Pour la première fois, un tribunal israélien remet en cause une des manières particulièrement vicieuses dont Israël dépossède les Palestiniens !
Grâce à la ténacité de l’association Hamoked, qui défend les droits des Palestiniens, les juges de la Cour suprême israélienne viennent d’interroger le gouvernement israélien sur sa pratique obligeant les Palestiniens possédant des terres au niveau du « Mur de séparation » à les fragmenter en petites parcelles, attribuées ensuite à différents propriétaires, indique Amira Hass dans un nouvel article dans Haaretz.
En effet, personne n’est au courant de cette mesure qui oblige les Palestiniens qui possèdent des terres entre le Mur et la Ligne verte, à les diviser en petites parcelles qui deviennent les propriétés de leurs héritiers au premier degré, avant qu’un beau jour, le gouvernement israélien annonce que, vu leur petite taille, ces parcelles ne présentent aucun intérêt agricole, n’ont plus besoin d’être cultivées, puis se les approprie !!
Tehila Meir, l’avocate de Hamoked, n’a cessé de dénoncer en justice, à tous les échelons, cette invention israélienne de division obligatoire des parcelles collectives de ces familles palestiniennes en parcelles plus petites, (en fonction du nombre de membres de la famille), et d’interdiction ensuite d’aller les cultiver.
Le processus de dépossession mis en place
La pratique mise au point il y a 12 ans par les autorités israéliennes consistait, dans un premier temps, à permettre (au compte-gouttes) à des agriculteurs palestiniens ayant des terres dans la « zone de jointure » entre la Cisjordanie et Israël (depuis la construction du Mur de l’Annexion) de demander des permis pour aller, de temps à autre, entretenir et cultiver leurs terres.
Il fallait qu’ils demandent à chaque fois à des soldats israéliens de leur ouvrir des grilles pour accéder à leurs terres, qui sont les plus fertiles de la région.
« Mais il s’est très vite avéré, souligne Amira Hass, que l’armée, le Coordonnateur des activités gouvernementales dans les territoires et les bureaux de coordination de district qui lui sont subordonnés, font tout ce qui est en leur pouvoir pour limiter le nombre de Palestiniens accédant à leurs terres. Le nombre de portes déverrouillées dans ce contexte se restreint de jour en jour, la bureaucratie rendant très compliquée l’obtention d’un permis de passage pour travailler sa terre. «
Le nombre de permis de culture agricole délivrés par les autorités israéliennes est ainsi passé de 20.773 en 2007 à 8.689 en 2019, et à 5.478 entre janvier et octobre 2020.
Et en 2018, les Palestiniens ont commencé à rapporter quelque chose d’étrange : leurs demandes de permis pour accéder à leurs terres ont été refusées parce que «leur parcelle est minuscule».
« Je me souviens bien du regard en colère et désespéré de dizaines d’agriculteurs dans la région de Qalqilyah et Tulkarem, lorsqu’ils décrivaient le nouvel état cruel des choses », écrit la journaliste. « Les autorités israéliennes dans ces bureaux de district ont commencé à partager des parcelles de terre — qui sont généralement enregistrées au nom du grand-père ou du père de famille — selon le nombre de ses descendants ou héritiers. Premièrement, les officiers israéliens ont interdit aux petits-enfants des propriétaires enregistrés d’accéder à la terre familiale. Ensuite, parce que chacun des nombreux héritiers légaux est théoriquement propriétaire d’une petite parcelle, le personnel des bureaux de district a réduit le nombre de permis d’accès attribués à chaque parcelle (par exemple, ceux accordés aux ouvriers agricoles qui sont engagés en renfort). Dans un nombre croissant de cas, les agents ont refusé d’approuver les permis aux propriétaires en affirmant que la parcelle était minuscule « et qu’il n’y avait aucun besoin agricole ».
Les autorités israéliennes ont décidé un beau jour qu’une «petite parcelle» est une parcelle de moins de 330 mètres carrés. Ils ont écarté les explications selon lesquelles il s’agit d’une propriété en copropriété où la culture est effectuée par la famille, que plusieurs membres de la famille travaillent au nom des autres, et que le gouvernement avait promis que le droit de propriété serait préservé.
« Les conséquences de cette parcellisation sont claires comme le jour : chaque année le nombre d’héritiers légaux propriétaires de chaque parcelle familiale augmentera, et donc chaque parcelle sera divisée, sur ordre des bureaux de coordination de district, en sous-parcelles, jusqu’à ce qu’elles soient toutes «inférieures à 330 mètres carrés». Et de cette manière, dans un proche avenir, Israël pourra déclarer que des dizaines de milliers d’hectares de vergers et de champs verrouillés par la barrière de sécurité ne conviennent pas à la culture agricole, et que leurs propriétaires palestiniens n’en ont pas besoin et devraient donc ne pas être autorisés à les atteindre.
L’immense étendue de terre sur le côté ouest de la barrière de séparation restera enregistrée au nom de ses propriétaires palestiniens, mais de facto sera annexée à Israël et progressivement les Israéliens juifs en prendront le contrôle. »
Finalement les démarches judiciaires d’Hamoked, ont amené la Cour Suprême, à demander, le 10 décembre dernier, au gouvernement israélien pourquoi ce règlement sur la « petite parcelle » ne devait pas être abrogé – «et / ou remplacé par un autre arrangement qui offre une solution aux titulaires de droits de propriété conjointe. » Ce tribunal a donné au gouvernement 60 jours pour répondre à la pétition. La réponse est donc attendue dans moins d’un mois. »
(Traduit par CAPJPO-EuroPalestine)
Source : Amira Hass – Haaretz.com
CAPJPO-EuroPalestine