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LE CHEF D’ORCHESTRE DANIEL BARENBOIM A RAMALLAH

« Pour tendre une main et partager la musique afin de réduire la haine au silence ». C’est par ces mots que le musicien israélien le plus célèbre, Daniel Barenboïm, explique la raison pour laquelle il est venu à Ramallah jouer devant de jeunes palestiniens.


Pendant une vingtaine de minutes mardi 10 septembre 2002, M. Barenboïm, juif originaire d’Argentine, a interprété la « Sonate au clair de lune » de Beethoven devant les élèves de l’Ecole des Amis, tenue par des quakers -protestants prêchant le pacifisme- dans la ville de Ramallah (Cisjordanie), occupée par l’armée israélienne depuis la mi-juin.

Le chef d’orchestre, directeur artistique de l’opéra de Berlin (Staatsoper) avait souhaité se produire en mars à Ramallah, mais les autorités israéliennes lui en avaient interdit l’accès « pour des raisons de sécurité ».
« Partout dans le monde, des gens me demandent pourquoi je voulais être à Ramallah aujourd’hui. La réponse est très simple : je ne suis pas un homme politique, je n’ai pas de solution pour ce conflit, mais je crois que chacun d’entre nous doit réfléchir à sa responsabilité en tant qu’être humain et cesser de dépendre des gouvernements », a dit M. Barenboïm.
Très critique vis-à-vis du Premier ministre israélien Ariel Sharon, le chef d’orchestre est connu pour ses position pacifistes concernant le conflit israélo-palestinien.
L’amitié qui le lie à l’intellectuel américain d’origine palestinienne Edward Saïd a débouché sur le concert qu’il avait donné en 1999 à l’université palestinienne de Bir Zeit, près de Ramallah, et sur la création du West Eastern Divan, orchestre rassemblant des jeunes musiciens palestiniens, israéliens, syriens, libanais ou égyptiens qui se sont produits en août en Europe et aux Etats-Unis.
Dans l’auditorium de l’Ecole des Amis, l’atmosphère dissipée s’est vite transformée en silence attentif lorsque le musicien a entamé les premières mesures. A la fin du morceau, les adolescents, en uniforme, se sont levés pour l’applaudir.
Puis trois jeunes filles ont joué après M. Barenboïm, l’une d’entre elles faisant forte impression en interprétant une valse de Chopin.
« J’étais nerveuse quand je suis montée sur scène, mais M. Barenboïm m’a demandé s’il pouvait s’asseoir à côté de moi. J’ai dit oui et je mes suis sentie immédiatement rassurée », dit Céline Khoury, 15 ans.
« Je pense que d’autres enfants auraient dû êtres invités aussi. Certains n’ont pas autant de chance que nous », ajoute-t-elle, plus grave.
« Je suis content qu’il soit ici ; comme ça il pourra raconter ce qui se passe en Palestine », dit Saleh Amra, 12 ans, qui ignorait jusque là tout du musicien.
Pour le militant palestinien des droits de l’Homme Moustafa Barghouthi, qui a invité M. Barenboïm, ce jour a permis de « percer le siège (imposé par l’armée) et d’apporter à ces enfants de la musique et un message de paix ».
« Nous devons apprendre à faire la différence entre nos amis et nos ennemis, entre ceux qui veulent la paix et ceux qui préfèrent la guerre », souligne-t-il.
La visite du chef d’orchestre à Ramallah a été très critiquée dans les médias israéliens, mais l’intéressé ne veut pas que son geste prenne une tournure politique : « Je suis venu ici en tant qu’individu (…), je sais seulement qu’israël ne peut pas résoudre le conflit de manière militaire, tant d’un point de vue moral que stratégique ».
« Demain, la paix viendra. Les deux camps devront à nouveau échanger, économiquement et culturellement. Pourquoi devrais-je attendre », se demande-t-il, alors que « la musique peut faire passer ce sentiment de communauté sur le champ ? » RAMALLAH (AFP)