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BDS : Abdellah Azizi écrit à Mme Alliot-Marie

Madame Alliot Marie n’a toujours pas répondu au « Manifeste BDS des 2000 », qui affirment leur intention de poursuivre leurs actions citoyennes de boycott de l’occupant israélien, et ceci d’autant plus que le gouvernement français se refuse à prendre les sanctions qui s’imposent à l’encontre du terrorisme d’Etat israélien. Abdellah Azizi interpelle donc à nouveau la ministre de la justice sur ses propos mensongers et les menaces qu’elle agite sous la pression du lobby israélien en France.


Rouen, le 31 mars 2010.

Madame La Ministre d’Etat,

Vous le savez, le conflit interminable du Proche-Orient suscite beaucoup de passions dans notre pays. Ce n’est certes pas, le seul conflit au monde, ni le plus sanglant, mais c’est celui qui, semble-t-il, génère le plus de tensions dans notre société. Aujourd’hui, dans ce contexte, il n’est plus rare en effet d’entendre des insultes, des menaces, à l’encontre notamment de tous ceux qui osent critiquer publiquement la politique du gouvernement israélien en Palestine occupée.

Permettez-vous, seulement, de participer à une action citoyenne, non-violente, dans le cadre d’une campagne internationale de boycott de l’Etat d’Israël accusé par le rapport Goldstone, faut-il le rappeler, de crimes de guerre, et vous serez poursuivi et condamné par la justice de votre pays pour « incitation à la discrimination raciale » ! On marche sur la tête !

La France, patrie des droits de l’Homme, est-elle en train de perdre son âme ? En déroulant, sans scrupules, le tapis rouge à des criminels de guerre présumés, et en condamnant fermement, des militants courageux défenseurs du droit international ! Ne croyez vous pas, Madame la Ministre, que ces intimidations inacceptables dans un pays de droit comme le nôtre, doivent impérativement cesser pour laisser la place, sur ces questions, au légitime et nécessaire débat démocratique ?

Bien sûr, même s’il ne faut pas l’exagérer, l’antisémitisme est un poison pour notre société, indigne de notre héritage humaniste, et pour cette raison, il doit être résolument combattu. Je salue au passage les efforts que vous poursuivez dans ce domaine. L’histoire du siècle passé nous rappelle jusqu’où ce fléau peut conduire les hommes. Pour autant, ce nécessaire devoir de mémoire quant à la barbarie d’hier, nous autorise-t-il à fermer les yeux sur celle d’aujourd’hui ? Jusqu’à quand, Madame la Ministre, notre pays va-t-il continuer à supporter, sans agir, la politique criminelle du gouvernement israélien à l’égard du peuple palestinien ?

Le combat contre l’antisémitisme, certes indispensable, ne mérite pas d’être instrumentalisé, me semble-t-il, pour faire accepter toute la politique israélienne, y compris la plus blâmable ! Cela, vous en conviendrez, est immoral et peut même s’avérer dangereux.

Rappelons également que le conflit du Proche-Orient n’est pas un conflit religieux, même si certains souhaitent qu’il le devienne. C’est un conflit politique, territorial. La réponse donnée ne peut être que politique. La paix ne peut venir sans justice, sans la stricte application du droit international. Ainsi, ceux qui, en conscience, s’attachent à commettre des amalgames douteux entre religion et idéologie nationaliste, entre judaïsme et sionisme, prennent une lourde responsabilité devant l’Histoire…

Or, vous avez déclaré, Madame La Ministre, dans un discours prononcé à Bordeaux, le 18 février dernier : « je n’accepte pas que des personnes, responsables associatifs, politiques ou simples citoyens appellent au boycott de produits au motif qu’ils sont kascher ou qu’ils proviennent d’Israël ».

Mais qui, Madame la Ministre, appelle au boycott des produits kascher ? Ne confondez-vous pas les produits des magasins et restaurants juifs observants avec ceux provenant des colonies israéliennes en Palestine occupée ?

Pourquoi cet amalgame ? Ne faîtes vous pas la différence ? Aucune des associations engagées dans la campagne BDS ne vise, fort heureusement, les produits kascher ! Et pourtant, vous le saviez ! Vous l’avez vous-même souligné, à juste titre, en tant que Ministre de L’Intérieur, chargé des cultes, le 25 mai 2009, à l’Assemblée Nationale : « Ces opérations de boycott, il faut bien le préciser, touchent des produits importés d’Israël et non des produits kascher. »

Alors pourquoi ce revirement ? Que cachent ces ambiguïtés ?

Dans ce même discours de Bordeaux, vous avez déclaré : « A cet égard, je salue la détermination du parquet dans l’affaire de l’individu qui avait appelé au boycott de produits israéliens par voie d’affichettes dans un centre commercial de Mérignac. »

Pardonnez moi, mais le verdict rendu par le tribunal de Bordeaux, le 10 février dernier, à l’encontre de Madame Sakina Arnaud, militante à la LDH, condamnée pour « incitation à la discrimination raciale », est franchement incompréhensible ! S’il illustre, d’après vous, « votre détermination dans la lutte contre l’antisémitisme », il pose, à moi et à beaucoup d’autres, un véritable problème. Il semblerait que ce verdict, fort regrettable, illustre plutôt une stratégie, votre stratégie, délibérée, systématique, de criminalisation de toute critique de la politique israélienne et de toute action en faveur des droits légitimes du peuple palestinien.

Mais qu’on ne s’y trompe pas ! Ces attaques, ces accusations calomnieuses, ce chantage à l’antisémitisme, loin de nous démobiliser, Madame La Ministre, ne font que renforcer notre détermination à mener cette campagne BDS.

C’est la raison pour laquelle, à mon tour, en conscience, devant l’impuissance de la communauté internationale à trouver un règlement à ce conflit, et l’incroyable inertie, il faut bien le dire, de l’Union européenne et de la France, j’appelle nos concitoyens au boycott de l’occupant israélien dans le cadre de l’article 41 de la Charte des Nations Unies.

Oui, je m’associe aux nombreuses organisations à travers le monde, associatives et citoyennes, qui soutiennent la demande de la société civile et politique palestinienne pour que des sanctions soient appliquées aux responsables israéliens pour les crimes de guerre, voire les crimes contre l’Humanité, commis au cours de l’opération « plomb durci ».

Oui, je me félicite de la saisie de la cour pénale internationale et de la création d’un tribunal Russell suite aux violentes attaques, sauvages et disproportionnées, de l’armée israélienne sur la bande de Gaza en janvier 2009.

Enfin, je condamne fermement, la volonté de construire, à Sète, un terminal « Agrexco » par lequel transiteraient des produits d’exportation cultivés illégalement en territoire palestinien. Il est, en outre, inacceptable qu’un tel projet, bafouant le droit international, soit financé par des fonds publics. Nos concitoyens doivent être informés sur ces politiques commerciales, illégales et immorales, qui contribuent au passage, à ternir chaque jour un peu plus, l’image de notre pays dans le monde.

Veuillez croire, Madame La Ministre, en mes sentiments les meilleurs.

Abdellah AZIZI

Enseignant en Histoire Géographie

Militant associatif CAPJPO-EuroPalestine