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LES EXTREMISTES RELIGIEUX DE PLUS EN PLUS INFLUENTS EN ISRAEL

La société israélienne est bien malade : ce n’est pas nous qui le disons, mais le Figaro qui rapporte dans son édition du 29 mai, sous la plusme de Patrick Saint Paul, l’influence grandissante des fanatiques religieux au sein de la société israélienne.


Jérusalem : de notre correspondant Patrick Saint-Paul
[Figaro du 29 mai 2004]

L’autocollant sur sa voiture annonce clairement la couleur : «Tuez Arafat maintenant.» La barbe finement taillée, l’allure fragile, Moshe Feiglin ne quitte jamais le revolver glissé dans la ceinture de son pantalon. Chef de file de l’aile la plus dure du Likoud, cet homme qui prône «la guerre sainte contre les Arabes» et le démantèlement des «colonies palestiniennes à Gaza et en Judée Samarie» (NDLR : la Cisjordanie pour les Palestiniens), a fait échouer une première fois le plan de retrait unilatéral présenté par Ariel Sharon. Et il s’agite en coulisses pour y faire barrage une seconde fois.

Le 2 mai, Ariel Sharon a essuyé une écrasante défaite lorsqu’il a soumis son projet au vote des militants du Likoud. Ce fut la première grande victoire de Moshe Feiglin et de son mouvement, Manhigut Yehudit (Direction juive), qui a commencé à infiltrer le Likoud il y a cinq ans, pour y imposer ses idées. Il contrôle 132 sièges sur les 2 900 que compte le comité central du Likoud. Mais une discipline militaire règne dans les rangs de ses fidèles, qui assistent à chaque réunion, alors que seul un quart des autres membres fait le déplacement. Pour la première fois, il a imposé ses vues lors du référendum du Likoud. «Au début on le prenait pour un clown, raconte Daniel Bensimon, journaliste au Haaretz. Maintenant on le prend au sérieux. Il est devenu incontournable : le prochain chef du Likoud devra s’entendre avec lui pour être désigné.»

Directeur d’une entreprise d’informatique, vivant dans la colonie juive de Karnei Shomron, près de Naplouse, Moshe Feiglin a adopté un profil ordinaire. Son mouvement souhaite l’instauration d’une Constitution selon laquelle Israël serait dirigé par «un président ou un roi» et l’établissement d’une haute cour composée de rabbins ayant le pouvoir de supprimer toute législation contraire aux préceptes religieux juifs. Selon cette Constitution, l’Etat aurait aussi pour devoir de construire le «troisième Temple» et autoriserait le service militaire dès l’âge de 12 ans. «Nous menons une révolution silencieuse au sein du Likoud, pour créer un vrai Etat juif, qui apportera la lumière au monde, affirme Feiglin. Un Etat guidé par la Torah.»

Les frontières de cet Etat s’étendraient du Jourdain à la mer Méditerranée. Que faire des Palestiniens ? «Les Palestiniens n’existent pas, répond Feiglin très calmement, de même que les Israéliens. Il y a des Juifs et des Arabes. Lorsque les Juifs ont commencé à revenir sur leur terre promise, il y a cent vingt ans, elle n’était occupée par personne. Les Arabes sont revenus parce que nous leur avons offert des opportunités d’emplois. Ils nous ont mis le couteau sous la gorge. Ils disposent déjà de 22 pays arabes, où ils peuvent réclamer leurs droits civils. Pas chez nous.»

«Les Juifs ont peur de leur identité, insiste-t-il. Nous ne sommes pas là à cause de l’Holocauste, mais parce que c’est écrit dans la Bible. L’Etat hébreu n’est pas un refuge pour les Juifs, c’est leur terre promise. Dès qu’un chef d’Etat étranger vient ici, le premier monument qu’on lui fait visiter, c’est le mémorial de l’Holocauste. Le peuple juif se résume-t-il à cela ? C’est de l’auto-anti-sémitisme.»

Feiglin représente un courant messianique de plus en plus fort dans la société israélienne. Il exerce une fascination sur le Likoud. «Les gens se disent : «Il est plus juif que nous.» Et votent pour lui par sentimentalisme, affirme Daniel Bensimon. Le danger, c’est qu’il représente un Israël qui se coupe de l’extérieur.»