Header Boycott Israël

Les tentatives israéliennes de diviser les Arabes israéliens et palestiniens : un échec explique Meron Benvenisti

« Lorsque les Palestiniens se rebellent d’une manière unifiée, à l’encontre des diktats du « diviser pour régner », ils deviennent des terroristes qu’il faut sanctionner, intimider, à qui il faut imposer des sanctions collectives : seuls les Israéliens sont autorisés à les considérer comme un seul bloc, menaçant ; alors qu’il est exigé des Palestiniens de veiller méticuleusement à leur morcellement », écrit je journaliste israélien Meron Benvenisti dans Haaretz. Lire la traduction de Michel Ghys.


Impossible de séparer

Meron Benvenisti

La recherche des instances responsables des meurtres de la yeshiva Merkaz Harav occupe, de manière compréhensible, les enquêteurs et les médias. Mais il semble qu’il ne faille pas chercher les raisons de cette activité seulement dans le contexte sécuritaire mais aussi dans le contexte politique.

Des efforts considérables sont faits pour trouver à tout prix un lien entre le meurtrier venu de Jebel Moukaber [à Jérusalem-Est – ndt] et les organisations terroristes basées hors de Jérusalem, au-delà du mur de séparation, idéalement à Gaza ou Damas. N’importe quoi, le moindre drapeau du Hamas accroché par des jeunes gens, est brandi comme preuve de ce lien-là. La raison en est que si l’on ne trouve pas d’organe responsable et s’il apparaît qu’il s’agissait d’une initiative spontanée d’un jeune homme qui a agi parce que « les images en provenance de Gaza ne me laissent pas dormir » comme en témoigne sa sœur, c’est toute une conception portant sur les Arabes de Jérusalem-Est qui se trouverait minée, l’idée des « bons Arabes ».

L’érection du Mur sur l’absurde frontière municipale fixée en 1967, suivant un tracé qui traverse des zones palestiniennes densément peuplées, est dépourvue de toute logique urbaine et sécuritaire, sauf l’ambition de perpétuer l’idéologie du « Jérusalem réunifié pour l’éternité ». Le résultat en est qu’il faut expliquer pourquoi un quart de million de Palestiniens, restés du côté israélien, ne constituent pas une menace pour la sécurité, contrairement aux membres de leurs familles restés de l’autre côté du Mur de séparation.

C’est à cette fin que les Israéliens ont inventé un « groupe ethnique » distinct, les « Arabes de Jérusalem-Est » supposés coupés du peuple palestinien et apparemment non enclins à s’occuper de terrorisme du fait qu’ « ils ont quelque chose à perdre » : les droits qui accompagnent leur statut d’habitants d’Israël. S’il apparaît que, dans ses réactions et ses modes d’identification, le meurtrier ne diffère pas des autres Palestiniens où qu’ils soient, cela remet en cause la conception selon laquelle on aurait créé des sous-communautés palestiniennes porteuses d’agendas différents et qu’il serait possible de mener par la stratégie du « diviser pour régner ».

Le travail de sape de cette conception est encore accru devant la réaction de colère des Arabes d’Israël (autre sous-communauté palestinienne) aux événements sanglants de Gaza. Cette réaction, qui s’est exprimée lors de manifestations véhémentes, a été tenue pour illégitime. Quel rapport entre eux, citoyens d’Israël, et la situation à Gaza ? Voilà bien la preuve, apparemment, qu’ils constituent une cinquième colonne. Et quand on ajoute encore à ces deux groupes-là les autres sous-groupes inventés par Israël pour les besoins de la stratégie du diviser pour régner – la Bande de Gaza, la Cisjordanie et la diaspora palestinienne – et que tous expriment d’une seule voix leur colère et leur opposition, la question vient toute seule : assiste-t-on au commencement d’une nouvelle Intifada ?

Lorsque les Palestiniens se rebellent d’une manière unifiée, à l’encontre des diktats du « diviser pour régner », ils deviennent des terroristes qu’il faut sanctionner, intimider, à qui il faut imposer des sanctions collectives : seuls les Israéliens sont autorisés à les considérer comme un seul bloc, menaçant ; alors qu’il est exigé des Palestiniens de veiller méticuleusement à leur morcellement.

L’expérience des dernières semaines montre que la tactique du ‘diviser pour régner’ ne peut servir de méthode de contrôle que quand celui qui a le pouvoir s’abstient d’effusions de sang comme celles qui ont eu lieu à Gaza. La capacité de maîtriser la hauteur des flammes du conflit revient, que vous le vouliez ou non, au côté qui a la force pour lui, et ce fait-là, aucune justification ni aucun argument sur « qui a commencé » ne peut le brouiller ni l’effacer.

Meron Benvenisti

Haaretz, 17 mars 2008

www.haaretz.co.il/hasite/spages/964979.html

Version anglaise : Indivisible sub-groups – www.haaretz.com/hasen/spages/964824.html

(Traduction de l’hébreu : Michel Ghys)

CAPHPO-EuroPalestine