Aluf Benn, journaliste au quotidien israélien Haaretz, a fait une enquête sur les programmes d’histoire dans les collèges et lycées israéliens, et c’est d’autant plus instructif que les dirigeants israéliens passent leur temps à accuser les manuels scolaires palestiniens de manque d’objectivité !
« Je suis allé voir, écrit Aluf Benn, si contrairement au programme des lycées et du baccalauréat, le programme d’histoire du collège encourage davantage la pensée critique et enseigne aux enfants israéliens la riche histoire de cette terre. «
« Je n’ai pas été surpris de découvrir que le programme de la 6ème à la 3ème se concentre sur la « hasbara » (propagande israélienne), tout comme de la seconde à la terminale. Et il n’a pas été conçu par des gens de droite, mais par un comité qui a été nommé par le dernier ministre de l’Éducation de « gauche » , Yuli Tamir, et dirigé par le professeur Aviva Halamish, ancienne militante de Peace Now. (La Paix Maintenant). »
Et de citer : « Dans le programme d’histoire des collèges, on trouve : Le monde hellénistique et les juifs, Hérode pour et contre les juifs, le christianisme comme secte juive, la vie juive en terre d’islam et dans l’Europe chrétienne, le rôle des juifs dans les Lumières, Napoléon et les juifs, les Juifs entre intégration et rejet, les Juifs d’Afrique du Nord, présentent une position « d’un point de vue juif ». En seconde, il se concentre sur le sionisme, la construction du futur Etat d’Iraël et le conflit avec les Arabes pendant «l’État en devenir».
« Rien sur les régions du monde dans lesquelles très peu de Juifs vivaient, comme la Chine, l’Inde et l’Afrique, qui ne sont mentionnées que comme des destinations du colonialisme européen. Les étudiants sont informés de l’émergence de l’islam et des différences entre celui-ci et le judaïsme et le christianisme – mais pas de son développement, ni de l’empire ottoman et de son importance historique – autant de questions cruciales pour quiconque vit au Moyen-Orient et veut comprendre les rapports de force et les conflits dans la région.
Mais ce n’est que du bruit de fond. Au cœur du programme se trouve l’effacement de l’histoire de cette terre. Les Palestiniens apparaissent soudainement vers la fin de l’histoire, pendant la période du mandat britannique, comme des Arabes violents qui se sont révoltés contre l’immigration juive. Rien n’est enseigné sur le développement des communautés palestiniennes, sur les 1 300 ans de domination musulmane ici, sur le lien avec les terres voisines et leur culture, sur la vie quotidienne à Jaffa ou Acre, sur les centaines de villages qui ont été détruits pendant la Nakba. Ce sont tous des trous noirs. La seule période mentionnée dans l’histoire du pays entre Hérode et Herzl – et seulement pour sept heures d’étude au total – sont les Croisades et l’établissement du « Royaume de Jérusalem » chrétien.
Et qui étaient ces gens qui vivaient ici avant l’arrivée des croisés et après leur défaite ? Les élèves des écoles publiques israéliennes ne sont pas censés le savoir. Peut-être parce que cela pourrait les inciter à poser des questions sur la justice du sionisme et les rendre curieux d’en savoir plus sur l’histoire palestinienne. Dans les programmes scolaires, l’histoire est ce qui se passe avec les Juifs depuis la période hellénistique jusqu’à la fondation d’Israël, et tout le reste est sans importance.
Parce que l’essence de l’étude de l’histoire en Israël n’est pas d’élargir les connaissances des étudiants ou de développer la pensée critique, mais d’élever une nouvelle génération de disciples obéissants qui réciteront le récit national, « car remettre en question les hypothèses de base sur lesquelles nous avons été élevés pourrait brouiller les éléments de notre identité commune et menacent les fondements de notre identité », déclare Sagi Cohen, auteur de l’un des manuels d’histoire du lycée. Je ne pourrais pas mieux dire. »
Par Aluf Benn pour Haaretz
CAPJPO-EuroPalestine