonné. Ils veulent qu’on parte. Leur rabbin vient souvent nous voir pour nous proposer de l’argent. Il nous dit que nous n’avons qu’à dire combien nous voulons et qu’il nous le donnera. Mais où irai-je ? Ici c’est ma maison, ma terre. Je n’en partirai que mort.»

Source : Libération.fr

http://www.liberation.fr/actualite/monde/338183.FR.php

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