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LA SITUATION EN PALESTINE : MESSAGE DE CLAUDE LEOSTIC (DELEGUEE DE L’AFPS EN PALESTINE OCCUPEE)

7 janvier – Message de Claude Léostic – lundi 6 janvier 2002
Ramallah.
Hier, l’attaque suicide meurtrière à Tel-Aviv, au moment où les pourparlers du Caire envisageaient la trêve d’opérations de ce genre, laissait craindre une réaction violente du gouvernement Sharon. Netanyaou, Mofaz et leurs affidés réclamaient encore une fois de se débarrasser du président Arafat.


LA SITUATION EN PALESTINE : MESSAGE DE CLAUDE LEOSTIC (DELEGUEE DE L’AFPS EN PALESTINE OCCUPEE)
Sharon, en campagne électorale, jouait le modéré. A Ramallah, à la Muqata’a, les visiteurs se succédaient, les soldats étaient prêts. Rien. Powell avait fixé les limites à ne pas dépasser, rien de  » spectaculaire « , rien contre Arafat directement.
Mais à Naplouse, d’où viendraient les meneurs de l’attaque, les chars réinvestissaient la ville et le couvre-feu aujourd’hui y est total.
Hier cependant les Palestiniens avec une centaine d’Internationaux y ont mené une belle opération. Armés de pioches et pelles puis avec l’aide de bulldozers, ils ont réussi à démolir le barrage qui depuis des mois empêchait l’accès à la ville en venant de l’est, des camps de l’entrée de la vallée, devant la Muqata’a en ruines. De même la population de Naplouse avait réussi à abattre il y a une quinzaine de jours la porte métallique érigée par les Israéliens, qui barrait l’autre rue accédant au centre et qu’on ne leur ouvrait qu’au bon ( !) vouloir des soldats. Deux victoires contre l’occupation qui empêche Naplouse de vivre depuis des mois.
Mais à Gaza les hélicoptères ont encore porté la destruction et la terreur tandis que les chars entraient une fois de plus à Rafah.
Hébron est exsangue, bouclée, soumise à la haine de colons meurtriers. Hier comme avant-hier, à Bethléem les jeeps parcouraient les rues jonchées de débris, de verre et de pierres mais déjà désertées. Le couvre-feu qui devait être levé était réinstauré sans raison comme d’habitude.
Et aujourd’hui, à Ramallah où j’ai dû rester alors que je devais me rendre à Naplouse, inaccessible, tout à coup dans une rue tranquille, une scène banale et terrifiante :4 grosses jeeps remontent la rue et s’arrêtent devant un grand bâtiment moderne, de bureaux et logements. Sur les trottoirs, les gens qui vaquaient paisiblement à ce que l’occupation leur laisse de vie, se mettent à courir. On sait trop bien les risques quand les soldats viennent, gaz et balles sont monnaie courante. 6 autres jeeps, plus petites, ordinaires derrière leur grillage les rejoignent et bloquent la rue et celle, plus bas, derrière le bâtiment, sous mes yeux.Les soldats israéliens lourdement armés en sortent en courant, certains se postent dans les encoignures de portes proches. Je m’attend au pire, mais tout se passe vite et sans résistance, les Israéliens ressortent avec des hommes ligotés et les yeux bandés, 5 ou 6, et les embarquent dans les jeeps sous les yeux résignés des rares passants coincés à proximité. Le pire n’a donc pas eu lieu. Le pire c’est ce qui s’est passé fin décembre, en plein centre de Ramallah, en période d’affluence, en fin de matinée.
Une voiture palestinienne, des hommes en keffieh qui sortent et soudain la mort, ce sont les services spéciaux israéliens, camouflés et bientôt rejoints par leur contrepartie en uniforme, qui tuent deux hommes. L’un  » recherché  » est abattu et l’autre qui s’était déjà rendu, achevé au sol. Dans la foule dense qui s’égaille, c’est la panique et puis les pierres volent, les balles y répondent avec les grenades lacrymogènes, redoutables, et les bombes sonores, une fois de plus. Un jeune étudiant qui se trouvait là est abattu.Les jeeps évacuent les tueurs, le sang répandu sur le sol, les pierres et les débris témoignent de la violence de leur attaque. En ville c’est la consternation, les gens rassemblés sur la place n’arrivent pas à quitter les lieux, on parle, on partage la douleur et la colère.
Et puis, suite de l’horreur, vers 16 heures, les mêmes peut-être, en civil, accompagnés de soldats identifiables, eux, pénètrent dans l’hôpital de Ramallah. Dans l’enceinte de l’hôpital, une petite bâtisse abrite les gardes qui surveillent l’entrée. 4 d’entre eux, des gens ordinaires, y jouent aux cartes quand les tueurs arrivent et tirent à travers la fenêtre. Puis ils y entrent et continuent à tirer et font un mort, 55 ans, et 3 blessés. Sous les yeux d’autres employés de l’hôpital, ils sont emmenés par les meurtriers, même le mort. Le corps ne sera restitué que plus tard. Quand nous arrivons, tout de suite après, le sang coule sur le sol dehors et dans le petit bâtiment, dans un désordre violent, on ne peut pas l’éviter. On marche dans le sang, il est partout.
Les employés de l’hôpital, tous les gens présents sont en état de choc. Plus de sanctuaire. L’armée démocratique d’Israël qui avait attaqué sauvagement en Avril l’église de la Nativité à Bethléem, bombardé les statues religieuses qui la surplombent, cette armée d’un peuple éduqué qui se permet d’entrer dans les universités, comme à Naplouse récemment, pour les faire fermer sous la menace des armes, ose maintenant entrer et tuer dans un hôpital. Quoi d’autre après ça ?
Les règles mondialement reconnues de l’inviolabilité d’un lieu religieux, universitaire ou hospitalier ne sont pas plus acceptées par Israël que les résolutions du droit international.
Pendant combien de temps encore la communauté internationale, tellement soucieuse de faire respecter les résolutions de l’Onu par Saddam Hussein, se déconsidèrera-t-elle ici par sa lâcheté voire sa complicité avec des crimes odieux, faisant le lit de l’intégrisme et perpétuant la violence?
Sous couvert d’une lutte contre le terrorisme et pour le droit il se prépare ici d’autres massacres, d’autres crimes, comme ceux que je viens de vous décrire et que j’ai vus de mes yeux. Je ne veux pas en voir d’autres. Ca suffit.
Le droit il n’y en a qu’un. Les états voyous ne sont pas ceux qu’on dit.
Il faut mettre fin aux risques majeurs que Bush, Sharon et leurs acolytes font peser ici en Palestine, au Moyen-orient et en conséquence partout ailleurs.
A l’issue du forum social qui s’est déroulé à Ramallah à la fin de l’année, les participants, Palestiniens et Internationaux, ont lancé un appel. Il faut en Palestine occupée une présence internationale forte, des citoyens, des gens de partout, en Europe, Asie, Afrique et Amériques, qui suppléeront leurs gouvernements pour exiger l’application du droit international, mettre fin au terrorisme d’état qu’Israël pratique en toute impunité.
Venez exiger la protection des Palestiniens et la fin de l’occupation.
Avant qu’il ne soit trop tard.

Claude Léostic est Déléguée de l’Association France Palestine Solidarité en Palestine occupée.