Header Boycott Israël

Lettre à Obama des Marcheurs pour Gaza

Lettre ouverte à Obama des 43 délégations qui se sont trouvées bloquées au Caire par le gouvernement Mubarak, aux ordres de Washington.


Monsieur le Président Barack H. Obama,

Nous, citoyens de quarante-trois pays, nous sommes retrouvés au Caire en décembre 2009, en route vers la Bande de Gaza occupée, pour manifester notre solidarité avec les Palestiniens qui, voilà un an, ont subi d’Israël un assaut massif et inhumain. Nous souhaitions leur montrer que nous, citoyens du monde, nous rappelons ce que nos gouvernements veulent nous faire oublier : nous nous souvenons que des êtres humains vivent dans la Bande de Gaza. Des hommes, des femmes et des enfants : des mères, des pères, des frères et sœurs, des époux et épouses, des grands-mères et grands-pères : des gens comme vous et moi.

Nous, citoyens de pays démocratiques de six continents, empêchés de force par la marionnette qu’est l’état égyptien de nous rendre dans la Bande de Gaza, nous voulons vous dire que nous nous rappelons l’horreur déchaînée voilà un an sur la Bande de Gaza. Il y a un an cette semaine qu’Israël, allié des Etats-Unis, a mis fin à son attaque meurtrière contre la Bande de Gaza ; un an que des bombes au phosphore, des bombes à fragmentation et d’autres armes de mort et de destruction ont délibérément visé la population civile et sans défense de Gaza.

Dans votre discours du Caire, souvent cité, vous déclariez :
« Israël doit aussi satisfaire à ses obligations d’assurer que les Palestiniens peuvent vivre, travailler et développer leur société. Et, tout comme la crise humanitaire qui se prolonge à Gaza dévaste des familles palestiniennes, elle dessert la sécurité d’Israël, comme le fait le manque persistant de perspectives positives en Cisjordanie. Une amélioration dans la vie quotidienne des Palestiniens doit être constitutive d’une voie vers la paix, et il faut qu’Israël prenne des mesures concrètes pour rendre possible cette amélioration ».

Néanmoins, depuis ce discours, les Palestiniens n’ont rien vu d’autre que davantage de mort et de destruction. Vos belles paroles du Caire n’ont pas même eu pour résultat que les Palestiniens obtiennent du ciment pour rebâtir leurs maisons, leurs mosquées et leurs écoles.
Le siège de Gaza occupée est une punition collective de la population entière, en violation de la quatrième Convention de Genève. En tant que juriste, vous ne pouvez ignorer que cette Convention lie tous ses signataires, y compris les Etats-Unis, auxquels il est demandé que la Convention soit appliquée. Et pourtant, au cours des dernières semaines, l’infamie du siège israélien a été renforcée par la construction d’un nouveau mur qui va inévitablement resserrer encore le siège de Gaza et aggraver la crise humanitaire que le siège a toujours eu pour but d’infliger. Ce nouveau mur est construit par le gouvernement égyptien, avec l’assistance technique d’ingénieurs militaires américains. Le mois dernier, les Etats-Unis ont accordé la somme de 1,4 milliard de dollars au titre de l’aide militaire à l’Egypte, y compris pour des « programmes de sécurité frontalière et d’activités dans le Sinaï ».

Monsieur le Président,

La punition collective de Gaza occupée au nom de la « sécurité frontalière » – en violation directe de la quatrième Convention de Genève – est la politique de votre gouvernement.

Vous devez aussi prendre conscience du fait que, dans la guerre d’agression israélienne contre la Bande de Gaza, de nombreux civils ont été massacrés par Israël lors de bombardements indiscriminés – des actes condamnés comme crimes de guerre et crimes contre l’humanité par des experts des Nations Unies, y compris par le respectable juge sud-africain Richard Goldstone, et par les principales organisations de défense des Droits de l’Homme. Il n’empêche que vous-même, qui êtes un juriste, ignorez cette évidence irréfutable et continuez à soutenir Israël, un état qui pratique l’apartheid. L’attaque de décembre 2008-janvier 2009 a causé la mort de plus de 1.440 Palestiniens, civils pour la plupart, et parmi lesquels se comptent 431 enfants. En outre, 5.380 Palestiniens ont été blessés. Ce ne sont pas là des faits que nous allons oublier, pas plus que nous n’avons oublié Deir Yassin, Sabra et Chatila, Jénine, Naplouse, Beit Hanoun et plus de soixante ans de génocide israélien contre le peuple palestinien.

Dans votre discours du Caire, vous reconnaissez le droit des Palestiniens à la résistance non violente. Vous leur avez même conseillé de la poursuivre à l’instar des Afro-américains, des Indiens et des Sud-Africains.

« Pendant des siècles, en Amérique, les noirs ont subi le fouet comme esclaves et l’humiliation de la ségrégation. Mais ce n’est pas la violence qui a obtenu la pleine égalité des droits. Ce fut une insistance pacifique mais résolue sur les idéaux qui sont au cœur de la fondation de l’Amérique. La même histoire peut être contée par les peuples de l’Afrique du Sud et de l’Asie du Sud, et de l’Europe orientale jusqu’à l’Indonésie ».

Et voilà précisément, Monsieur le Président, ce que nous voulions faire dans la Bande de Gaza. Nous voulions marcher avec les Gazaouis pour manifester notre horreur du châtiment collectif qui leur a été infligé. Nous voulions demander qu’il soit mis fin au blocus hermétique qui leur a été imposé depuis les élections démocratiques de 2006. Et, certes, il y avait aussi parmi nous des citoyens d’Asie du Sud, d’Europe orientale et d’Afrique du Sud, tous regroupés au Caire, de sorte que nous connaissons à la fois l’humiliation de la ségrégation et le pouvoir de l’action collective. Et nous avons l’intention d’user de ce pouvoir pour soutenir nos frères et sœurs palestiniens, tandis qu’ils luttent pour recouvrer la patrie qui leur a été volée.

Nous en appelons à vous, Monsieur le Président, pour mettre fin au siège. Il s’agit là d’une responsabilité éthique et morale que vous ne pouvez esquiver. Nous, 1.400 militants internationaux de 43 pays, avions le projet d’être à Gaza le 31 décembre pour marcher avec les Palestiniens de Gaza et demander qu’Israël lève de façon immédiate et permanente son blocus de la Bande de Gaza. Nous en avons été empêchés parce que le gouvernement égyptien, un allié des Etats-Unis, nous a refusé le passage vers la Bande de Gaza, au moment même où il entamait la construction d’un nouveau mur pour resserrer le siège. Le droit nous a été refusé de montrer aux Palestiniens que nous soutenons leur droit à leur patrie, tel qu’il est garanti par la législation internationale. Le droit nous a été refusé de montrer aux Palestiniens que nous nous souvenons de leur souffrance et de leur détresse.

Le droit nous a été refusé de montrer à Israël et aux Etats-Unis que nous n’allons pas regarder ce qu’ils infligent aux Palestiniens et rester silencieux. Mais nous n’avons pas accepté ce refus de marcher en solidarité avec les oppressés, fût-ce à distance. Nous avons choisi de marcher et de protester, dans Le Caire même, en solidarité avec les habitants de Gaza.

Vous, Président Obama, avez fait choix de marcher en solidarité avec l’oppresseur. Vous avez choisi d’ignorer la souffrance et la spoliation du peuple palestinien. Comme vos prédécesseurs, Reagan et Thatcher, qui déclaraient en 1987 que Nelson Mandela ne serait jamais le Président d’une Afrique du Sud démocratique, vous avez vous aussi choisi d’ignorer la volonté du peuple.

Vous êtes du mauvais côté de l’Histoire, Président Obama, parce que nous, citoyens du monde, n’accepterons pas une Palestine occupée.
Vous être du mauvais côté de l’Histoire, Président Obama, parce que notre action collective, avec celle des Palestiniens en Palestine et hors de la Palestine et avec des millions de gens qui reconnaissent que leur cause est juste, nous assurerons de notre vivant l’existence d’une Palestine libre. De cela, nous avons la certitude.

(Traduit de l’anglais par Anne-Marie PERRIN pour CAPJPO-EuroPalestine)

CAPJPO-EuroPalestine